29nov 10
C ette note n’a pas de rapport avec l’actualité immédiate. J’y reviens sur un thème de mon discours de clôture au congrès du Mans. Il s’agit du précariat et du « peuple » comme acteurs de notre histoire actuelle. Non que je propose de découvrir la précarité.
Je veux montrer comment la généralisation de la précarité en affectant toutes les couches sociales du salariat oblige à installer un acteur politique nouveau : « le peuple », qui se substitue aux anciennes catégories sociales du discours traditionnel de la gauche tout en les incluant.
Il va de soi que la plaisante polémique que j’ai provoquée, en utilisant une interview de l’Express à propos du « populisme », appelait cette explication. On me concèdera que rien n’est plus difficile que de lancer un débat « théorique » dans notre pays. Pourtant les gens qui proposent des débats intéressants sont légion. Ils ont peu d’écoute, et moins encore de rebonds dans la sphère médiatique. Et donc, la sphère politique qui l’accompagne n’en a même pas conscience. Nous sommes quelques poignées à nous tenir au courant, à lire et à échanger sur la base de leurs travaux. Il y a cependant un moyen facile d’allumer la lumière quand on est sur la scène politique. C’est de donner quelque chose de saignant à la meute qui gémit d’excitation à l’idée qu’elle va pouvoir vous dévorer. Jetez un os et aussitôt la clameur des chiens qui se battent pour le déchirer remplit le silence d’avant. Ainsi du populisme si l’on veut faire parler du peuple. Le mot « populiste » lui-même n’a aucun intérêt. C’est son usage qui compte. Que lui fait-on désigner ?
Qu’est ce que le populisme ? On ne sait pas. Les définitions varient à l’infini. Cela montre bien que le mot fonctionne seulement dans une mission péjorative. Il doit flétrir ceux qu’il désigne. On affronte ce mépris facilement dans la polémique : il suffit de demander ce que le mot veut dire. Confusion assurée pour l’imprécateur. Pour ma part j’ai construit ma compréhension du sujet en lisant, il y a déjà quelques temps, Alexandre Dorna, son livre sur le thème et ses publications dans « Le Monde Diplomatique », à l’époque où le label refit surface pour décrire Poutine puis Chavez et ainsi de suite. Dorna parvient dans le meilleur des cas à une phénoménologie du populisme plutôt qu’à une définition par les contenus programmatiques. En réalité, à cette heure, l’accusation de populisme ne fait que révéler la peur ou la haine du peuple de celui qui profère la dénonciation. J’ai assumé, par bravade, le terme, après qu’Elise Karlin et Christophe Barbier m’aient suggéré dans une question pour une longue interview dans l’Express que je voulais « rendre ses lettres de noblesses au populisme de gauche » (sic).
Cela m’a paru être une formidable opportunité. Et ce fut le cas, même si j’ai du attendre près de quinze jours pour que le feu prenne. N’importe quelle personne sensée se serait arrêtée un instant pour mesurer que ce mot n’a aucune définition communément admise. Personne d’ailleurs ne s’est jamais donné le mal de le définir une seule fois en croyant m’en accabler. Qui a tenu compte du fait qu’il contient des contradictions disqualifiantes ? Le journal « Marianne » les a scrutées des dizaines de fois dans le détail ? Qui s’en est soucié ? Personne ! Mes amis et moi, si ! En convoquant « le peuple », autant que la « classe ouvrière et les employés » ou « les ingénieurs, les professeurs et les architectes » autres figures de référence de mes discours, mon intention est de parvenir à une nouvelle formulation de la latéralisation du champ politique.
Le but premier, la méthode de notre combat, est de rétablir la logique de discorde. De la contradiction. Le tableau actuel ne le permet pas ou bien seulement très mal. Pourtant nous avons besoin du débat clivant pour réveiller l’esprit civique et le confronter à des choix tranchés. Certes, les mots de « droite » et de « gauche » gardent toute leur pertinence. Mais les titulaires officiels de ces deux marqueurs ont volontairement brouillé les cartes et fait tomber les barrières. Pour ne vexer personne je vais chercher un exemple lointain. Je me souviens de cet ami, président du Sénat bolivien. Je lui confiais mon malaise : pourquoi n’utilisait-il jamais le mot « gauche ». Il me répondit : « mais je suis de gauche, évidemment ! Je sais très bien quelle est la différence ! J’ai payé cher pour ça dans le passé ! Mais ici la droite et la gauche ont été aussi cruelles et corrompues l’une que l’autre et les gens ne font plus la différence entre eux. Donc je dis que je suis d’en bas. » Cette confusion n’est pas partout, cela va de soi. Mais il est vain de se la cacher. Pour un nombre considérable de gens, il n’y a pas deux gauches, l’une idéale et rêvée qui serait magnifique et l’autre, décevante, réelle et actuelle. Pour beaucoup de gens, la gauche c’est le PS et tout le reste c’est l’extrême gauche. Et pour les mêmes une telle gauche c’est un problème car elle n’est pas crédible. Elle est même ressentie au pire comme hostile, au mieux comme un pis aller. « Ce sont tous les mêmes » dit-on de tous côtés. « Ils ne feraient pas mieux », dit-on des socialistes, en les comparant à la droite. Le vocabulaire courant reprend ce refrain qui souligne l’équivalence entre droite et gauche. La presse s’acharne à leur répéter cette vision du monde entre pareil et presque même : « la seule politique possible » fournit les couplets et « Sarkozy ou Strauss-Kahn » le refrain.
Ce n’est pas seulement du fait d’une prostitution des mots par la poignée de carriéristes de la politique et de la communication s'il en est ainsi. Certes ceux là ont inventé la transgression des frontières sémantiques comme une ruse de propagande. Ce fut la fameuse « triangulation » chère aux blairistes et leurs spin’doctors. Il y a une raison de fond à la confusion. C’est que dans l’attelage social que la gauche menait sous la direction du PS à l’issue des années quatre vingt, il s’est produit une rupture et une nouvelle organisation du champ des représentations. Les classes moyennes supérieures se sont identifiées aux valeurs du modèle libéral qui révolutionnait les rapports sociaux. Elles ont entrainé à leur suite l’étage immédiatement suivant. Ce ralliement a pris la forme d’une incorporation des normes de vie et de consommation, des valeurs et des signes de reconnaissance, bref de tous les marqueurs culturels d’une appartenance. L’histoire de la « moyennisation » promise à la société tout entière s’est achevée en réalité dans le ralliement fantasmatique des « moyens » aux puissants. Cette évolution a pu se croire autonome. Le vocabulaire en rend compte. On n’a jamais tant parlé du « décrochage des classes populaires ». On a mis en cause les retards de formation, leur inertie sociale et ainsi de suite. Jamais on n’a évoqué le décrochage, la fuite en avant, des classes moyennes supérieures ni celle de leur suite fascinée, les « moyens-moyens », dont la corruption s’est payée au prix fort social. Les stocks options n’ont pas été réservée aux seuls bénéficiaires de retraite chapeau ! Les élites payées pour leur aptitude à « produire de la valeur » ont trahi leur classe d’origine, leur usine, leur canton qui en vivait et même leur patrie, chaque fois au nom de la raison supérieure de « la contrainte extérieure », euphémisme contemporain de la capitulation sans condition.
Mais la pluie de bienfaits que les "moyens" ont cru gouter du fait de leur performance sociale se payait d’une destruction générale du lien social. Les premières victimes ont été évidemment ceux qui survivaient grâce à feu le « filet social ». La dislocation du « bloc social majoritaire » que les socialistes s’efforçaient d’accompagner est dans ce mouvement. Je ne suis pas surpris de voir dorénavant les chefs socialistes assumer un discours réduit à une doctrine compassionnelle, « le care », sorte d’invitation faite aux retraités nantis d’avoir à prendre en charge le soin de leur descendance engloutie dans la précarité. Mais, je vais trop vite dans mon exposé.
Parler de droite et de gauche, dans les conditions actuelles, ne suffit plus à latéraliser le champ politique dans l’esprit du grand nombre. Surtout après le référendum de 2005, davantage encore depuis que le gouvernement Sarkozy a compté jusqu'à 20% de membres issus du Parti Socialiste. Surtout depuis que le nombre des désorientés a grimpé jusqu'à trente pour cent de l’électorat, à moitié dilués dans l’abstention et à moitié évaporé dans le nuage d’électeurs volatils. Notre projet, s’il vise à devenir majoritaire, doit nommer son héros et son ennemi dans le vocabulaire qui correspond au ressenti du grand nombre. Quel est donc cet acteur de l’histoire qu’il faut nommer pour l’appeler au mouvement et lui faire prendre conscience de soi ? Pour nous, c’est « le peuple ». Je ne parle pas de ce « peuple de gauche » qu’invoquaient sans cesse autrefois les bonnes consciences social démocrates pour convoquer tout un chacun à l’obligation du « vote utile ». Il faut donc dire de qui il s’agit. Et surtout expliquer comment il peut se constituer en bloc majoritaire. Car le peuple, cette fois ci pas davantage que dans le passé n’est réductible à une catégorie sociologique ni a une somme de couches sociales décrites par de simples statistiques. Il n’existe qu’en devenant un acteur politique. L’acte par lequel il se constitue le définit.
Ce genre de réflexion n’est pas le propre de notre parti. Chacun la mène, chacun à sa manière. En général la méthode consiste à définir la base sociale puis à cerner quelles sont les idées ou les propositions qui peuvent l’unifier dans une dynamique commune. Penchée sur le gouffre de l’abstention cette réflexion depuis plusieurs années prend une tournure assez angoissée. Pour ma part j’y avais travaillé avant de quitter le Parti socialiste dans le cadre de l’association « Pour la république sociale » avec François Delapierre. Lui et moi buttions sur la définition du bloc sociologique majoritaire sur lequel appuyer un vrai projet de gauche. Voici pourquoi. Nous savions bien qu’une pure définition statistique ne voudrait rien dire. Le salariat est la classe hyperdominante de notre société. C’est un fait nouveau dans l’histoire longue, mais c’est un fait. 90 % de la population active est de condition salariale, active ou au chômage. L’unification des lieux de vie et les mécanismes d’interdépendance que cela suppose est également un fait nouveau, et il est de toute façon extraordinairement structurant des mentalités collectives. 85 % de la population française vit en ville ou en milieu urbain. Dans un livre que j’ai écrit au début des années quatre vingt dix, « A la conquête du Chaos », j’avais pointé que ces faits fondaient une base de masse disponible pour le projet socialiste. C’est juste. Et c’est faux.
