25oct 10

Retraites, violences dans les manifestations, appel à témoignage

En préparant la manifestation et la grève de jeudi

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D ans cette note je donne le détail d’arguments que je n’ai pu placer à l’occasion de mon passage à « Dimanche politique » sur France inter et ITV avec « le Monde » et Dailymotion. Et je reviens sur les retraites par capitalisation dont voudrait faire ses choux gras monsieur Guillaume Sarkozy. D’une émission d’une grosse heure abordant toutes sortes de thèmes, la machine médiatique n’a retenu que cinq phrase à propos de violences dans les manifestations sur lesquelles je me suis exprimé fort complètement dans ma précédente note. Je vous y renvoie si vous arrivez ici pour la première fois.  Pour vous aider à bien comprendre la manipulation de mes propos cette fois ci, je publie le script de ce que j’ai dit. Je souhaite que tous ceux d’entre vous qui connaissent des policiers fassent parvenir ce document à leurs amis pour qu’ils apprécient eux-mêmes, en connaissance de cause. De cette façon, une nouvelle fois nous tirerons avantage d’une polémique que l’on aura voulu m’infliger.

Je dois excuser le blocage de ce blog hier soir et une partie de la matinée. En cause : l’effondrement de notre serveur la nuit passée après l’émission. Vous avez été trop nombreux à nous prendre d’assaut pour voir ce que j’ai écrit à propos des violences dans ma précédente note. Neuf mille consultations en quelques heures : tout a explosé ! Depuis, un nouveau serveur dédié a été mis en service dont la capacité d’accueil est huit fois celle du précédent. Des excuses aussi à ceux dont les commentaires ont été perdus dans l’opération de transfert. A tous un grand merci pour l’intérêt que vous accordez à ma prose souvent interminable.. Vous êtes la principale protection et force d’intervention dont je dispose sur la toile pour contrecarrer et impulser.

A partir de demain, je nomadise entre Paris, Bruxelles où il y a session, et Namur où je vais faire une conférence à propos du grand marché transatlantique à l’invitation du syndicat belge FGTB. Je serai donc moins présent sans doute – mais ce n’est jamais certain – sur ce blog, sinon pour lire vos commentaires et informations.

 Ce soir, au secrétariat du Parti de gauche nous avons fait un très large et très profond tour d'horizon sur la situation, en dépit de l'état de fatigue quasi total de notre équipe qui court d'une tache à l'autre, sans oublier le boulot et la famille. Nous avons confirmé notre ligne de suivre les syndicats sans rechigner et de mobiliser autant qu'on peut, là où on peut, derrière eux. En même temps, la décision a até prise de proposer au Collectif National Retraite, où nous représentera notre responsable au relations unitaires lui-même, Eric Coquerel, l'idée de transformer l'appel intersyndical à manifester le 6 novembre en manifestation nationale à Paris. Notre idée est que, dans le contexte, il faudrait avoir une très forte poussée d'action centrale pour faire la démonstration de force dont nous avons besoin dorénavant. Bien sur, c'est une proposition. Juste une proposition. Nous n'en faisons en aucune façon un sujet de polémique. Et si l'on n'est pas d'accord avec notre idée, nous ne faisons aucun procès d'intention à qui que ce soit. Cependant nous aimerions que notre idée soit considérée et examinée pour ce qu'elle est, dans le contexte du lendemain du vote des assemblée. Ce sera le moment où Sarkozy va jouer de toutes les diversions pour tourner la page de la lutte. Une démonstration d'hyper force national dans la capitale est une image indélébile de la situation de ce pays et un argument déjà bien réussi dans le passé pour marquer une lutte.

