08mai 11

Besancenot, Ben Laden, Voynet, Rafael Correa

Le meilleur et le pire

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J e vais parler de Ben Laden ! Bon sang, quel film! Pendant que j’en suis au cinéma juste un mot sur Dominique Voynet dans le rôle de « tatie Danielle » de l'écologie politique. Et pour revenir à l’écologie, la vraie, des nouvelles sur l’affaire des gaz de schistes. Et pour le dessert une bonne surprise : une nouvelle victoire de la révolution citoyenne en Equateur. Par les urnes. Un beau référendum contre les oligarques locaux, leurs comptes en banques et leurs médias. Un régal.

M ais je commence sur autre chose. Dans l’espace politique de l’autre gauche le renoncement d’Olivier Besancenot à la candidature pour l’élection présidentielle est un évènement majeur. Il est absolument évident qu’il modifie profondément les données de notre existence dans l’élection elle-même et dans le moment politique en général. Mais plus largement,  les conditions de l’élection de 2012 sont modifiées puisque celle-ci semble s’annoncer si volatile. Avant d’analyser quelques aspects de la lettre d’Olivier Besancenot, je voudrais d’abord risquer un commentaire plus personnel.

D’abord, j’ai eu du mal à croire que la nouvelle soit vraie. De façon quasi mécanique, j’ai d’abord surtout retenu du document cette affirmation d’Olivier Besancenot que le NPA devrait avoir en 2012 un candidat issu de ses rangs. C’est assez agaçant. Donc la rencontre de la veille avec la délégation du NPA et le rendez vous pris pour « continuer la discussion » sont à nouveau une manœuvre dilatoire. Tout cela ne sert à rien, une nouvelle fois, puisque la décision serait maintenue d’avoir en toute hypothèse un candidat NPA. Comme aux élections européennes, comme aux régionales, comme aux cantonales ? Des rencontres pour dire qu’on les a faites, sans lendemain, juste le temps de créer un espoir puis de le décevoir. C’est rageant.

Puis j’ai été surtout sensible à la dimension personnelle de ce que je lisais. C’est ici, bien sûr, une personne qui exprime d’abord un raisonnement politique. Mais ce raisonnement ne peut être purement abstrait pour cela même que celui qui le présente est en même temps le sujet de l’affaire en cause. Cela m’a amené jusqu'à la trame personnelle du document. J’ai senti la tension terrible de l’homme qui écrit. Il ne veut pas être le candidat permanent, trente ans durant, comme l’a été en son temps, Arlette Laguiller. Tout ce que je vais écrire à présent ne fera que rajouter à l’hommage qui est dû à l’endurance d’Arlette Laguiller. Besancenot ne veut plus d’un rôle personnel qui est un sacerdoce éreintant et rabougrissant. C’est le moment pour tous ceux qui se croient très malins quand ils invoquent à tout bout de champ les « querelles d’égo » à propos de cette élection de se demander par quel dérèglement de leur propre égo ils peuvent croire qu’être sous les projecteurs est un pur délice où l’égo s’épanouit. Foutaises ! C’est une vie sans lieu de repli, puisque tout le monde vous reconnait partout, en toutes circonstances. Dans cet espace sévit un voyeurisme écarquillé. Votre famille, vos enfants, vos voisins, vos amis d’enfance, tout peut être, à tout moment, déshabillé en public. Une meute sans principe et sans vergogne de malheureux qui vendraient leur mère pour survivre sont prêts à tout pour quelques euros de pige. Protestez-vous ? Aussitôt on vous rappelle que vous êtes un « homme public » et que chacun a « le droit de savoir ». Idiotie tirée du vocabulaire pédant des médiacrates. Non ! Nous ne sommes pas des hommes ou des femmes publics, nous sommes des personnes privées qui avons des activités publiques, ce qui n’est pas du tout pareil. Non il n’y a aucun droit à notre sujet qui excède ce qui vaut pour le commun des mortels. Pourtant, sitôt que nous protestons contre quoi que ce soit qui nous est infligé de cette façon nous sommes accusés d’avoir la « grosse tête » et de revendiquer un statut d’exception.