Car c’est une chose d’appartenir à une catégorie sociale, et une autre de s’y identifier. Le mécanisme par lequel se fait cette identification est tout à fait essentiel. Le mot « mécanisme » désigne ici l’ensemble des conditions concrètes dans lesquelles se construit une conscience politique. Cela inclut au premier chef les mots mis en circulation et surtout ceux choisis pour parler de soi. Certes la situation objective de la population lui enjoint de penser un intérêt général. Et sans doute le peut-elle plus facilement, du fait de sa situation matérielle, qu’à l’époque où les prolétaires formaient un archipel dans l’océan de la paysannerie et des boutiquiers. Mais ce n’est pas cela qui se passe. Une catégorie sociale peut exister sans conscience de soi. Elle ne s’institue sur la scène qu’à partir de ses mots et projets communs.
Dans l’antiquité romaine, le peuple c’était la plèbe. Celle qui s’opposa dans la Rome antique aux patriciens. Elle se constitua en force politique en se retirant sur le mont Aventin à Rome organisant ainsi la première grève populaire de l’histoire. L’expression « se retirer sur son Aventin » vient de là. Puis, se fut la « sans culotterie » urbaine et les petits paysans de la grande révolution rassemblés par la lutte contre les féodaux d’ancien régime autour du projet d’instituer la liberté. A la suite, le peuple, dans le discours de gauche c’était les prolétaires et souvent aussi, suivant les auteurs, les petits paysans et les petites gens de la ville. Puis dans les années qui ont entouré les « trente glorieuses », le peuple, dans les discours et les programme électoraux ce sont les ouvriers et les classes moyennes urbaines. Le programme commun se proposait d’unifier ces populations différentes. Elles avaient au moins en commun d’être fortement structurées autour de statuts sociaux et culturels clairement définis. Le programme commun unifiait en proposant une ligne d’horizon politique mêlant conquêtes sociales et conquêtes faisant symbole comme l’abolition de la peine de mort. C’est ce projet commun qui unifiait. Ce n’était pas seulement la collection des changements qui faisait le sens du programme commun mais le destin commun promis. Le peuple dans ce cas, c’était l’ensemble des gens censé avoir un intérêt à faire appliquer ce programme et assumer ce destin. Je résume, bien sur. Mon propos est juste de montrer comment on se représentait la notion de "peuple" à ce moment là.
Mais une autre idée travaillait le système des représentations sociales. J’ai déjà évoqué le moment ou contre l’idée d’une hégémonie sociale des prolétaires dans le peuple se formulaient l’idée que la société se « moyennisait ». La « moyennisation » de la société, c’était l’idée qu’émergeait un grand bloc social central dans la société. C’était l’objet de toutes les discussions et théorisations. Giscard d’Estaing d’un côté, les socialistes de l’autre, vont se disputer et capter cette représentation culturelle et symbolique de l’évolution dans la vision que la société avait d’elle-même. C’est au nom de la « moyennisation » promise que les deux vont prendre le pas sur les partis qui incarnaient l’ancienne représentation des classes sociales. Le PS « moyennisé » prend l’avantage progressivement sur le PCF identifié à la classe ouvrière stricto sensu. Et l’UDF de Giscard supplante le RPR, identifié aux anciennes catégories intermédiaires : paysans, boutiquiers et agents de maitrise.
La « moyennisation » a été une construction très largement idéologique. Mais elle correspondait aussi au ressenti d’un mieux social dans la chaine des générations. Tout un appareil symbolique et une mise en scène culturelle l’a accompagné. Elle reposait néanmoins sur une base objective. L’extension du salariat à toutes les professions, l’urbanisation massive de la population et l’élévation des qualifications requises par la production étaient bien des réalités. Pour faire simple. Revenant en souvenir à cette époque, je me souviens des gens que le PS attirait alors en masse dans la nouvelle classe cultivée des villes. Ceux là créaient des associations, avaient un avis sur tout et venaient en masse aux réunions des comités de quartiers alors fort à la mode. Quoiqu’il en soit le thème de la moyennisation permit à ceux qui s’en sont saisi d’en vendre une déclinaison politique. Puisque la société était menée par son groupe central, il lui fallait ou un parti de même nature ou une coalition qui lui ressemble. Déjà il fut beaucoup question de se passer de l’alliance avec les communistes et de chercher à s’allier avec le centre. C'est-à-dire de se passer de la satisfaction des revendications ouvrières pour construire le projet de la nouvelle société qui se dessinait à partir de l’hégémonie du « bloc central moyen ».
Bien sur, la situation et le discours empruntaient, comme toujours, à la période antérieure ses symboles, ses drapeaux, ses catégories mentales et ainsi de suite. Et elle en habillait de mots la situation nouvelle. Je me souviens du rôle que jouait des mots d’ordre comme celui de « l’autogestion ». Tout le monde comprenait cela comme un partage du pouvoir entre producteurs au détriment de la monarchie patronale. D’autant que celle-ci était à l’époque encore lourdement marquée par le paternalisme. Dans cette ambiance les exigences libertaires de mai 68 entraient parfaitement en résonance avec la protestation sociale. Le mot d’ordre d’autogestion était cependant investi de façon bien différente suivant la place de chacun dans l’entreprise. Celui d’en bas l’entendait à l’ancienne, comme une libération collective. Celui d’en haut l’entendait comme un partage du pouvoir de la décision technique avec le patron, sur la base de la compétence professionnelle. J’évoque ce modeste épisode pour montrer comment un mot d’ordre peut être transversal au point d’être fédérateur politiquement en dépit de l’hétérogénéité du bloc social dans lequel il fait écho. Ici, l’ambigüité de toute cette imagerie c’est qu’elle se vivait aussi comme de la cogestion dans la bonne tradition social démocrate. Et qu'elle n’était pas du tout inclusive pour la classe ouvrière en tant que telle, effacée du tableau des futurs désirables, alors même que celle-ci restait la classe la plus nombreuse. Cet exemple permet d’illustrer l’idée que le glissement des gros bataillons de votes de gauche du PC vers le PS et sa dynamique conquérante sur les nouveaux arrivants de la société se lit comme l’extension d’une représentation culturelle se substituant à une autre. Comme la population des campagnes s’était autrefois rêvée urbaine et ouvrière, la population ouvrière urbaine se rêva classe moyenne de centre ville puis urbaine. Là encore je résume au prix d’une certaine caricature mais je veux souligner le rôle des représentations collectives comme sous bassement de l’action politique et moyen par lequel ceux qui entrent en action se définissent socialement eux-mêmes.
Dans la période récente, au cours des vingt dernières années, tous les penseurs du PS, ne riez pas il y en avait pas mal, se sont concentrés sur la dispersion sociale résultant de la « modernisation » et de « l’essor des nouvelles technologies ». Ils théorisèrent une « individualisation » volontaire et désirée des rapports sociaux. La moyennisation s’est alors doublée d’un adjectif qui en dégageait le sens : « l’individualisation ». L’hégémonie du message publicitaire, producteur de norme comportementale, semblait accompagner un mouvement qu’en réalité il produisait. Période héroïque du vocabulaire égotique : le « sur mesure » et « l’individu » devinrent la norme de toute chose en tout domaine. Derrière les faits qui montraient en effet une atomisation croissante des rapports sociaux de production, les théoriciens socialistes ne voulaient voir que la satisfaction d’une irrésistible pulsion individualiste. Pour eux elle rejoignait à point nommée, l’évolution des rapports de production du futur faits de « télé travail » et de production du « soft » tandis que le « hard » irait se faire produire chez les sous développés. Dans l’ordre politique, le contrat devint l’idéal de la relation sociale plein de la vertu du gré à gré. La loi devenait la contrainte archaïque par son égalitarisme et sa tendance à tout niveler.
Ils n’ont pas vu venir la précarité comme mode transversal de réorganisation des rapports sociaux et humains dans le nouvel âge du capitalisme. Ils ont cru qu’elle ne les concernait pas. Ils ont cru que c’était le nom de l’entre-deux provisoire d’une société enfin libérée de la monotonie du « bol de fer ». A présent, les enquêtes d’opinion montrent une jeunesse qui aspire d’abord à travailler dans la fonction publique. Ceux là demandent de la durée, de la stabilité et du sens. Le contraire de la génération de gogos que forment leurs parents dépités.
Bref, tant que le haut du panier passait d’un poste à l’autre sans période de chômage durable, tout le discours de la moyennisation individualiste resta en place. Le chômage de masse fut largement interprété comme une conséquence douloureuse chez les gens d’en bas de l’inadaptation de leurs formations professionnelles aux évolutions et Bla Bla. Puis les penseurs ont bien dû observer « la coupure entre classe moyenne et classe populaire ». Ce fut le refrain des années 90 et 2000. Evidemment les classes populaires ainsi désignées furent accablées de toutes les tares. Le référendum de 2005 fut un sommet de stigmatisation. Ceux qui avaient des illusions sur le futur radieux du système regardèrent de très, très, haut ceux qui n’en avaient plus aucune, compte tenu de leur quotidien. Si l’on veut avoir une idée du mépris qui accabla le peuple il faut lire les discours du conseil national des socialistes qui suivi la déroute des oui-ouistes. Ou n’importe lequel des éditoriaux de la presse des belles personnes. La racine de la coupure ne fut pas davantage comprise que par le passé. Pour les grands esprits, il s’agissait d’une crise de l’adaptation de la société à l’accélération de l’histoire. Rien de moins, mais rien de plus.