J’ai eu l’occasion de dire que la réforme des retraites en France était la réforme « la plus dure et la plus cruelle d'Europe ». Je voudrai ici donner noir sur blanc mes arguments. Il me semble que c’est utile  dans la mesure où, comme vous l’avez entendu des centaines de fois, le refrain de la droite et de nombre de journalistes revient en boucle : « mais les autres pays en font autant ! Pourquoi nous seuls aurions raison de vouloir refuser l’allongement des durées de cotisations ? » En fait, bien que l'âge du droit au départ à la retraite soit plus bas en France qu'en Allemagne (63 ans et 67 ans à taux plein) et au Royaume-Uni (65 ans avec un relèvement programmé à 66 ans en 2020 et 68 ans en 2046), la durée de cotisation requise est bien plus élevée en France (41,5 ans) qu'en Allemagne (35 ans) et au Royaume Uni (30 ans). Au Royaume Uni, le recul de l'âge légal a eu pour contrepartie l'abaissement des durées de cotisations (passées de 44 ans à 30 ans). Dans d'autres pays d'Europe, l'âge légal de départ à la retraite sera moins élevé qu'en France : 61 ans en Italie (36 ans de cotisations) et 61 ans en Suède. La réforme française est aussi la plus brutale car c’est la moins étalée dans le temps.  D’ailleurs, le Conseil d'Orientation des retraites remarquait dans son rapport d’avril 2010 que, dans les autres pays, «les réformes sont très étalées dans le temps. Entre l’annonce des mesures et la fin de la réforme, il s’écoule parfois plusieurs décennies». La réforme Sarkozy se distingue donc par le rythme très rapide de relèvement de l’âge légal de départ, à raison de quatre mois par an pour parvenir au terme de la réforme en 2018. La réforme britannique ne relève l'âge légal qu'au rythme de 1,2 mois par an et la réforme allemande ne relève l'âge du taux plein qu'au rythme de 1,3 mois par an.

Les frères Sarkozy et la retraite par capitalisation… J’ai évoqué la question mais je n’ai pu m’étendre sur ce sujet pour la raison qu’on ne m’a guère interrogé dessus. Mais j’avais sérieusement préparé mon propos. J’en rends compte également ici. Je voulais commencer par une citation de Nicolas Sarkozy sur TF1, le 25 janvier 2010. « Je garantirai la pérennité du régime de retraite… Je ne changerai pas le régime par répartition (…) par un régime où chacun épargnerait de son côté… Il faudra que tout soit mis sur la table : l’âge de la retraite, la durée de cotisation et la pénibilité. La seule piste que je ferme tout de suite, c’est celle de la diminution des pensions… La réforme des retraites concernera tout le monde… Les pensions sont trop basses… » Puis je veux montrer que la réforme Sarkozy encourage en fait surtout la retraite par capitalisation.

Le « titre V » du projet de réforme est en effet entièrement consacré à « l'épargne retraite », euphémisme français pour désigner la retraite par capitalisation. C’est le cas à l’article 32 de la loi de réforme des retraites. Il modifie la réglementation en faveur d'un développement du système de retraite par capitalisation. Voici comment. La moitié des sommes perçues par un salarié au titre de la participation aux résultats de l’entreprise sera, sauf avis contraire dudit salarié, obligatoirement versée soit sur le plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) soit sur le plan d’épargne retraite populaire (Perp). Sauf avis contraire ? On attend de voir qui osera ! Les salariés qui ne bénéficient pas d'un compte épargne temps, un système qui permet de transformer en rémunération, immédiate ou différée, des périodes de congé ou de repos non prises dans leur entreprise, peuvent dorénavant transformer leur jours de congés en sommes capitalisées en épargne retraite. Bien joué, non ? La réforme répond ainsi à une demande de Laurence Parisot qui avait réclamé « un nouveau dispositif très incitatif, voire obligatoire, de système par capitalisation ». Vous avez bien lu : elle voudrait un régime de retraite par capitalisation obligatoire ! Obligatoire, rien de moins ! Le député UMP Yannick Paternotte est à l'initiative de ces nouvelles mesures. Il se dit fervent promoteur du « second pilier de la capitalisation ». Dès lors, la logique du texte adopté est claire. « Nous voulons inscrire l’épargne retraite comme un appui [à la retraite par répartition] et non comme un tabou », a plaidé le député UMP Arnaud Robinet. Xavier Paternotte, de son côté, reprend sans pudeur les arguments du Medef pour expliquer ce volet de la réforme des retraites. Pour lui, «relancer l’épargne retraite constitue une urgence sociale et un gage de compétitivité du tissu économique, favorable à l’emploi de demain. » Demain bien sur ou bien après demain. Ben, voyons donc !