Le pire, je crois, de tout est l’arrivée sur la scène, comme les moustiques attirés par la lumière, des frustrés qui se réclament de connivences particulières. Ils paradent en révélant des confidences à deux balles qui pourtant vous pourrissent la vie, violent votre intimité, alimentent les fantasmes des fous qui vous écrivent des lettres pas toujours anonymes et des malades qui trainent dans la rue. Un monde où tous les coups, et surtout les plus personnels, sont permis, un monde où il faut subir à intervalles réguliers des humiliations publiques télévisées, des inquisitions sans pudeur, accepter d’être brocardé par des ignorants, méprisé par des voyous, et ainsi de suite. Avec internet sévit aussi à présent la possibilité d’envois calomnieux, qui même quand ils sont visiblement absurdes, ne vous empêchent pas de recevoir un nombre significatif de demandes de mise au point, souvent exigées sur le mode postillonnant des piliers de bistrots ou dans le registre d’une inquiétude qui à elle seule est une offense. Et pour le reste, meetings, réunions et colloques tous les week-ends, et presque tous les soirs. Sans oublier les déjeuners, diners et, depuis peu, les funestes petits déjeuners, dits « de travail ». Pour lui, Olivier Besancenot, s’ajoutent deux ou trois jours de distribution de courrier et une paye au lance pierre. Sans oublier l’obligation de tourner autour de son gosse, quand il l’a avec lui, pour éviter qu’on le lui photographie. Besancenot ne veut plus de ça et je le comprends. Pour ma part, rien dans l’action politique ne m’a jamais rebuté et rares sont les fois où je m’y suis ennuyé. Mais ce viol permanent des frontières de la pudeur et de la réserve est un corrosif qui m’a davantage blessé les trois dernières années que pendant les trente ans précédents de mon engagement politique. Qu’Olivier Besancenot aspire à reprendre une position moins exposée à ce feu et plus protégée, c'est-à-dire militante, voilà qui est le signe d’une humanité sauvegardée en lui. Qu’il soit accablé par avance d’y être condamné pour les trente prochaines années d’une élection à l’autre, je l’approuve avec l’impartialité de quelqu’un pour qui cette durée dans une fonction n’est plus envisageable.

De quel côté se tourneront les électeurs potentiels d’Olivier Besancenot ? Il n’est pas du tout assuré qu’ils se reportent sur la nouvelle candidate du NPA. Ni d’ailleurs sur qui que ce soit d’autre en particulier, à gauche. Olivier Besancenot rassemblait sur son nom, dans les urnes des présidentielles, un électorat bien plus large que celui des personnes adhérant aux idées particulières du NPA. Cet élargissement électoral lui semble d’ailleurs artificiel puisqu’il dit ne plus vouloir du substitut à l’action militante que serait une autorité acquise du seul fait de l’influence médiatique. Il écrit : « Que les idées s’incarnent ponctuellement dans un contexte social et politique déterminé, ou qu’il faille déléguer la tâche militante de la représentation publique, par un mandat précis et limité dans le temps, est une chose. Jouer des ambiguïtés du système politique et médiatique pour se substituer à l’action militante réelle au sein de la lutte de classe, en est une autre ». On comprend l’idée et, pour ma part, je la partage. La scène médiatique a une influence majeure, nous le savons bien, sur la formation des représentations mentales collectives. Mais elle ne fonctionne pas de la même manière pour l’ordre établi et pour ceux qui le contestent. La machine reproduit à longueur de journée, et jusque dans les détails de la publicité ou des mises en mots, l’idéologie dominante. La présence des contestataires permet de percer le mur ponctuellement et provisoirement. Le système récupère cette présence pour se légitimer. Il mouline un spectacle. L’illusion serait de croire autre chose. Un porte parole de gauche écouté ne peut compter sur cet effet pour faire le travail d’éducation populaire sans lequel notre ancrage durable serait rayé de la carte en peu de temps. Il faut donc certes jouer avec cette méta-réalité, l’utiliser. Il faut manipuler l’usage des médias pour inscrire dans le paysage les portraits simples et frustres que l’on nomme « l’image ». Mais sans illusions.