Dans cette vision il n’y a pas de lutte de classes. C’est une vieillerie idéologique sans aucune réalité spontanée. Et l’hyper accumulation de la richesse, comme tous les excès du capitalisme, est un dérèglement. Il se résout dans la « régulation », « la concertation », « le dialogue ». Bien sur, « le contrat » est le maitre mot de cette régulation par les bonnes intentions. Comme s’il s’agissait d’un malentendu que la raison suffirait à faire reculer. Les journaux supprimaient la rubrique sociale au profit de la rubrique « économie » ou « argent » et tout ce qui faisait lutte s’engloutissait dans la rubrique des « problèmes de société ». Cette « régulation concertée » est proposé comme issue aux problèmes de notre temps et comme idéal social. Dans cette vision, le précariat est une maladie regrettable lamentable qui affecte les jeunes et les « famille monoparentales ». Pour ceux-là, la réalité de masse du précariat, sa production et les conséquences de son extension à tous les compartiments de la société n’en font pas un sujet de l’histoire mais un objet de commentaires. Dans le meilleur des cas…
Le précariat n’est pas la marge du système social actuel. Il en est le cœur. Le moteur de la dynamique sociale du présent ce n’est plus l’espoir d’une montée de tous vers la classe moyenne mais la peur de chacun de se voir absorber par le précariat. Le précariat n'est pas un sadisme spécial des possédants : c’est un mode d’exploitation correspondant à la période des taux de profit à deux chiffres. Faire de la politique à gauche comme si on parlait à une armée de travailleurs sous statuts qui pensent à l’amélioration de leur fin de mois et à une cohorte de cadres supérieurs s’éclatant au boulot est une vue de l’esprit sans contact avec le réel. Surtout cela fait passer à côté d’un fait essentiel : du fait de la prise de conscience de l’extension du précariat peu ou prou dans la vie de chacun, l’une et l'autre de ces deux catégories ont en commun une même détestation des injonctions de leur temps qui fonctionnaient hier comme le moteur de la promotion attendue : fais plus vite, davantage, et prouve ta débrouillardise !
Le précariat est un mot de sociologue construit avec les mots précarité et prolétariat. Il nomme la catégorie sociale des gens qui subissent la précarité comme un destin social durable et non comme un « entre deux » provisoire. La précarité est un rapport social global. Elle ne concerne pas que le type de contrat de travail mais tous les aspects de la vie qui pour finir en dépendent : logement, accès au ressources essentielles comme l’eau et l’énergie, et ainsi de suite. Le précariat s’étend dans la société mais également dans la vie de ceux qui le subissent en précarisant petit à petit tous les aspects de leur vie personnelle et même intime… Ce n’est vraiment pas un hasard si madame Parisot a pu dire : « l’amour est provisoire, le travail peut bien l’être aussi». Le précariat est une catégorie transversale. Il relie et parfois dissout en son sein toutes les catégories du salariat. Il implique aussi bien les ouvriers que les cadres supérieurs. Il fédère par les caractéristiques de mode de vie qu’il confère. La précarité n’est certainement pas un fait nouveau. Elle mine la société depuis des comptes d’années. Ce qui importe dorénavant c’est d’accepter de penser comme un fait politique ce qu’elle produit dans le rapport de force entre l’ordre établi et la volonté de le renverser. Non seulement du point de vue des obstacles que la peur du lendemain soulève mais en point d’appui pour entrainer ceux qu’elle dévore dans le projet de la révolution citoyenne.
On peut mettre des chiffres de population en face de cette réalité sociale. Huit millions de personne vivant en dessous du seuil de pauvreté y figurent à coup sur. Et parmi elles quatre millions de travailleurs. Soient 13,4 % de la population active du pays. Il est important cependant de ne pas confondre précarité et grande pauvreté même si la précarité l’inclut. 23 % des emplois sont précaires, toutes catégories confondues de contrats : CDD, intérim, contrats aidés etc. Il y a ainsi 2,1 millions de salariés en CDD. Un nombre en hausse d’un tiers entre 2002 et 2008. Il y a 550 000 intérimaires : encore une hausse d’un tiers entre 2002 et 2008. La moitié des salariés de moins de 25 ans ont un emploi précaire. Et, à chaque fois, il faudrait préciser qu’il s’agit d’une écrasante majorité de femmes. On peut l’observer clairement dans la fonction publique. Il faut dire que c’est une ramée de précaires qui croupit là dans l’insécurité sociale. Il y a 842 000 non titulaires dans la fonction publique sur 5,3 millions de personnels publics. Cela signifie qu’il y a 16 % de précaires dans l’ancien royaume du bol de fer ! Dans l’Education nationale il y a 47 000 non titulaires. Dans ce nombre, il faut distinguer 70 % de femmes. Et comme si ce n’était pas assez on y trouve 44 % de temps partiel, d'où des salaires très faibles. Ici commence un autre océan de précarité. Celui qui résulte du temps partiel imposé. Il y a 1,4 millions de salariés à temps partiel contraint. Dont évidemment 80 % de femmes ! En hausse de 27 % depuis 2003. Dès lors 40 % des salariés à temps partiel vivent sous le seuil de pauvreté ! La pauvreté atteint 20 % des jeunes de moins de 25 ans, c'est-à-dire près d'un million de personnes ! Précaires, pauvres, jeunes et femmes, quatre mots qui se font écho dans la réalité quotidienne et qui la structurent en profondeur.
La seule stabilité sociale des précaires est leur situation instable autrefois qualifiée d’atypique et qui est la règle à présent. Il faut de huit à onze ans à un jeune pour acquérir un contrat a durée indéterminée (CDI) ! Le précariat est une réalité qui déborde évidemment très largement les cadres de la seule masse des personnes directement concernées. Elle implique aussi les familles, les descendants cela va de soi car les enfants sont en première ligne pour subir les conséquences des carences que le précariat implique. Mais aussi les ascendants, bien obligés de s’impliquer. Elle touche aussi ceux qui en ont peur comme d’un futur immédiat redouté. Elle affecte aussi bien l’ouvrier très qualifié que le smicard. Mais aussi le cadre supérieur au chômage, contraint de devenir un « auto entrepreneur » parfois même par l’entreprise qui l’a licencié ou par celle qui emploie son travail.
La précarité est le mode dominant sous lequel se fait l’accès aux biens et services élémentaires. Elle contamine tous les compartiments de la vie quotidienne. Ainsi du logement. Il y a dorénavant 10 millions de mal logés dans notre pays. Parmi eux 100 000 personnes sans domiciles fixes. Cent quarante mille personnes vivent en camping ou en habitat de fortune. Cinquante mille personnes vivent à l'hôtel. Et la menace frappe largement. Il y a deux cent vingt mille personnes en instance d'expulsion suite à une décision de justice. Ces expulsions vont croissantes en nombre, de près du tiers depuis 2002. A quoi s’ajoutent plus d’un million trois cent mille demandes de logement social, en attente interminable et en hausse d’un quart depuis 2002 ! Je pourrai allonger la liste des catégories de précarisation. Santé, accès à l’énergie énergie, tout est touché. Il y a 8,5 millions de personnes en situation de précarité énergétique. 1,5 millions de logements sans chauffage. L’augmentation du chiffre des coupures d'énergies exprime une nouvelle extension du champ de la précarité. Trente fois supérieure en deux ans ! Pour le Gaz on est passé de 10 000 coupures il y a deux ans à 300 000 en 2010. Pour l’électricité il s’agit de 200 000 coupures par an selon la CGT. 37% des gens coupés seraient des travailleurs pauvres, 15% des familles avec enfant. Et l’eau ! L’eau aussi ! Eau : 130 000 coupures par an. Voyons la santé. Il y a cinq millions d'habitants sans complémentaire santé. Par conséquent 15 % des Français disent avoir déjà renoncé à se faire soigner. J’arrête là une énumération que je prolongerai au fil de mes interventions des prochains mois.
L’émergence du précariat fait davantage qu'obliger à redéfinir le « peuple ». En réalité elle exige le retour de ce concept pour décrire l’acteur historique de notre projet politique. Celui-ci ne peut plus être décrit ni sollicité sous la forme d’une alliance de catégories sociales homogènes comme l’était l’ancienne « alliance des couches moyennes et des couches populaires » dans les rengaines social-démocrate, ou le « front de classes » des années soixante dix au PS. Pour autant on ne peut faire de l’explosion de ces anciennes catégories le prétexte d’une relégation dans l’anomie de toute cette partie de la population que l’on inviterait à se penser comme un intervalle provisoire qu’elle n’est pas. Nommer le peuple c’est déjà faire exister politiquement tous ceux qui le composent dans une catégorie qui les intègre en tant qu’acteur politique positif direct.
Le peuple ne concerne donc pas seulement ceux que l’on nommait jusque là « les inclus ». Il ne « tend pas la main » aux exclus dans le cadre du «care». Le peuple est la catégorie politique qui se constitue dans la lutte contre la précarisation de toute la société. Le mot désigne donc tous ceux qui ont intérêt à la victoire de cette lutte, les travailleurs sous statuts, les cadres à temps pleins comme les intermittents. Il y a un ennemi du peuple qui doit être abattu politiquement : l’oligarchie. L’oligarchie est l’ensemble de ceux qui profitent du système et font de sa défense une fin en soi. Il s’agit des possédants du CAC 40 et de leur « suite dorée », les médiacrates, trader, yuppies, publicitaires, eurocrates et ainsi de suite dont la caractéristique est le parasitisme et l’inutilité sociale. L’oligarchie règne par la peur du lendemain qu’elle injecte dans le peuple en répandant l’impuissance à maitriser sa vie. Le peuple se constitue dans et par l’opposition aux oligarques. Résister c’est déjà vaincre l’idée que le précariat est une fatalité ou que chacun est personnellement responsable de sa détresse. C’est la politique qui fait le peuple. Comme l’Aventin institua la plèbe ou la prise de la bastille la sans culotterie, la grève la classe ouvrière. Désigner l’ennemi avec des mots qui réorganisent le champ politique dénoue et renoue les sentiments d’appartenance ou d’indifférence politique antérieurs, voila le but de notre propagande et des polémiques à déclencher pour faire réfléchir.
La notion de précarité peut être étendue dans tous les domaines pour être bien combattue. J’ai évoqué de nombreux aspects de la vie quotidienne que la précarité contamine. Mais il faut voir toute la dimension de cette contamination. La précarité n’atteint pas seulement les conditions de la vie du travail mais le contenu de la vie et du travail. Dans la production, quand elle atteint par exemple la constitution des équipes de travail, sans cesse changeante. Quand elle mine les projets industriels, sans cesse remis en cause, reformulés, repris et abandonnés du fait de la précarité des décisions de l’actionnaire, des changements de propriétaires. Je ne cite là que quelques exemples, bien sur. Dans la vie mentale, quand sont enjointes des modes aussi harcelantes que celle de l’éternelle jeunesse précarisant toute idée du bonheur durable. Ou bien celle de l’ouverture et de la transparence qui interdisent toute maturation et construction intime. Toutes ces injonctions sont des arborescences, inavouées comme telles, des principes auto-organisateurs du capitalisme de notre temps : flexibilité, accessibilité permanente, instantanéité.