C’est dans ce contexte que l’on doit apprécier l’arrivée tonitruante de Guillaume Sarkozy investissant dans les sociétés de retraites par capitalisation, avec l'aide de l'Etat. Guillaume Sarkozy est le délégué général du groupe Malakoff Médéric, une société spécialisée dans les assurances, la mutuelle santé, l'épargne, la prévoyance et la retraite qui emploie 6 300 collaborateurs et affiche 3 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Ces principales activités aujourd'hui sont très orientées déjà. Il s’agit de la gestion d’une délégation de l’Agirc (retraite complémentaire des cadres) et de l’Arrco (retraite complémentaire des non cadres) : 3,1 millions de salariés cotisants et 2,7 millions de retraités en 2009. Et de la vente auprès des entreprises et des salariés de contrats d'assurance dans le domaine de la santé, de la prévoyance, et de l’épargne-retraite (retraite par capitalisation). Un article de Médiapart annonce la création, au 1er janvier 2011 d'une nouvelle société qui regroupera le groupe Malakoff Médéric, la CDC (Caisse des dépôts et de consignation, organe de l’Etat) et la CNP (Caisse Nationale de Prévoyance, filiale de la CDC contrôlée par Pérol, un pantoufleur proche de  Nicolas Sarkozy).

L'objectif affiché par cette nouvelle société, appelée Sevriena est de jouer un rôle majeur sur le marché de la retraite complémentaire dans les années à venir. Leur idée est de compenser l’érosion des taux de remplacement. En clair la baisse du niveau des pensions ouvre un marché. Grace à la politique de Nicolas Sarkozy qui aboutit à une baisse des pensions, il y a un espace pour que Guillaume Sarkozy propose des solutions de retraite complémentaires aux salariés cadres et non-cadres. Le plan de marche de l’opération est parfaitement clair. "La diffusion de l’offre reposera sur une démarche commerciale imbriquant étroitement le collectif et l’individuel : des commerciaux collectifs pour vendre des produits d’épargne retraite collective et fournir des contacts qualifiés aux commerciaux individuels, qui approcheront les salariés en cohérence et en complémentarité avec le dispositif de retraite supplémentaire de l’entreprise". "L’intérêt de la démarche est de s’appuyer sur le levier du collectif pour contacter les salariés. La structure née d’un partenariat équilibré entre la CDC, CNP Assurances et le Groupe MM aura une action décisive dans la prise de conscience du marché et une contribution majeure au financement des besoins de retraite des salariés, cadres et non cadres. En dix ans, elle s’imposera comme le leader des solutions d’épargne retraite collective et individuelle avec une part de marché de plus de 17% en retraite collective et 4% en retraite individuelle".

L'Elysée a soutenu la création de cette société, c’est une certitude. Voici pourquoi. Elle n'aurait jamais vu le jour sans l'appui de l'Etat. En effet, la Caisse des dépôts et des consignations est une institution publique. La Caisse nationale de prévoyance, qui est une filiale de la CDC est présidée par François Pérol, ancien secrétaire adjoint de l'Elysée. Une enquête pour "prise illégale d'intérêt" avait été menée contre François Pérol suite à sa nomination à la tête de Banque populaire-Caisse d'épargne (BPCE). Il avait joué un rôle essentiel dans la fusion des deux établissements bancaires avant d'en prendre la direction fin février 2009, juste après son départ de l'Elysée. Or, la loi du 2 février 2007 interdit à tout fonctionnaire de travailler pour une entreprise qu'il a surveillée, avec laquelle il a conclu un contrat ou qu'il a conseillée dans ses opérations durant les trois années précédant son départ de la fonction publique. Il a été blanchi. Pour rappel, la CDC, de son côté, gère le fond de réserve des retraites ! Créé par Lionel Jospin, il vise à pérenniser le système par répartition en l’abondant au creux démographique prévisible. Il parait donc étrange, et même insupportable, qu'elle investisse dans une société destinée à faire le jeu du système adverse, celui de la retraite par capitalisation. On pourrait ainsi voir de l’argent destiné a la retraite par répartition abonder des fonds pour la retraite par capitalisation ! Malins les frères Sarkozy !