Cela signifie aussi qu’il est vain d’espérer échapper à l’identification d’un combat à une personne. Cela n’a jamais été possible à quelque échelle que ce soit. Dans la moindre lutte une figure émerge toujours qui la représente aux yeux de tous. Non ce n’est pas condamnable ! Tout au contraire. Cela est nécessaire pour donner un visage humain aux idées qui sont défendues. De cette façon elles sont bien plus entrainantes. Il faut être gravement imbibé d’idéologie consumériste pour ne vouloir d’une idée qu’aseptisée et débarrassée de son identité humaine. Mais voici la différence. Personnaliser la lutte, dirais-je, c’est la réduire à la personne qui la représente aux yeux des autres. L’incarner c’est autre chose. Dans ce cas la lutte, la cause et la personne sont comme le drapeau et sa hampe. Mais si l’on incarne trop longtemps et trop exclusivement une cause, alors on la personnalise. Et surtout on l’expose aux aléas des comportements individuels de la personne qui en est l’image. Donc on la réduit. Par conséquent ce que dit Olivier Besancenot après dix ans de porte parolat est parfaitement fondé. Je le dis avec la tranquillité d’esprit, encore une fois, d’un homme pour qui cette durée dans une fonction n’est plus possible. Ne vous inquiétez pas de ces références amusées au temps dont je dispose. Il vous assure seulement du fait qu’avec moi pour vous êtes assurés de ne pas risquer l’inamovibilité.

Il est absurde de chercher à se projeter dans des espaces de temps où toute prévision devient une prophétie interchangeable. Nos taches sont actuelles. « Hic et nunc », comme dirait Michel Denisot, ici et maintenant. Notre partie est décisive. Serons-nous le point d’appui du rejet du système ou bien la famille Le Pen va-t-elle pouvoir faire son office de chien de garde de celui-ci ? La division de l’autre gauche nous a cloués au sol. Mais nous ne sommes pas condamnés à y rester. Le Front de gauche a franchi une à une toutes les étapes de la crédibilité et de l’ancrage. En passant la barre des dix pour cent aux élections cantonales un seuil a été franchi. Mais à tout moment, tout peut revenir au point de départ si on ne s’attache à réussir chaque étape, chaque pas. Inutile alors de faire des pronostics. La situation est si volatile que tous sont vrais en même temps. Il faut s’en tenir aux fondamentaux de l’action politique à gauche : on ne réussit que par l’ancrage dans la conscience populaire avec des messages et des méthodes claires. Un travail de fond. Et pour cela il faut un programme, une stratégie et un parti pour porter le tout. Nous avons tout cela. Nous avons le programme partagé, les partis du Front de Gauche, le rassemblement de la gauche de rupture. D’autres auront tôt fait de constater qu’ils n’en sont pas munis comme ils le croient. Dès lors nous avons surtout des taches. Ca au moins c’est du sérieux, concret et mesurable objectivement. C’est à elles que nous sommes attelés. Le travail avance. Le texte du programme partagé sera prêt d’ici à trois semaines.  Puis il mènera sa vie d’abord dans la discussion avec les nouveaux partenaires du Front de Gauche et tout autant avec les citoyens et, parmi eux, les élus et syndicalistes  à qui il va être donné à examiner et enrichir. Les ateliers législatifs sont l’étape suivante de cet enracinement du programme. L’accord de mise en place des candidatures aux élections législatives est, lui aussi, en très bonne voie. Avec tout cela, se rassemblera qui veut bien faire cet effort. Et persistera dans son isolement qui ne le veut pas. Mais du moins serons-nous là, conformes à nos principes, disponibles pour faire l’histoire de notre peuple. Bref nous serons en ordre de bataille fin juin. A ce moment là, la scène médiatique vibrionnera : les primaires seront en marche chez les Verts et au PS. Une folle bourrasque après laquelle ne survivront que les plus solides. Mais d’une façon ou d’une autre tout le monde sera ramené au réel, à une heure ou à l’autre. La politique absurde de l’union européenne, la frustration du peuple pillé et du pays saccagé, portent la pagaille comme l’uranium la radiation. Ca finit toujours par être mortel.