J’ai assez retenu mon lecteur. Je n’entre donc pas dans une description plus longue à propos du lien fondamental entre lutte contre la précarité et accomplissement humain. Je rappelle seulement que la lutte contre la précarité commence la société humaine elle-même. La lutte contre la précarité de la cueillette fait inventer l’agriculture, la lutte contre la précarité de la chasse fait découvrir l’élevage. Et ainsi de suite jusque dans l’ordre intime. Jusqu'à la lutte contre la précarité des règles de vie et de la condition humaine qui fait inventer les dieux et leurs commandements. Sans oublier la précarité insupportable que répandirent les crises et les destructions à répétition du premier âge du capitalisme industriel. D’où naquirent les doctrines socialistes qui, en proposant des clefs de compréhension, permettaient de nommer, de comprendre et donc d’affronter.
Merci pour les points sur les i.
J'ai 39 ans et j'appartiens, par filiation au moins et au bas mot, à la classe moyenne.
Le dégoût qu'a soulevé en moi, dès l'adolescence, l'orientation politique effective de cette même classe m'a convaincu de tenté d'y échapper en arrêtant les études au bac.
Aussi ais-je épuisé la quasi totalité des dispositifs, tous précaires, inventés ces vingt dernières années pour favoriser, était-il dit: "l'insertion" des jeunes dans la vie active". J'ai compris longtemps après qu'il fallait en définitive comprendre : "la domination des jeunes par la vie professionnelle".
J'ai ainsi pu, à loisir, étudier in vivo et in petto, les Contrat Emploi Solidarité, Revenu Minimum d'Insertion, Contrat Emploi Jeune, jusqu'à la luxueuse et confortable Allocation Adultes Handicapé.
Peut être que tous ces dispositifs n'ont été que les condiments permettant de faire passer le goût amer, puisque cannibale, d'une escroquerie intellectuelle appelée société (pas de vivre ensemble possible sans droit à l'alimentation, eau, logement, énergie effectifs), dévorant à mesure qu'ils apparaissent ses propres enfants, pour paraphraser Antonin Artaud.
Je tient à rappeler relativement à la précarité particulièrement aîgüe de la jeunesse, que comme une double peine, cet état, qui lui seul est durable, tient à distance de toute condition citoyenne respectueuse.
A croire qu'il ne suffit pas pour avoir droit au chapitre d'être en possession d'une carte d'électeur.
L'exercice de la citoyenneté représentative est, à minima, sous condition d'un plafond de verre, l'employabilité durable.
L'oraison funèbre de leur travail est le seul horizon funeste de leur souffrance.
Si nonobstant l'amour des générations futures, règnent la joie et la bonne humeur, bien entendu.
Merci Jean-Luc pour cette intelligente et utile redéfinition du "bloc historique" qui doit porter notre projet politique. Je suis intermittent du spectacle en Belgique, et notre précarité, hier exceptionnelle, devient aujourd'hui le lot commun de tous les travailleurs. Je suis toujours "soufflé" par votre sens de l'histoire et de la pédagogie et je partage de ce pas votre analyse sur "Facebook". Comme d'habitude, votre roborative prose revoie à leur néant médiatique les prétentieuses perruches qui péroraient sur "votre absence de projet politique" — elles qui n'ont jamais fait que lire leur prompteur. Salut et fraternité de Bruxelles.
Merci encore pour ce long développement éclairant. Et merci pour votre forte détermination. Qu'ils s'en aillent tous, vive la révolution citoyenne... Oui mais pour cela il faut dépasser un jour et pas dans un siècle les 50%. Et cher JL Mélenchon je reviens sur votre positionnement contre la" corporation des journalistes nantis". J'ai regardé votre dernière intervention chez R Elkief, regardez là vous si vous ne l'avez pas fait, et franchement ne croyez vous pas que dans votre emportement, apparemment non maîtrisé, contre la caste, à toujours et toujours revenir sur les mêmes querelles qui je le pense n'intéressent pas la majorité de notre peuple, vous vous éloignez des préoccupations fondamentales, vous vous gaspillez et vous ne pouvez pas, vous n'avez pas le temps de développez vos thèmes refondateurs. Un homme d'état, n'est ce pas Mr Sarkozy!, doit rester ou donner l'image d'un homme qui sait se maîtriser; quel que soit votre tempérament, prenez en son contrôle sans annihiler votre personnalité originale et riche dans la classe politique. Pas facile mais je crois que c'est une des conditions fondamentales du succès, de votre succès, du succès du peuple. Puissiez vous réussir...
« La vie, la santé, l'amour sont précaires, pourquoi le travail échapperait-il à cette loi ? »
Encore un bon billet de Jean-Luc Mélenchon qui donne à réfléchir. Non, la gauche, ce n'est pas le PS. Oui, le coeur de la gauche, c'est le Front de Gauche. Il faut faire front contre ce précariat imposé par l'oligarchie et qui se veut être une "loi". Une loi, ça se défait.
Vite, la révolution citoyenne !
Bonjour M. Mélenchon,
Annie Collowald a publié un texte sur le populisme (concernant le FN). Vous avez à cette adresse un extrait de son livre paru aux éditions du croquant, voir ici.
Merci à vous et bon courage.
Billet à mettre en parallèle avec celui de Marianne2:
"En ce sens, Nicolas Sarkozy est une sorte de vendeur de chez Darty. Il peut vendre tout et n’importe quoi, aux prolos comme aux bourgeois. Martine Aubry, elle, peine à accéder aux classes populaires, même si elle continuera, sans doute, à l’image de ce que fait Jean-Luc Mélenchon, à convoquer les éléments de discours de la mythologie de la classe ouvrière.
Voilà pourquoi, si Nicolas Sarkozy arrive à refaire le coup de 2007, campagne durant laquelle le clivage gauche/droite, parfaitement mis en scène avec Ségoléne Royale, a fortement contribué à une participation élevée, sa réélection est tout a fait envisageable."
http://www.marianne2.fr/Guilluy-la-gauche-peut-elle-reinventer-un-discours-a-destination-des-classes-populaires_a200095.html
Toi qui aimes ton art, peu à peu tu le perds :
L'excellence n'est pas atteinte à coups de crosse.
Tu ne sais même plus quel bien commun tu sers.
Le précariat c'est la malbosse.
Si on vous laissait faire, ouvriers si pervers,
Vous feriez du travail bien fait un sacerdoce !
Malheureux ce n'est pas leur intérêt : trop chers !
Le précariat c'est la malbosse.
Ce qu'ils veulent, c'est vendre, et jusqu'à votre chair,
Silence, marchandise ! On réforme, on désosse,
Et tant qu'on la vendra, vous ferez de la mer...
Le précariat c'est la malbosse.
Excellente analyse une fois de plus qu'on peut illustrer avec les enseignants du primaire. J'ai été instit puis directeur d'école des années 70 à 2009 et j'ai vu l'évolution des mentalités. Dans les années 70, issus de l'école normale (creuset d'un esprit républicain et citoyen), nous étions en majorité de milieu populaire (fils d'ouvrier, d'employés, d'agriculteurs ou de mineurs) et les manifestations ou les grèves faisaient le plein et les cortèges du SNI étaient parmi les plus actifs. Et puis, on a inventé l'IUFM et les professeurs des écoles pour amener les instits au niveau de salaire des profs certifiés. On a vu un changement s'opérer dans la composition sociale (parce que des fils d'ouvriers, il y en a peu à l'université et il fallait faire une licence en fac avant d'intégrer l'IUFM. Et maintenant, ce sera pire avec la masterisation) et les enseignants du primaire sont entrés dans la classe moyenne (Et on retrouve les caractéristiques de l'analyse de Jean-Luc Mélenchon). Les mobilisations pour les grèves ou les manifs ont fortement baissé. (A la dernière manif de Lille, le cortège UNSA très mince ne comprenait que quelques instits et faisait pâle figure entre un cortège CFDT dense et bruyant et un cortège SUD/Solidaires très dense et très battant).
Et finalement, ces nouveaux "professeurs des écoles" sont en train d'entrer dans le précariat avec des salaires très bas, des pertes de pouvoir d'achat continues depuis 20 ans et des conditions de travail dégradées...
- ne pas oublier les sans-papiers,
- tous précarisent tous : l'amplification du mal par ceux-là même qui y succombent ensuite (cadres pilotant un PSE puis virés) est fascinant et terrifiant,
- la compassion comme "recyclage des déchets humains du capitalisme" saute aux yeux ; les entreprises, hôpitaux, administrations deviennent des vehicules inhumains montés sur coussins compassionnels.
- effet de ce délire : l'incapacité de beaucoup de ne pas pouvoir faire correctement leur travail : et ça, ça détruit bien son homme ou sa femme. Le travail mal fait, précaire, absent a le bras long
- cette note est très juste, tous s'y reconnaitront : a diffuser largement ! Précarisés de la terre, unissez vous !
Merci
Lucide et éclairant. Le problème est que, plus la précarité approche la misère, plus nous perdons les notions de réalités sociales pour ne vous rapprocher que de l'immédiat accessible. En s'excluant consciemment ou inconsciemment de tout repère collectif nous mutilons notre libre choix, notre visions de la société se réduit de plus en plus à la survie. Ainsi surgissent la fatalité, les "tous pourris", l'indifférence à l'autre. Se développe, comme soulignez dans d'autres blogs, la charité se substituant progressivement à la solidarité. Pour autant, la propagation de ce type d'exploitation (forme moderne d'avant contrat de travail collectif), créait agrégation de toutes les couches de la société, et en cela devient propice à un bouillonnement révolutionnaire, ou tout au moins de forts moments de tensions sociales et donc de luttes. Dans cette situation, il s'agit de mobiliser aussi ceux qui se sont exclus du débat, qui n'ont plus la force, qui ne désirent plus parce désabusés, éviter que nous tombions en admiration face aux emballages brillants de paquets vides de sens. Le moment devient propice à des changements pourvu ne nous en donnions les moyens. Petite digression au contenu de ce blog, j'espère que vous ne m'en voudrais pas. A propos de la défense nationale, si je suis d'accord sur le contenu de ton intervention, faut-il pour autant exclure que notre armée participe à des actions "casques bleus" dans le cadre de l'ONU comme maintien de la Paix ?
Un billet qui met un certain temps avant de trancher dans le vif du sujet.
Merci Jean Luc, ce que tout dépeint correspond tout a fait a l'idéal républicain qui m'a fait non pas adhérer au PGF ou au NPA mais au PG.