De cette émission d’une heure, dimanche soir, la machine médiatique a tiré une dépêche sensationnaliste de quelques mots et quarante secondes d’extraits à propos de mes prétendues accusations contre « la police », en général. Il s’agit évidemment de nuire. Je n’accuse pas « la police », ni « les policiers », en général, tout le monde peut s’en rendre compte en écoutant mon intervention. Et même en se contentant de l’extrait tendancieux qui est mis en boucle.  Ou en lisant la transcription de mes propos. On voit aussitôt le montage. Loin de mettre en cause « la police » je mets en cause ceux qui organisent ces infiltrations et donnent les ordres. Le journaliste, et non moi cite le ministre de l’intérieur de la même manière que c’est le journaliste et non moi qui évoque le rôle des policiers dans les incidents et que c’est l’autre journaliste qui essaie de me faire dire que ces policiers sont des provocateurs. De mon côté, je dis, au contraire que la police et les policiers agissent sur ordre et non de leur propre initiative et je demande qui donne ces ordres ! Mais pour la meute, j’aurais accusé « la police », « les policiers » etc.… On connait la musique. D’abord il s’agit de faire du bruit, du scandale, du spectaculaire. Une armée de fainéants va recopier sans se soucier de savoir ce que j’ai dit réellement. Les mêmes perroquets et perruches qui répètent les argumentaires de l’UMP selon lesquels « le mouvement s’essouffle », « l’approvisionnement en essence est normal », « les syndicats se divisent » et autres mensonges ordinaires.  Ce procédé est destiné à diaboliser toute parole non orthodoxe. Je ne pourrai plus dire un mot si je m’en tenais à leurs injonctions. Voici donc mes propos exacts, vérifiables à l’écoute de la vidéo.

Emission Dimanche soir politique - 24 octobre 2010. Je suis interrogé par Jean-Jérôme Bertolus (i-télé), Françoise Fressoz (Le Monde) et Jean-François Achilli (France Inter). Extrait du passage sur les violences dans les manifestations. (…)

Jean-Jérôme Bertolus : « Jean-Luc Mélenchon, parlons un petit peu des incidents en marge des mobilisations, qui ont émaillé les dernières manifestations. Qui est responsable ? Est-ce que ce sont les jeunes qui sont jugés immédiatement et qui pour certains ont pris de la prison ferme ou est-ce qu'il faut voir autre chose derrière des incidents ? Les policiers ? »

JLM : « Là vous m'interrogez sur quelque chose de grave. D'abord je désapprouve totalement ces condamnations en urgence de jeunes, notamment de mineurs, à des peines de prison ferme, ce qui est un fait inouï. Pour autant notre intérêt est de bien comprendre ce qui se passe. La police nationale est une police républicaine, et nous n'avons pas, nous gens responsables à la considérer comme une armée d'occupation. Maintenant il faut que les policiers républicains, qui pour beaucoup d'entre eux marquent une distance avec les ordres qui leur sont donnés, certains ont fait valoir leur droit de retrait tant ils sont épuisés, affirment de manière beaucoup plus forte leur opposition à un certain nombre de consignes et de pratiques.

Les pratiques dont je parle, c'est cette présence, dans les cortèges de manifestants, de personnes infiltrées qui jettent des pierres,  brisent des vitrines et ensuite sortent des brassards de police. »

Françoise Fressoz : « Vous avez des preuves de ça ? »

Jean-Jérôme Bertolus : « Vous parlez des policiers ? Vous voulez dire qu'il y a des policiers qui jettent des pierres, qui brisent des vitrines ? »

JLM : « Oui, parce que j'ai même mis une photo sur mon blog, qui a été prise en Savoie par des amis et hier sur la place Beaubourg, là où nous étions en train de collecter les sous, un jeune dirigeant étudiant a expliqué comment il a vu de ses propres yeux des gens qui étaient les plus ardents à jeter des pierres ensuite sortir des brassards. C'est d'ailleurs pas la première fois qu'on voit une chose comme celle-là. »

Jean-François Aquili : « Ce sont des accusations lourdes … »

JLM : « c'est un constat Monsieur, pas une accusation. Je pose la question de savoir qui donne de tels ordres … »

Jean-Jérôme Bertolus : « alors qui ? »

JLM : « je ne le sais pas, »

Jean-Jérôme Bertolus : « vous pensez que ça remonte au ministre de l'intérieur pour être clair ? « 

JLM : « évidemment je ne pense pas que des décisions de … »

Jean-Jérôme Bertolus : « c'est Brice Hortefeux qui .. ».