Les scénaristes du film de l’empire nord américain ont fait mourir le personnage Ben Laden. Le prochain épisode va être superbe sans doute. Je trouvais cette série de bien meilleure qualité que la précédente produite sous ce naze de Clinton quand c’était le chef de guerre somalien « l’ennemi public numéro un » des états unis. Le décor n’était pas du tout convainquant. Le débarquement sur une plage sous les yeux des caméras, puis le départ en camion des débarqués tout cela manquait de nerf et de suspense. Surtout j’ai vite compris que cette superproduction tournerait à vide car l’accès au pétrole de ce côté peut être stabilisé bien plus tranquillement qu’en passant par là. En Afghanistan je savais que la comédie allait bientôt finir. On s’y trouvait pour s’assurer du pipe line de la compagnie Unocal. Les talibans étaient des ingrats. Ils avaient été très bien reçus à Washington et la compagnie unocal les avait reçue elle aussi en grande pompe si l’on peut dire. Ces gueux avaient peu de temps après annoncé s’intéresser à une offre des argentins. Aussitôt on s’aperçut de leur sauvagerie. Les femmes voilées et tout ça. Affreux. Donc on a décrété que Ben Laden était là bas.

J’ai kiffé l’épisode où le bombardement commence dans la nuit, après l’histoire des tours, le jour anniversaire de l’assassinat de Salvador Allende. Surtout la scène où le mollah Omar, chef suprême des talibans, s’enfuit à mobylette du palais présidentiel en abandonnant les chèvres qu’il y élevait avec amour. Ensuite on a vu de super images où on recherche le mollah dans les grottes en bombardant avec des bombes intelligentes qui rentrent dans les souterrains et font exploser les montagnes. Bien sur, il y avait des passages moins bons. Par exemple l’assemblée tribale qui décide que la charria est la loi du pays et l’écrit dans la Constitution. Ce n’est pas raccord avec les motifs de guerre. Et la scène du bombardement d’une noce paysanne n’est pas cool du tout ! Je suis d’accord pour aussi dire qu’avoir fait élire Hamid Karzaï comme président ce n’est pas finaud du fait que c’était justement le représentant d’UNOCAL en Afghanistan. Ca faisait complot. C’était réducteur par rapport au côté chevaleresque de la libération des femmes voilées et tout ça. Bon. Mais comme elles le sont toujours, ca choque moins. Enfin, la dernière élection présidentielle c’était franchement nul. Tout ce temps entre les deux tours ! Ces pinaillages sur le résultat réel !! Ca ralentissait l’action. Heureusement qu’il y avait la communauté internationale pour désigner le vainqueur en obtenant le retrait du second.

Cet épisode final est moins fameux qu’il aurait pu être. Pas une image ! Zut ! Quand c’était Saddam Hussein on l’a vu se faire examiner les dents et on a bien vu qu’il était sale et repoussant ! Donc qu’on avait bien raison de le détester. On a même assisté en direct à sa pendaison ! Pour un pays comme le notre où la peine de mort est abolie on peut dire que c’était un spectacle rare. Heureusement qu’il y avait les médias éthiques et intransigeants sur le devoir de tout montrer, heu ! Je veux dire de ne rien cacher, enfin le truc qui dit qu’ils font bien ce qu’ils veulent et si t’es pas content tu peux aller voir une autre chaine mais pas de bol pour toi, gééérard, l’autre chaine te montre la même chose ! Va donc, petit naze qu’est pas capable de voir un type se faire pendre en direct en mangeant ton hamburger ! Enfin, ouf,  grâce à eux on a pu voir et revoir ! Ce qui faisait un peu tache c’était que ses ennemis, présents sur place, aient insulté sa foi au moment où on lui passait un sac sur la tête avant de placer la corde. Mais qui ça choque à part les sunnites ?

Et là ? Pas une image ! Mince alors ! Il y a du y avoir un problème avec Donald Cardwel pour les costumes. On ne comprend pas. Alors que toute la scène a été suivie en direct par l’équipe du président dans la salle de commandement ! J’ai vu la photo ! On voit Obama tout petit dans un coin entourés de toutes sortes de gars un petit peu grassouillets et madame Clinton. Et aussi une secrétaire qui se tord le cou au fond de la photo pour regarder l’écran, plus vraie que nature ! Et la photo du visage du sanguinaire à moitié défoncée ! C’était génial ! Heureusement que des médias sympathiques et intransigeants sur le devoir d’informer,  nous ont passé ça à l’heure du repas comme une révélation que l’on « voulait nous cacher ». Pas de pot, un logiciel français a tout débidonné ! Ah ! Là ! Là ! Cette série est bâclée ! Et le coup du cadavre à la mer ? Ca fait rat. Un, deux, trois ! Plouf ! Terminé. Plat comme tout ! Surtout que pas un bidasse n’a fait une photo ou juste un petit coup de vidéo volée. Rien. Pffffft ! Nul.