Je me rend compte a quel point je suis chanceux, petit fils d'ouvriers prolétaires, fils de travailleurs sociaux. J'ai hérité du goût pour les études et d'une impérissable détestation pour l'injustice sociale. Je croit savoir que la lutte contre l'Injustice est au cœur du Socialisme, le précariat est bien le moteur, le bras armé des exploiteurs, des profiteurs de notre temps.
Pourtant j'ai 25 ans, j'ai eu un CDI en 6 mois et de ce fait on regarde mon engagement avec au mieux de la curiosité. Est ce que pour autant cela voudrait dire accepter implicitement cette machine à terreur?
Sûrement pas, je vais plutôt devenir délégué du personnel et défendre mes collègues contre mon employeur (membre de la gauche du "care") qui semble ignorer que les 35h ont été votées par le parti auquel il adhère.
Merci pour ce billet plus que de donner du sens, il me donne du courage.
"Mais ici la droite est la gauche" ==> joli lapsus :)
Chez Maupassant, dans Boule de suif, on trouve le mot qui condense le sens péjoratif que l'on colle -à tort - à "populisme"
C'est le mot "populacier"
Jean Ferrat dans "Ma môme" est qualifié de "populiste" par un critique. Mot non péjoratif, le populisme, est d'après le Robert un genre littéraire qui rend au peuple sa juste place.
"Qu’est ce que le populisme ? On ne sait pas. Les définitions varient à l’infini. Cela montre bien que le mot fonctionne seulement dans une mission péjorative. Il doit flétrir ceux qu’il désigne",écrit Jean-Luc Mélenchon
Je crois que ses obligations multiples ne lui ont pas laissé le temps de lire le texte accessible par le lien ci-dessous : http://www.legrandsoir.info/Vive-le-populisme-ma-mere-vive-le-populisme.html
On y voit que des politiciens, des journaleux, s'acharnent à pervertir le mot, des écrivains, nombreux, et non des moindres, en protègent le sens noble.
Puisque je suis parmi vous, je dois vous signaler aussi un court billet que ne pourra que vous réjouir (voire vous faire rire) par lequel un présentateur de JT est exécuté contre le mur de l'humour.
http://www.legrandsoir.info/
Le titre est "Tiens ! Un âne qui recule." dans la rubrique "parlons Net".
Tout à fait d'accord avec JeanL (3) qui nous dit au sujet de la prestation de Jean-Luc Mélenchon face à Ruth Elkrief:
"...........ne croyez vous pas que dans votre emportement, apparemment non maîtrisé, contre la caste, à toujours et toujours revenir sur les mêmes querelles qui je le pense n'intéressent pas la majorité de notre peuple, vous vous éloignez des préoccupations fondamentales, vous vous gaspillez.............."
Le précariat risque en effet de si perdre à vous voir trop vous "gaspiller". C'est parce que je souhaite ardemment vous voir réussir dans votre démarche que j'appuie, avec d'autres, là ou çà fait mal.
http://www.bfmtv.com/video-infos-actualite/detail/jean-luc-melenchon-663905/
Juste à propos du populisme...
le sens qui lui est rattaché par ceux qui le vocifère est bien celui de Poujade.
Et de l'anti-intellectualisme, donc de la non-culture, du nivellement par le bas, du dogme... et qui sous entend qu'on doit croire celui qui sait qu'il ne faut pas savoir (et là le rapprochement est facile avec l'Eglise catholique durant l'obscurantisme... c'était quand même il y a bien longtemps !).
Bon. Ca nous fait une belle jambe. Là où ça devient intéressant c'est le glissement sémantique du terme ces 20 dernières années. Le sens premier du terme est "ce qui se réfère au peuple" ce qui est ma foi, beaucoup moins péjoratif pour quelqu'un qui défend ce peuple.
Bon là encore je cause, je cause... mais ce sont des lieux communs.
Bref ! Pourquoi ce glissement sémantique ? Pourquoi la réduction du sens ? Pourquoi est-il si facile aujourd'hui d'injurier quelqu'un avec ce terme ? (nb je ne suis ni linguiste ni littéraire ni rien du tout ! pas même encore adulte, et immature au possible)
Ma position : ceux qui font la "grande" politique depuis 20-30ans (c'est dire ceux qu'on voit, qu'on entend, et en ce sens j'inclue les média), ceux-là parce qu'ils incarnent l'élite ont fait le populisme : ils ont peu à peu dégoûté le peuple de la politique, donc de la représentation de l'élite, détourné le peuple de la langue en lui infligeant des discours obscurs, et par là tenté de kidnapper l'intelligence.
Annihilons rapidement le parallèle entre élite et argent. Annihilons le populisme des "mages" de gauche et de droite.
Alors NON, ceux qui aboient "populiste !" n'ont pas le monopole de l'intelligence, et je dis OUI à l'émancipation culturelle et intellectuelle. En ce tout dernier aspect Mélenchon est populiste.
Je me trompe peut-être, mais derrière cette battaille autour de certains mots, il y a sans doute la volonté de gagner gramscienne de gagner une hégémonie populaire sur le plan des idées. Notamment en constituant le peuple(dans les luttes), comme le précise Mélenchon.
l'exemple récent du mouvement social d'automne sur les retraites montre que l'on peut gagner la batailles des idées sur les retraites dans les classes populaires, mais perdre celle des luttes.
En effet, le mouvement social n'a pas stoppé le projet de la classe au pouvoir de "révolutionner" les rapports sociaux puisque la casse des acquis sociaux (retraites, santé, statuts, conditions de travail..) continue de plus belle.
Or, chez Gramsci, la bataille pour l'hégémonie est à la fois culturelle et politique: sans luttes sociales victorieuses, il n'est pas possible de gagner durablement des batailles idéologiques, même partielles. Nous risquons de nous en apercevoir bientôt si la gauche libérale, version DSK ou Aubry arrive au pouvoir en 2012.
Le suivisme acritique vis à vis des stratégies syndicales du couple CGT CFDT préconisé par le Front de gauche peut donc même constituer un obstacle supplémentaire vers cette hégémonie durable sur nos idées.
Excellente analyse, avec me semble t'il un manque...s'il y a une bonne part de résignation et de peur, comme mode de "gouvernace" (je déteste ce mot !), il ne faut pas négliger l'énorme travail idéologique qui a été fait autour de la soumission... J'avais en son temps, ailleurs, ecrit :
on est bien au coeur du problème : la victoire de l'idéologie néo-libérale, en quelques dizaines d'années a disqualifié controverse, confrontation d'idées, conflictualité, distance critique, mais aussi apprentissage, solidarité, entraide, tout ce qui faisait de l'être social un individu confronté, adossé, appuyé, à/par d'autres individus, au sein d'une société humaine, pour aboutir à la production d'un homme post-moderne autiste et égotiste ayant intégré le christianisme de Paul de Tarse (tel que le définit Michel Onfray) " A savoir l'éloge de la jouissance d'être soumis, obéissant, passif, esclave des puissants, esclave... L'impuissance sexuelle transfigurée en puissance sur le monde, le mépris de soi transformé en amour pour ses bourreaux, l'hystérie sublimée en construction d'une névrose sociale... "....
Le précariat n'est possible que par l'adhésion des individus à "l'impérieuse loi naturelle de l'ordre du monde" Prédateurs et proies, le Prédateur étant Sujet et la proie objet, regardez la production d'idéologie dans les "documentaires" animaliers anglo-saxons à destination de la jeunesse... l'antilope finit par admettre son sort, et se lmaisser becqueter par la lionne, puisque c'est "la loi de la nature"...
il y a plusieurs problèmes à bien lister.
1/ l'Europe n'a plus le profil qu'on lui voulais au départ (protection de notre continent, niveau de vie meilleur) c'est même l'inverse qui se produit. le Fmi peut bien présenter les choses comme il veut, il est indirectement responsable de se gâchis.l'Europe des banques qu'on sauvent alors que des gens meurent dans des hall d'immeubles de misère à 40ans..franchement on marche sur la tête.l'europe débite en petit bois nos Nations et finalement défend mieux les intérêts chinois que les notres.nos politiques ne sont plus que l'ombre d'eux mêmes et le multi-étalages des compétences au PS est pitoyable.c'est pas de candidats qu'on à besoin ! c'est de personne comme Jean-Luc Mélenchon qui mettent un coup de latte dans ce grand "foutoir" européen. chaque électeur est maintenant responsable de se qui ce produira si on corrige pas la trajectoire.
DSK en homme providentiel, fabriqué à coup de dossier de com et de petits porteurs de valises.mais que fait il au FMI pour changer ce monde là qui produit l'absurde avant de finir par produire le pire.
2/ le bi -partisme est une analyse que Jean-Luc Mélenchon pourra pousser, car en effet le PS et l'UMP veulent se partager le gâteau en ignorant le peuple (un mot agréable à redécouvrir). l'extrême gauche serait comme l'extrême droite des solutions à éviter et formant le même noyau.
Mais le Front de Gauche, que le PS essai de carricaturer n'est pas extrême.c'est une volonté de faire autrement et en modifiant ce qui entraine la pauvreté de nos peuples.
pauvreté de travail, de logement, de lien social, etc)
en gros, c'est il n'y aurait qu'une vision PS ou UMP. mais au final ne fusionne tel pas tout simplement pour former le groupe des "tous pour les banques" !moi je refuse de soutenir un PS que je considère très mal parti pour défendre mes intérêts. le PS à fini par devenir une soupe d'égo, d'aliénation des idées pour devenir une succursale de l'UMP, jusqu'a lui fournir ses cadres...
Ce ne sont pas dans ces tours phalliques, stérilisantes métalliques, vitrées, hermétiques que l'être humain respire, se réalise en harmonie avec le monde, mais plutôt dans des constructions à son échelle, avec des matériaux naturels, bois, argile, paille, constructions auxquelles il peut participer, devenir acteur. Entre "les villes durables", les paroles de Edem Kodjo (livre: "Lettre ouverte à l'Afrique..."), le mot peuple remis à l'honneur, tout se tient.
Le liant sont les convictions, les parties sont les individus (le peuple, à conscientiser, à désinhiber, à informer), les élus, les structures matérielles....
Le PG, une goélette...
P S : Les paroles, ce matin sur France culture de M Edem Kodjo, ah si le Chef de ce qui fut autrefois la Gaule pouvait s'exprimer ainsi! rêverie matinale
Bonjour, au sujet du logement social, je voudrais connaître la position de M Mélenchon à l'égard de la Loi Boutin, et spécialement au sujet de l'application des surloyers. Cordialement.