JLM : « évidemment, vous ne croyez quand même pas que des policiers qui … »

Jean-Jérôme Bertolus : « non je vous pose la question …. »

JLM : « oui, mais personne ne peut croire que des policiers, de leur propre initiative, décident de se déguiser en manifestants, de jeter des pierres, pour ensuite interpeller, personne ne peut croire ça. Ils ont des ordres, ce sont des fonctionnaires, ce sont des gens qui obéissent, et personne ici ne va dire la police doit faire ce qu'elle veut. »

Jean-Jérôme Bertolus : « Brice Horetefeux, ministre de l'intérieur, demande à certains de ses policiers de se transformer en casseurs … c'est ça l'idée ? »

JLM : « c'est vous qui le résumez comme ça. Moi je me suis contenté de faire des constats. » 

Jean-François Aquili : « Ce sont des provocateurs … au moins des provocateurs … »

JLM : « Je connais très bien la manipe des médias pour faire dire quelque chose, pour ensuite … »

Jean-Jérôme Bertolus : « c'est pas ce que vous avez dit ? »

JLM : « non. J'ai posé la question. Vous m'avez posé la question de savoir s'il y a des policiers, j'ai répondu oui. Je vous ai ensuite dit que les policiers obéissent aux ordres car ils ne le font pas de leur propre initiative. Je vous le confirme, et donc je pense que le ministre de l'intérieur est au courant, c'est donc à lui qu'il faudra poser la question. »

« Pourquoi je me méfie ? Parce qu'il y a quelques jours j'ai dit qu'il fallait que chacun sache bien que quiconque casse n'est pas de notre bord et se trouve … est un Sarkozyste … Je n'ai jamais eu l'intention de dire que les membres de l'UMP allaient casser des vitrines ou jeter des pierres, ou de se mettre des cagoules pour le faire … je n'ai jamais voulu dire ça … c'est pourtant ça que j'ai lu, que j'aurais accuser l'UMP d'aller faire les casseurs, non ce n'est pas vrai, ce n'est pas sérieux, ce n'ai pas ce que je dis. »

Françoise Fressoz : « Votre crainte pour cette semaine c'est la casse ? »

JLM : « mais nous, la gauche, le mouvement social, nous redoutons ça plus que tout, parce que nous savons très bien que ça ne sert que nos adversaires. Qu'est-ce qu'on montre à la télé, des images de violence, on ne montre pas les gens dans les sites en grève, on ne montre pas la famille essayant de boucler ses fins de mois après trois ou quatre jours … »

Jean-Jérôme Bertolus : « on montre, Jean-Luc Mélenchon … »

JLM : « vous aimez beaucoup ces images là, on les montre pendant que je parle, on voit du feu, on voit des flammes … »

Jean-Jérôme Bertolus: « non, non, il faut pas toujours caricaturer le travail des journalistes »

JLM : « je ne caricature pas, c'est vous qui les défendez de manière corporatiste et systématique. »…

 

Je savais de quoi je parle. J’ai non seulement les témoignages publiés sur mon blog mais aussi mon exemplaire du dernier numéro de « L’humanité dimanche » qui consacre un page entière à la vidéo où l’on voit un étrange casseur démolir une vitrine et se trouver protégé par d’étranges complices qui sortent des matraques et donnent des ordres à un cordon de CRS. C’est pourquoi je pense utile de publier ici la prise de position de la CGT, le 22 octobre, sur le sujet. J’y souscris entièrement, bien sur.

« Le Gouvernement perd son sang froid ! Bousculés par la mobilisation massive des salariés contre leur réforme des retraites, le Président de la République et le Gouvernement se murent dans une posture de déni et dérivent vers une politique de répression et de violences policières. (…) Dans de nombreuses villes, les forces de l’ordre ont reçu la consigne de brutaliser les manifestants. Le Gouvernement tente d’opérer un amalgame intolérable entre les manifestations et quelques actes de violence intervenus dans certaines villes. Des militants sont poursuivis, arrêtés, placés en garde à vue, simplement pour avoir collé des affiches comme à Roanne ! Les CRS chargent des queues de manifestations, sans aucune raison, comme à Lorient. La CGT appelle les salariés, les grévistes à la vigilance du fait de la présence de provocateurs dans les initiatives syndicales. Ils incitent à des actes violents susceptibles en retour d’alimenter la répression policière et le discrédit de la lutte. La CGT dénonce également le « camouflage » sous des autocollants syndicaux, dont ceux de la CGT, de policiers dans les manifestations et rassemblements. Le Président de la République et le Gouvernement sont confrontés à une mobilisation unitaire solide, déterminée et toujours soutenue par 69% de la population, selon une enquête d’opinion publiée ce matin. Ce serait une nouvelle erreur de leur part de croire que le débat puisse être détourné vers le thème de la sécurité alors que l’origine des tensions actuelles se trouve dans les injustices de la politique économique et sociale. La CGT ne laissera pas dévoyer les revendications au cœur de la mobilisation actuelle. Montreuil, le 22 octobre 2010 »