Bon heureusement que c’est la fin. La série suivante sera meilleure. Ces séries s’améliorent. Je reconnais qu’après le mauvais passage sur ces images manquantes le reste a été sublimement joué. A Paris, sur tous les murs, il y a les « une » des groupies : « l’Amérique est de retour » Obama par ci Obama par là, le doigt pointé, la mine grave. Et la séquence devant le point zéro et tout ça ! Waooo ! C’est quand même mieux que le machin ringard avec présentation de la fiole de sang béatifié montrée à la foule qui chante sans rythme des abracadabras ! Ou cet autre truc à la guimauve des princes et princesse qui sentent le décor en papier mâché ! En plus ça fait gerber tous ceux que ca révulse de voir des gens se croire supérieurs du seul fait de leur naissance ! Ce type barbu qui se faisait dialyser dans les grottes c’est autre chose ! Le seul truc loupé c’était qu’il s’appelle Ben Laden, un nom de machine à laver. Il va quand même nous manquer.

Les nord américains n’ont aucune raison de rester en Afghanistan à présent. Non pas, bien sur, pour cette histoire de Ben Laden qui est un conte pour enfants. C’est plus profond. Le but était d’empêcher le pétrole de sortir du côté des chinois. Objectif manqué. Les russes et les chinois se sont entendus directement. Ce pan là du « containment » des chinois est planté. La ligne de front bouge. Le bilan des avantages et inconvénients de la ligne d’action précédente doit être fait. De plus la diabolisation des musulmans n’arrange que le micro front moyen oriental. Tout est remis en cause avec les révolutions arabes. Dans le coin, maintenant la digue ce sont les islamistes, sunnites cela va de soi, qui peuvent la fournir. Les nord américains s’activent. La contre révolution c’est aussi une face de la révolution.

Le huit mai, on célèbre la victoire de 1945 sur les nazis. Dans beaucoup de communes on organise des commémorations qui sont l’occasion de discours officiels. Ces discours ont pour but de faire vivre les idées que peut partager la société toute entière sur le sens de certains évènements. Ce jour là, à Montreuil, madame Voynet est partie en vrille sur de la politique spécialement politicienne. J’ai connu Dominique à l’époque où elle bataillait pour survivre dans le Jura. Puis quand nous nous efforcions de faire vivre l’idée d’une coalition Rouge Rose Vert.  Je l’ai vue beaucoup changer, comme d’autres. C’est son affaire. Ca la regarde. La voici dorénavant maire et sénatrice, une cumularde banale. Adieu les discours enflammés du passé sur le sujet. La voici de plus anti communiste compulsive. Bref, elle est aussi banale qu’un bureaucrate quelconque du Parti socialiste de seine Saint Denis. Ce dernier lui a d’ailleurs assuré le gite et le couvert. Ce n’est jamais gratuit et Dominique y a consenti en connaissance de cause. Mais les  électeurs viennent de lui infliger une cuisante défaite aux cantonales. Ils ont élu un conseiller général du Front de Gauche plutôt que le candidat Voinettiste au deuxième tour de la dernière élection. La pagaille qui règne dans sa gestion et son autoritarisme nous ont beaucoup aidés, il est vrai. Mais quand même….

Ce contexte l’a conforté dans l’idée que nous sommes le danger. Elle n’a pas tort. Face à l’écologie des carriéristes anti communistes, il y a l’écologie idéologique et militante. Et celle-ci couvre un champ plus large que le champ de manœuvre des nouveaux commensaux du Parti Socialiste. Dans cet espace nous figurons à notre place et nous y avons gagné nos galons militants. Martine Billard n’est pas pour rien notre co-présidente, Corinne Morel Darleux n’est pas une secrétaire nationale à l’écologie sans légitimité. Gabriel Amar a créé une régie publique de l’eau qui irrite maints partisans du capitalisme vert. Et ainsi de suite.