@ 14 Maxime Vivas
L'article sur le populisme que vous indiquez n'a peut-être pas encore été lu par Mélenchon, mais il a été lu par des gens qui fréquentent ses billets, j'ai vu le lien au moins deux fois dans les commentaires des articles précédents. Puisque vous êtes là aussi, je conseille à tous les lecteurs de ce blog de lire vos livres (d'ailleurs, Mélenchon citait et recommandait "La face cachée de RFS"). LeGrandSoir.info est vraiment un site de très (très très très) grande qualité, je ne peux que rajouter ma voix à la vôtre.
@ toutes et à tous: sur Le Bigaro, un nouvel article de Sophie de Ravinel, dont les derniers trois articles portent sur le Front de Gauche et surtout sur la démolition de ce FdG: André Chassaigne, l'autre visage du Front de gauche .
Article positif sur Chassaigne (encore heureux!), mais c'est pour mieux présenter les faits comme une opposition, comme une guerre, pour montrer que Mélenchon c'est le diable. Si l'article avait comme point de départ des idées honnêtes, j'aurais applaudis presque.
Le travail de propagande du Bigaro continue.
NB: pour rappel (jusqu'à ce que ça rentre dans les esprits: ne jamais poster des liens directs vers les sites nuisibles, cela aide leur montée dans les moteurs de recherche; indiquez-y le litre et le journal, tout lecteur saura faire lui-même une recherche sur le net, pour quelques secondes supplémentaires (sélection du titre ---> clique droit ---> rechercher sur le web, certains navigateurs internet le permettent).
Le précariat ne concerne pas que le salariat. Pour certains patrons de PME, certaines professions libérales, les auto-entrepreneurs, le précariat est la règle. Parce que si quelque chose ne va pas, il n'y a pas le « filet social ». Le précariat touche aussi tous ceux qui se laissent prendre dans le climat anxiogène actuel, et qui sont la proie d'un chantage à l'emploi.
Ce serait plus simple de définir le précariat par ceux qui n'en sont pas :-)
Chapeau bas,je découvre tes talents de sociologue,quelle analyse,tu m'étonnes chaque jour,le darwinisme social est décortiqué et le tissu social s'effrange,le capitalisme tire sur le fil et nous sommes tous dans un un statut de précariat patent ou potentiel
Je suis particulièrement touchée intellectuellement et affectivement par votre analyse de la société.
Je fis parti des enthousiastes de l'autogestion au PSU (10 ans)
Je fais parti de la précarisation … en fait depuis toujours parce que femme…
J'ai décidé, toute honte rabattue, de raconter sur mon blog des parties de ce vécu…
Intellectuellement : parce que j'ai aussi besoin de me situer en termes de classes sociales dans la théorie de la lutte des classes dont je suis convaincue depuis les années 60, mais que j'avais du mal à en identifier les contours depuis pas mal d'années. Différente parce que femme je le sais depuis toujours. Mais au delà ?
De plus je comprends mieux votre raisonnement personnel de la naissance du Parti de Gauche, c'est essentiel, et maintenant de sa position politique - par analyse - par rapport aux autres partis en jeu.
J'ai donc en plus du vécu besoin d'une structure de raisonnement "intellectualisé" pour ma structure mentale et de vie.
Je pense de plus que nous sommes en situation pré-révolutionnaire… mais qui peut ne jamais aboutir
Cette analyse me semble plutôt juste. Il est vrai qu'aujourd'hui, la population ouvrière, les travailleurs d'usines autrefois majoritaires, deviennent de moins en moins nombreux dans notre société. Il est vrai également que la précarité gagne du terrain, les chiffres que tu donnes ici sont édifiants. Le peuple a effectivement changé. Nous nous adressons aujourd'hui, bien plus aux smicards et aux précaires qu'aux ouvriers exploités d'autrefois.
Cependant une de tes phrases me fait bondir: "C’est la politique qui fait le peuple. Comme l’Aventin institua la plèbe ou la prise de la Bastille la sans culotterie, la grève la classe ouvrière."
S'il est vrai que le peuple a changé, cela n'implique pas pour autant que sa prise de conscience de son exploitation devient différente. C'est la politique qui fait le peuple, ça veut dire quoi ça? Ca veut dire que le peuple ne prendra conscience de son aliénation qu'en écoutant les discours des politiciens professionnels à la télé?
Et la grève la classe ouvrière, ça veut dire quoi? Ca veut dire qu'aujourd'hui les grèves ne servent plus à rien et que la prise de conscience dans les luttes et quasi nulle? Le peuple ne se mêlera de politique qu'en luttant, qu'en faisant grève et en affrontant le pouvoir qui l'oppresse et pas autrement. Sans avoir lutter, le peuple restera insensible à nos discours. Il n'y a qu'à voir le nombre d'adhésion à nos partis et aux syndicats suite à la grève contre les retraites mais aussi l'empressement de nos partis à faire des conférences nationales et des ateliers pour attirer le peuple.
@guillot
Bien sur que les luttes sociales sont importantes, d'une part pour la défense des acquis sociaux, d'autre part par l'élévation du niveau de conscience.
Mais il me semble que le plus important c'est que notre vision politique s'appuie, non seulement sur les luttes sociales, mais aussi sur notre écoute permanente de tout ce qui monte du plus profond de notre peuple.
La constatation que nous pouvons faire est que les partis politiques de gauche se sont coupés, pendant un temps des préoccupations basiques du peuple.
Il est temps d'inverser la tendance, la constitution de comités locaux du Front de Gauche incluant toutes les forces anticapitalistes, s'adressant et donnant la parole à la population, non seulement dans les entreprises mais aussi dans les villages et les quartiers, serait une avancée considérable dans un monde où l'avenir n'est, pour le moment, qu'une affaire de belles personnes qui "savent".
Cela nous permettrait de donner corps à un projet politique dans lequel chacun pourrait se reconnaitre et notamment les millions de gens figés dans la précarité d'une manière ou d'une autre.
Ne restons pas dans le train train politique, dans la routine des partis, osons tous ensemble, des maintenant afin que nous n'ayons pas le regret d'avoir à choisir entre la peste UMP et le choléra PS, maladies du libéralisme.
En avant le Front de Gauche..... élargi
Je crois que c'est Raffarin (sans s'en rendre compte) qui avait le mieux expliqué cette horreur, ce décalage à venir en parlant de la France d'en bas.
Cela voulait dire tout simplement qu'il n'y avait plus de milieu. Pour être clair, on a fait descendre de l'échelle sociale tout ceux qui se croyaient au milieu, bien au chaud.
C'est ce que le PS ne comprend toujours pas. Pour eux et la droite, nous, les gens d'en bas, le peuple, (ouvriers, insttituteurs, techniciens, employés, cadres non supérieurs ou dirigeants) ne sommes qu'une statistique, une variable et non pas des êtres qui souffrent au quotidien.
La CFDT, en ce sens, représentait les gens qui "réfléchissaient" et étaient prêts à négocier sur tout. Et on a vu les scissions avec Sud, etc.
Les gens de la "classe moyenne" ne voulaient plus être associés aux ouvriers ou aux communismes, parce que cela ne faisait pas "bien".
Il faudra en tenir compte au niveau du vocabulaire pour attirer des gens qui voteront pour le front de gauche.
Se battre contre le précariat me semble une idée fédératrice.
Bonjour,
Suite aux messages de JeanL(3) et Toto(15)
Combien de fois n'ai-je entendu la semaine passée, au cours d'émissions radio ou TV, faire référence, comparaison, citations (rarement élogieuses) à vous. Vous êtes entendu voire écouté. Cela fait peur à l'oligarchie et la médiacratie. Et ce n'est que le début !
Alors SVP lorsque vous avez la possibilité de vous exprimer, laissez tomber les querelles anciennes - je comprends qu'elles sont humainement blessantes- Vous avez l'indéniable capacité à faire des démonstrations claires, probantes et compréhensibles par tous. C'est cela qui est attendu....même si c'est difficile car les "interrogateurs" coupent sans arrêt la parole, l'oeil rivé sur la montre, posant une nouvelle question sans attendre par respect pour l'invité mais aussi pour les audirteurs, le développement de la question précédente. (anecdote : vous avez eu la chance lors de votre passage sur BFM ! le lendemain l'invitée MF Garrault a été honteusement stoppée, évincée pour reportage urgent sur une prise d'otage, je ne sais quoi exactement, à Orléans. J'ai été outrée de ce traitement d'une personne qui mérite comme chacun d'entre nous le peuple LE RESPECT !
Merci pour cette dernière note et gardez courage.
Je viens d'adhérer au PG et souhaite participer ardemment à la diffusion des idées et propositions
Excellentes analyses, Camarade,
C'est dans la fonction-même de l'appartenance à la reconnaissance de ce que chaque personne (par son travail) est, et mise en cause par cette casse de l'humain qu'est la précarité et mise en place comme mode unique de gestion de l'impérialisme des managements actuels,privés et publics, décidés par les possesseurs privés des moyens de production et d'échanges chapeautés par les spéculateurs de l'Argent/Roi/dollar.
Là, nous renvoyons à lire tous les articles du Préambule de 1946 issu du CNR, pour ne pas revenir en arrière du 8 Mai 1945. Ce Préambule fondateur et structurant est partie intégrante de notre Constitution. Ces Articles sont bafoués,non appliqués !
Il y a un point essentiel qu'il faut préciser - c'est la répétition constante de la souffrance ou le sacrifice à des dieux obscurs n'est pas loin.
Réponse: résistance.
Et ce n'est pas par hasard que ces crapules se servent des religions à réintroduire, coute que coute dans notre République encore laïque, mais en grand danger.
Urgences.
Pour le Front de Gauche
Bonjour,
Question peut-être naïve: qu'est-ce qui distingue fondamentalement le projet politique d'Arnaud Montebourg de celui du Parti de Gauche?...
J'ai vu une partie de l'interview de Montebourg hier par Nicolas Demorand à "C/Politique".
Pour une 6ème République, pour une relance de l'écologie, contre l'économie financière, ayant voté non au référendum sur l'Europe en 2005, A. Montebourg développe un discours très proche de celui de JL Mélenchon.
Seul le style diffère de manière évidente: il est beaucoup plus soft dans son attitude vis à vis de l'interviewer qui, pourtant était particulièrement désagréable avec lui hier...
Alors? Montebourg-PG, un rapprochement possible?...
Qui pourrait m'apporter des compléments d'information?
Par avance merci!