Comme d’habitude, s’agissant de mes déclarations, c’est une balle dans le pied que se tirent les médiacrates. De nombreuses personnes iront voir le passage incriminé et ils verront que je n’ai rien dit des propos que leur titraille sensationnaliste m’attribue. Ce sera une nouvelle occasion pour des centaines de gens de comprendre la véritable nature du système qui produit de telles « informations ». Sans oublier les policiers qui iront se renseigner et se rendront compte de la manipulation médiatique. Car il faut pour se rendre compte de l’irresponsabilité de telles pratiques, écouter ce que je dis, mes appels à la raison vis à vis des policiers au moment où un nombre grandissant de personnes engagées dans la lutte ne supportent plus les violences abusives dont font l’objet les grévistes et les manifestants. Ma dénonciation des casseurs également ne rentre pas dans les cases reformatées des clichés où il est nécessaire que le mouvement social et la gauche soit confondus avec les casseurs. Mais la meute est fondamentalement irresponsable. Peu lui importe qu’un responsable politique dise des paroles destinées à raisonner. Seul l’intéresse le sensationnel. L’avantage est que, bien des gens vont se mettre à témoigner, à filmer, à photographier et à raconter. C’est bien. Faites le, et donnez vos trouvailles sur tous les sites d’informations et les blogs personnels. Je donne l’exemple en vous donnant le lien vers le blog de Guy Birenbaum qui relate un curieux témoignage. 

Il faut donc contribuer à faire connaitre cet épisode de façon à discréditer plus profondément encore le système qui les produit. Personne d’entre nous ne doit oublier qu’il s’agit d’une lutte et non d’un colloque mondain. L’information est le premier enjeu puisqu’il s’agit de la conquête des consciences. Dans ce contexte, mes efforts ne valent que si vous ne les prolongez autant que vous pouvez, de tous côtés. Il faut saisir l’occasion pour aider à réfléchir ceux qui en resteront à la surface des choses – les gros titres et les extraits choisis – comme les naïfs d’autrefois qui croyaient tout ce qui « est dans le journal », ou ce que leur avait dit le curé du village ou sa bonne, dont les équivalents aujourd’hui sont ce système de bourrage de crane.

Dés ce soir je publie ce que j’ai sous la main sur ce thème. C’est le témoignage  un camarade  lyonnais du Syndicat National des Travailleurs de la Recherche Scientifique  de la CGT. « Je voulais  vous signaler un incident qui nous a été rapporté par  notre secrétaire de syndicat. Il était sur la place Bellecour avant  le début de la manif du 19 octobre avec ses  collègues pompiers et des groupes de jeunes, quand ils ont assisté  à une agression verbale et physique de la part d'individus, qui portaient des  badges CGT, vis à vis d'un groupe de jeunes. Les pompiers se sont interposés  et ont réussi à ceinturer les agresseurs (ce sont des pompiers et ils sont  costauds!).Tant et si bien qu'ils ont eu la surprise de voir ces individus  sortir leur carte de  police  pour se défendre car c'était des flics de la BAC! Non  mais, est ce vous y croyez ?!!! J'ai beau me dire qu'ils sont capables de  tout, je n’en suis quand même pas revenu ! Du coup, les pompiers leur ont arraché leurs badges CGT et leur ont dit qu'ils valaient mieux pour eux  qu'ils foutent le camp. Ce qu'ils ont  fait. »

Allez y collectez, filmez, photographiez. C'est le fond qui manque le moins. Et le reste vous sera donné par surcroit.