Cassius
Le problème avec les mots rassembleurs, les concepts collectifs, c'est qu'ils viennent toujours d'en haut. Ils ne sont pas inventés par ceux qu'ils sont censés désigner. D'où la difficulté d'en trouver un dans lequel tout le monde se reconnaisse (plus ou moins)
L'autre problème avec ces mêmes concepts rassembleurs, c'est que comme pour le mot populisme, chacun en a une représentation différente. Chacun lui donne un sens différent. Et on ne trouvera pas de réalité de référence.
On en vient donc, dans le meilleur des cas, (voir l'histoire) à faire croire à chacun qu'il donne au mot le même sens que les autres, à faire croire à chacun que tous les autres savent ce que c'est et qu'il peut y adhérer les yeux fermés. C'est même cela une propagande réussie : une sorte de croyance dans l'idée d'une communion. Tout ceci étant toujours illusoire. (Sans compter que cela s'use quand c'est rabâché, voir le mot "travailleurs")
Boutade ? j'ai souvent pensé que le libéralisme était l'avenir. C'est cela que je voudrais. On sait que les libéraux font rimer libéralisme avec liberté (d'entreprendre, de faire des affaires, du trafic etc). Malheureusement, cette liberté-là est économique, est réservée à une minorité et suppose que la majorité en soit exclue.
Libéralisme pour tous, dans tous les domaines (à l'intérieur des lois) et encadrement, règlementation de tous ceux qui possèdent du pouvoir. Plus le pouvoir est grand, plus il doit être soumis à des lois.
Bonjour,
Militant du PG, je ne veux pas encombrer ta liste de cet excellent blog tant par ce qu'il produit que par les réactions des lecteurs. Je pense que le paragraphe "Ce n'est pas seulement du fait d'une prostitution" mériterait d'être mieux développé et resitué (pour une inversion du mouvement) dans une perspective de reconquête idéologique pour le futur.
Salut et fraternité
Patrick
Que veut dire "populiste" en effet ?
Dans sa définition "moderne" péjorative, je ne vois qu'une définition qui corresponde à la fois à Chavez et à Le Pen dans l'imaginaire médiacratique : le "populiste" ça serait celui qui tirerait profit de la colère du peuple envers une élite locale et/ou internationale pour s'attirer ses faveurs et accéder au pouvoir. En clair ça serait un manipulateur se prétendant de côté du peuple tout en ne servant que ses propres intérêts. Une définition qui se rapproche de la démagogie, le côté "à bas l'élite corrompue" en plus.
Quoi qu'il en soit, c'est un billet très précieux que vous publiez là. Si la droite a pu faire son nid, c'est en grande partie en pervertissant le sens des mots et en usant à foison de contradictions : plan social pour désigner un licenciement massif, développement durable, rupture tranquille, flexisécurité, capitalisme moral, ressources humaines... cela va jusqu'à réduire l'écologie à une chasse aux émissions de CO2 !
Il est donc important, comme vous le faites ici, de s'attacher à redonner du sens aux mots pour les rendre à nouveau intelligibles.
@JLM
Ravi de voir Jean-Luc Mélenchon s'intéresser au rôle politique des classes moyennes. Mais malheureusement, c'est pour reprendre le discours classique qui prétend légitimer le rôle de ces couches en les transformant en victimes du système au même titre que les couches populaires. Polariser le débat entre "eux" ("l'oligarchie") et "nous" (le reste), c'est oublier que parmi "nous" les intérêts peuvent être différents, voir opposés. Et que les intérêts des classes moyennes sont beaucoup plus proches de "eux" que de "nous".
L'idée du précariat est intéressante, mais elle est bien moins évidente que Jean-Luc Mélenchon semble le penser. D'abord, il est pour le moins aventureux de mettre les classes moyennes et les couches populaires a égalité lorsqu'il s'agit de précarité: Les enfants des enseignants ont infiniment plus de chance de faire des "bonnes" études (vous savez, celles qui conduisent à un emploi stable) que les enfants d'ouvrier. Ensuite, il n'est pas évident que la précarité soit le phénomène structurant de notre société. Si tel était le cas, les individus seraient prêts à tout sacrifier pour y échapper. Or, ce n'est pas le cas. Un bon contre-exemple est le choix des études: alors que des domaines ou les employeurs ont du mal à trouver du personnel même en offrant des CDI (métiers techniques notamment bâtiment, électricité, nucléaire, chimie, médical et para-médical) sont délaissés, les carrières où il est notoirement difficile de trouver des emplois permanents (métiers artistiques, sociologie, psychologie...) sont toujours plébiscités par les étudiants. Si la "peur de la précarité" était aussi intense, comment expliquer ces choix ?
Enfin, il y aurait bien d'autres choses à dire, mais l'espace manque ici. Si j'ai le temps, j'essayerai de commettre une analyse plus fouillée sur mon blog.
Bonjour,
@ Cassius(32)
Même interrogation sur Arnaud Montebourg ; Un début de réponse de Jean-Luc Mélenchon lors de son entretien sur BFM TV
Voir la vidéo / lien sur le commentaire Toto (en 15) ci dessus. Il serait intéressant de creuser plus A suivre
les bizarreries du PS.
en effet, j'apprends que Fabius soutient massivement DSK pour le concours de beauté auquel nous assistons tous, jour après jour.
mais si ma mémoire me revient, il semble que Fabius était contre DSK dans une précédente primaire PS. alors faut il en conclure que Fabius cherche une place au soleil pour oublier qu'il proposait un projet différent de DSK à l'époque. maintenant les choses me paraissent de plus en plus claire.
Fabius, DSK, Aubry, dans une certaine mesure Royal ont une vision très personnel du PS tel que nous le connaissons.un PS où les militants compteront que pour la galerie, où le contenu sera de gauche sur le papier, où les militants seront trompés au final.
alors, je pense qu'il est de notre devoir d'appeler sur nos couleurs du Front de Gauche, les militants, sympathisants PS avant que Fabius ne les entraine sur DSK en les faisant faussement rêvé !
réveillez vous les amis du PS.car votre socialisme est en train d'être digéré par quelques personnes qui jouent votre avenir, celui de vos enfants sur un tapis de carte à l'effigie du FMI.
DSK n'étant pas à gauche, je voterai pas pour lui.
inscrivez vous massivement sur les listes électorales avant la fin de l'année pour avoir du poids au Front de gauche dès 2011.
maintenant l'alternative est clair ! soit la gauche molle avec un programme UMP, soit une gauche UNI, réalise, organiser autour des intérêts des français.
@cassius
Je ne me permettrais pas de douter, à priori de la bonne foi d'A.Montebourg. Mais tout de même, il dit lui même que ses idées ont toujours été minoritaires au PS. Il est clair que la ligne politique du PS est plutôt celle d'un accompagnement du Capitalisme Financier et une non remise en cause de l'Europe libérale.
Alors !
Jean-Luc Mélenchon, après avoir avaler des couleuvres, de nombreuses années, au sein du PS, a eu le courage de partir, alors qu'il aurait pu faire une carrière tranquille.
Le fait de mettre ses actes en accord avec sa pensée est une clarification nécessaire.
A.Montebourg serait-il un opportuniste pour lister un certain nombre d'idées en contradiction avec la ligne de son parti, permettant de semer le trouble dans l'électorat populaire. Parallèlement, il est très modéré vis à vis des libéraux de son parti. Se réserve-t-il une porte de sortie ?
Si vraiment il porte sincèrement les idées qu'il expose, l'honnêteté intellectuelle lui commanderait de quitter ces jeux du cirques que sont le PS, vraiment primaires.
Le monde politique français actuel n'est plus composé de ces grands destins qui ont fait progresser l'humanité. ce sont tous des clowns qui se regardent le nombril chaque matin avant de se raser (Suivez mon regard). Ils ne sont pas guidés par l'intérêt général mais seulement par leur propre intérêt personnel. Au PS c'est une honte et c'est affligeant d'être suiveur comme cela. Personne ne sort du lot !
L'homme politique réel a une vision du monde à plusieurs dizaines d'années en avant pour ses semblables et il est généralement minoritaire au début car il faut toujours un début ! Nous pouvons arriver à passer devant le PS facilement si nous arrivons à convaincre autour de nous ! C'est ce que je fais tous les jours à mon humble niveau de citoyen en débattant avec mes amis, mes relations de travail etc...
Ce qu'il nous manque c'est du matériel politique (Vidéos, illustrations etc...) pour expliquer au gens ce qu'est réellement l'europe, la dette, etc... car je remarque autour de moi que même des gens cultivés ne connaissent pas réellement le monde dans lequel ils vivent et se contentent de répéter ce qu'il voit à la télé ou dans les journaux !
Jean-Luc Mélenchon ne fait que reprendre l’éternel débat de « la classe en soi et de la classe pour soi » et de la place du lumpen prolétariat (sous-prolétariat) qui ne s’identifie pas spontanément aux organisations du mouvement ouvrier, participant peu aux élections et fournissant malgré tout un contingent de voix pour la droite nationaliste.
Ce sentiment d’appartenance varie historiquement en fonction des mobilisations sociales, de la capacité à les mener sur des objectifs communs et s’en trouve renforcer en cas de victoire.
La force du nombre en est à la fois le moyen et l’expression visible et donc crédible.
On ne peut prendre conscience de sa force que si on l’exerce, que si l’on se donne tous les moyens de l’exercer.
En ce sens la force de la mobilisation sur les retraites a réactualisé le sentiment d’appartenance. La « non-victoire », peut entrainer du coup un sentiment de démoralisation « tout çà, pour rien ? », « On y arrivera jamais ! », « De toutes les façons le PS ne ferait pas mieux ! »
Ceci doit nous amener d’abord à nous poser la question « Avons-nous tout fait pour gagner ? » S’en tenir à suivre les consignes des directions syndicales était-il la seule stratégie possible ? Quels enseignements en tirer ?
Renforcer le sentiment d’appartenance, passe bien sûr par les luttes, mais également par un programme clivant avec le PS auquel l’on puisse s’identifier ou non, évitant ainsi l’illusion de cette bouillie interclassistes, ce « cul entre 2 chaises » qui laisse croire que l’on peut manger de plus grosses miettes plus la table des nantis serait opulente.
Nous pouvons à loisir, chercher une « juste » définition du peuple. Les capitalistes, eux, savent utiliser au mieux cette expression, comme une entité nationalement homogène sans distinctions de classes ou de conditions sociales et qui aurait des intérêts communs face aux autres peuples.
Cette analyse de la précarité comme le coeur même du système me parait fondamentale car c'est bien là, à partir de cette situation que l'on peut comprendre que les peurs font obstacle à l'esprit de révolte.
Pourquoi n'inventerions nous pas des coopératives de travailleurs précaires pour remplacer les suceurs de sang que sont les boites d'intérim, les boites de portages ?
Absolument d'accord avec Rachid n°40
C'est pour cela que le projet "Télé de Gauche" n'est pas un artifice, mais pourra être le vecteur servant à montrer les réalités sur notre projet Front de gauche"
vous mettez un doigt sur le problème majeur de cette démarche de pédagogie nécessaire, alors que certains journalistes endorment les gens avec "de toute manière il n'y a pas d'autres solutions"
ouf !
Entre émotion et soulagement de voir des mots sur une expérience tellement partagée et qui fait si mal. Plaisir aussi de voir la capacité à connecter des savoirs sociologiques avec une réflexion politique. Sur le précariat, le sociologue Castel a dit des choses importantes : http://www.dailymotion.com/video/xbf48x_la-societe-du-precariat-robert-cast_news
Il y a urgence à réfléchir aux conséquences de la destruction du travail et de son avilissement sur les travailleurs (toutes professions confondues). Retrouver une pensée sur le travail comme moyen d'émancipation, de connaissance et d'utilité sociale quand le travail n'est pas simple soumission, exploitation ou production de biens jetables.
Cette définition :
"Le peuple est la catégorie politique qui se constitue dans la lutte contre la précarisation de toute la société. Le mot désigne donc tous ceux qui ont intérêt à la victoire de cette lutte, les travailleurs sous statuts, les cadres à temps pleins comme les intermittents."
me paraît plus dynamique que la perspective structurale que transportait la notion de classe sociale, surtout plus adaptée à la situation.
Et mille fois d'accord avec ce propos :
"Résister c’est déjà vaincre l’idée que le précariat est une fatalité ou que chacun est personnellement responsable de sa détresse."
Cela indique l'orientation à prendre pour le projet commun.
J'aime beaucoup le petit poème plus haut sur la malbosse et la citation d'Edem Kodjo.
Il me semble que l'une des déqualification du mot "peuple" et du refus d'identification des classes moyennes est venu de cette "malbosse" qui a transformé l'ouvrier qualifié en exécutant, qui a nié l'a dépossédé de sa culture et de ses savoirs-faire et qui aujourd'hui rattrappe la classe dite moyenne. En plus de la précarité et des bas salaires, ce que l'on entend le plus souvent dans le marasme actuel, c'est "je ne peux plus bien faire mon boulot". C'était le leitmotiv des techniciens de France télécom transformés en commerciaux, cela devient aussi celui du personnel médical, social, enseignant, soumis à une "obligation de résultats" qui nie totalement la possibilité d'une création dans un travail dont l'évaluation soumises aux critères du marché ne passe plus que par le résultat chiffré. Lire à ce propos le excellentes analyses de l'Appel des appels.
@Belatar (#44)
Cette définition : "Le peuple est la catégorie politique qui se constitue dans la lutte contre la précarisation de toute la société. Le mot désigne donc tous ceux qui ont intérêt à la victoire de cette lutte, (...)" me paraît plus dynamique que la perspective structurale que transportait la notion de classe sociale,
C'est surtout une définition qui permet d'inclure ou d'exclure à la convenance de celui qui l'annonce. Comment savoir qui a "intérêt à la victoire dans la lutte contre la précarisation de toute la société" ? Car il ne s'agit pas d'un "intérêt" à triompher de la précarité dans son domaine particulier d'activité, dans sa famille, dans sa région, mais "dans toute la société"...
Le problème pour les classes moyennes, c'est que la "bible" marxienne a donné le rôle de peuple élu au prolétariat, en oubliant malencontreusement de faire des classes moyennes le moteur de l'histoire. Pour réparer cette erreur, cela fait quarante ans que la "gauche radicale", dominée par les classes moyennes, essaye de construire un concept qui puisse remplacer les "classes" (et surtout le prolétariat) en donnant un rôle historique aux couches moyennes. D'où les théories sur "la prolétarisation des cadres" ou du "peuple classe". Le "précariat" n'est, je le crains, que le dernier avatar de ce genre de théories. En fin de comptes, il s'agir de pouvoir diviser la société en "bons" et "méchants", en faisant gaffe de se trouver toujours du côté des "bons", de manière à avoir une légitimité pour se mettre à leur tête...
Va falloir vous résigner, camarades. Les classes moyennes ne sont pas et ne seront jamais les "alliées naturelles" des couches populaires. Plutôt le contraire... pour les couches moyennes, les couches populaires sont d'éventuels concurrents. C'est la raison pour laquelle les couches moyennes ont toujours cherché à casser l'ascenseur social... tout en prétendant le contraire.
"Le populisme, le peuple, le précariat" sont des termes qui reprennent toute leur place dans nos esprits grâce à cette analyse historique et approfondie faite par jean-Luc Mélenchon. Il nous permet de prendre conscience de notre situation et de l'évolution du monde du travail, homme, femme, jeune, agé, ouvrier, employé, cadre, indépendant, agriculteur ou retraité. Il nous donne l'envie de faire bouger les choses, de nous regrouper autour d'un projet, de militer au sein du parti de gauche, de proposer des solutions à tous nos problèmes, de sortir du "chacun pour soi" imposé inconsciemment à nos esprits par le capitalisme et ses moyens modernes d'abrutissement, de faire naître en nous l'envie de nous occuper de politique, de faire la révolution citoyenne à tous les niveaux de la société.
Une analyse du même gabarit sur le mot "démocratie", employé à toutes les sauces, dans des contextes bien différents avec l'intention d'effrayer, de mentir, de raisonner, d'emprisonner des opinions me semblerait aussi très judicieux pour notre éducation politique.
@ 36
Andrea91 dit:
29 novembre 2010 à 15h00
Bonjour,
@ Cassius(32)
Même interrogation sur Arnaud Montebourg
A mon avis, vu qu'il reste au PS, c'est qu'il doit être chargé de parquer ceux qui pourraient avoir envie de franchir le rubicon pour nous rejoindre.
les classes moyennes
@ Descartes 46
29 novembre 2010 à 16h29
vous écrivez:
"Va falloir vous résigner, camarades. Les classes moyennes ne sont pas et ne seront jamais les "alliées naturelles" des couches populaires"
faute de définition des "classes moyennes", on peut tout dire...
L'idéologie dominante (venue des USA) définit les classes moyennes par le niveau de revenu du ménage, et cela peut aller, en fonction des fourchettes retenues, de 40% à 60% des ménages.
Il ne semble pas que ce soit votre définition, mais il faudrait la préciser. Autrefois on considérait la "classe ouvrière" et ses alliés; la bourgeoisie (celle qui possédait les moyens de production) et ses alliés (dont faisait partie "l'aristocratie ouvrière"). Étant entendu qu'il y avait bataille politique autour des "alliés" pour se les attacher. La composition de la société française, sa situation, ses perspectives ont beaucoup évolué depuis Marx. Il faut donc redéfinir plus précisément de quoi on parle.
@Descartes 46
Au sens de la doctrine marxiste, le prolétariat désigne la classe sociale des travailleurs qui ne possèdent pour vivre que leur force de travail. Pour survivre les prolétaires doivent louer leur force de travail à ceux qui détiennent les moyens de production (le Capital). Le prolétariat est donc en grande partie composé des salariés et des chômeurs (au sens de Marx on doit pouvoir y ajouter les paysans pauvres et les petits artisans).
La classe moyenne est un bloc hétérogène, mais en grande partie elle est composée de salariés qui "louent" leur force de travail, travail qui est majoritairement "intellectuel", à mon sens cette partie de la classe moyenne rentre dans la définition marxienne du prolétariat. C'est vrai que ces dernières années les classes moyennes se sont montrées cupides et aveuglées par les sirènes du libéralisme (elles ont été moyennes en tout), mais fondamentalement elles ont des intérêts convergents avec la classe ouvrière (ne serait-ce que « l’état providence »). Je pense que la crise du capitalisme, qui s'aggrave de jours en jours, ouvre les yeux de cette classe moyenne, elle prend la mesure du risque de déclassement qui la guète. Alors certes, ce n'est pas en constatant l'impasse du libéralisme que les classes moyennes vont rejoindre automatiquement la gauche radicale et abandonner la gauche "bobo caviar - bobo décroissant" ou la droite, mais c'est un défi majeur pour le FdG de fédérer au maximum la classe ouvrière et les classes moyenne qui vivent de leur travail, il n'y a pas d'autres solutions pour bâtir un autre modèle de civilisation.
@argeles39 (#51)
Au sens de la doctrine marxiste, le prolétariat désigne la classe sociale des travailleurs qui ne possèdent pour vivre que leur force de travail (...). La classe moyenne est un bloc hétérogène, mais en grande partie elle est composée de salariés qui "louent" leur force de travail,
Oui... et non. La classe moyenne ne loue pas tout à fait sa force de travail, mais sa compétence. En d'autres termes, plus que "louer sa force de travail", elle vend un service. Alors que l'ouvrier offre une "force de travail" indifférenciée (et donc avec une possibilité minimale de négocier le prix autrement que collectivement) les classes moyennes ont la possibilité, lorsqu'elles sont salariées, de négocier leur salaire individuellement, parce qu'elles offrent un service différencié. Et cela est possible parce qu'elles disposent d'un capital (généralement immatériel: des connaissances, des réseaux...). Et bien entendu, il reste le cas des classes moyennes non-salariées, qui elles détiennent un capital (un commerce, une clientèle...).
Pour résumer (et c'est la définition que j'ai déjà proposé) on peut dire que les classes moyennes sont celles qui ont suffisamment de capital (matériel ou immatériel) pour ne pas fournir de la plusvalue, et pas assez pour pouvoir en extraire.
C'est vrai que ces dernières années les classes moyennes se sont montrées cupides et aveuglées
Heureusement qu'elles peuvent compter sur des gens intelligents comme toi pour leur dire où sont leurs vrais intérêts... ;-)
Soyons sérieux: il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles. Les classes moyennes ont suivi leurs intérêts, et leurs intérêts ne coïncident pas avec ceux du prolétariat, au contraire. Et si elles prennent conscience du risque de déclassement, leur première réaction sera pousser hors du bateau ceux qui pourraient les concurrencer. Pas manifester une solidarité avec eux...