206 commentaires à “En préparant la manifestation et la grève de jeudi”
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  1. THIERRY dit :

    Les débordements de la police çà n'existe pas peut être? Faut arrêter de vivre dans le monde des bisounours. La police c'est d'abord le bras armé et le garde fou du gouvernement surtout dans les régimes...non démocratiques.

  2. Catherine dit :

    Bonjour

    En réponse à Muriel, fille de gendarme mobile. D'abord nulle part il n'a été question des gendarmes mobiles mais des policiers de la BAC. Effectivement, il s'en est vu un peu partout en France avec des témoignages de même type. Et ce n'est pas nouveau de genre d'infiltration. J'ai souvenance d'ailleurs, au moment des manifestations anti CPE de vieux syndicalistes partis faire la course à des casseurs de vitrines à Paris. Quelle n'a pas été leur surprise quand après avoir attraper ces fameux "casseurs" de voir que c'était des policiers qui avaient sur eux leur carte ! Alors oui il y a dans toutes les manifestations, et ce depuis fort longtemps, des policiers parmi les manifestants et qui ne sont pas là pour protéger le citoyen !
    Un grand merci à Mr Mélenchon d'oser dire bien haut ce que nous pauvres citoyens lambdas ne pouvons faire !

  3. Vuez bernard dit :

    Il est temps de remettre l'être humain au centre de la vie, de celle qu'il se choisi. Assez de se soumettre aux exigences d'un seul homme, qu'il soit de droite ou de gauche. Le désir de pouvoir rendant l'homme insensible à l'autre et la monarchie fait ses ravages. Laissez le peuple décider c'est l'abc de toute démocracie. Nous qui vivons sur la terre des droits de l'homme, nous qui depuis Pascal Paoli, le premier à avoir proclamé <>c'était 30 ans avant la révolution de 1789 et qui a même donné le souffle de celle des états unis d'amérique, nous qui avons toujours été l'éxemple et l'espoire pour tant de pays brimés où la seule liberté est celle de se taire; nous avons le devoir de reprendre notre histoire en main. Retrouver le chemin de la liberté, de l'égalité et de la fraternité
    Oui Mr Mélanchon, qu'ils s'en aillent tous........On sait faire

  4. doray nico dit :

    La manif de jeudi, a Paris, au niveau des grands magasins, la police envoie des mecs cagoulés essayer de foutre le bordel, taper un peu, ils se font foutre dehors par la cnt, qui se fait gazer en retour par les flics en civil, je vois un mec se faire dérouler par un cogne à coup de tonfa alors qu'il est au sol. On s'approche pour intervenir, on se fait regazer. Sur la place de fin de manif, la bac est encore là à chercher les emm****s, ils se font dégager derrière les cordons de flics par la cgt et sud.
    Le mouvement continue ! Avec ou sans la provoc de la popo.

  5. Christian B dit :

    Jean-Luc Mélenchon,

    Merci pour votre combat juste et loyal.
    J'apprends encore beaucoup en lisant votre dernier livre, on est en plein dans une démarche forte, humaine, concrète et durable.
    Tenez bon, car il y a là un réel espoir pour nous tous, c'est de l'art politique.

    Bien amicalement

  6. Philippe dit :

    Le Conseil Constitutionnel, en ce qui concerne la taxe carbone française, a enterré le 01 janvier 2010 ce projet fumeux. Les 9 sages ont eu l'excellente idée d'annuler cette contribution carbone estimant, à juste titre, qu'elle créait une inégalité face à l'impôt !
    Le samedi 6 novembre 2010, il y a une grande manifestation à PARIS et dans toute la France, y compris dans les DOM-TOM... Citoyens, citoyennes, jeunes gens... Il faut s'y rendre très nombreux ! C'est vital !
    Je m'adresse également aux responsables des organisations syndicales, et notamment, à Monsieur François CHEREQUE de la C.F.D.T. : il faut continuer énergiquement les manifestations car le Conseil Constitutionnel doit statuer sur cette réforme boiteuse des retraites.
    Les 9 sages sauront écouter intelligemment le peuple, car cette réforme nous enfume. Sortons tous ensemble dignement de ce brouillard sarkozien !
    Il ne faut rien lâcher !
    Cordialement et sincèrement Philippe


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