Donc, pour fabriquer une digue artificielle, elle et quelques autres comme Cohn Bendit ont décidé de me passer les menottes de la caricature stigmatisante. L’insulte est sans limite. L’un m’accuse de draguer le Front National l’autre m’assimile à la montée des nazis, un huit mai dans un discours officiel… Et bien sur, c’est moi qui suis un exagéré. Bref, les sexagénaires de l’écologie mondaine sont aussi rances et méchants que tous leurs prédécesseurs en bonne conscience.  Voilà donc « la Dominique », comme on lui disait affectueusement dans le jura du temps où elle était une écolo à visage humain, qui dénonce dans son discours de commémoration du 8 mai 1945 « le populisme ». Et pour illustrer par l’exemple, elle me cite. Finaude, elle demande ce qu’il faut penser d’« un ancien ministre qui mobilise ses partisans sur le slogan « qu’ils s’en aillent tous » ».

Les électeurs de gauche lui ont déjà répondu, il y a deux mois. Je m’honore d’avoir été faire campagne au deuxième tour avec les miens, sur place. Mais elle aura encore l’occasion de voir ce qu’il en est aux prochaines municipales. Et avant cela, il y aura les législatives. Il est clair qu’elle ne saurait solliciter l’appui des électeurs d’un ancien ministre qui mobilise ses partisans sur un slogan comme « qu’ils s’en aillent tous » ». Pas vrai ?  Surtout quand elle constatera peut-être bientôt, aux élections présidentielles, que l’accueil pourrait être meilleur pour demander « qu’ils s’en aillent tous » qu’il ne le fut pour son message à elle aux dernières élections présidentielles. Résumons. En se comportant de cette manière sectaire madame Voynet cherche l’incident entre le Front de Gauche et les écologistes de gauche. Elle n’y parviendra pas. Son discours est un naufrage.  La stupidité de ses propos dans le cadre de la célébration de la victoire sur les nazis ne flétrit qu’elle. « Les verts sont capables du pire comme du meilleur » a déclaré un jour Cohn Bendit ». Et il précisait « mais c’est dans le pire qu’ils sont les meilleurs ». Si c’est lui qui le dit…

Puisque je suis sur l’écologie politique, voici des nouvelles de la bataille parlementaire sur les gaz de schiste. Comme vous le savez sans doute la droite et le PS ont fusionné leur proposition de loi sur le sujet. Le texte issue de la commission parlementaire arrive en débat et sera soumis au vote. Le résultat du travail de la commission où s’est faite la fusion des textes est d’une hypocrisie totale, me signale Martine Billard. Faisons un tour d’horizon rapide. L'article un interdit à l'avenir les forages d'exploration et d'exploitation par la technique de la fracturation hydraulique actuellement utilisée. L’article deux demande aux sociétés ayant des permis en cours de prouver qu'elles ne les utilisent pas. L'article trois d'origine a été supprimé sous prétexte qu'une refonte d'ensemble du code minier était nécessaire et qu'il ne fallait donc pas l'aborder par morceaux. Son objectif était pourtant d'obliger les demandes de forages prévus par le code minier à respecter les principes d'information de la population inclus dans le code de l'environnement. Ce n’est donc pas innocent de le supprimer. Cette suppression implique donc qu’il y aura, par conséquent, rejet des amendements demandant un referendum local ou un débat public. Cette frilosité est un prétexte. Car une modification du code minier a été introduite par une ordonnance pas plus tard qu’en janvier dernier. Elle ne prévoit que l'information du public,  par voie électronique, sur trente jours. Les auteurs pensaient en avoir fini avec les critiques contre le "simple affichage" prévu auparavant et tant décrié. Elle ne prévoit cependant aucune obligation de débat public. Cette ordonnance doit être ratifiée bientôt par l'assemblée nationale. Malheureusement aucun amendement ne peut  être introduit pour la modifier lors de la ratification.

Voyons le bilan. Il ne sera plus possible de délivrer de nouveaux permis d'exploration et d'exploitation. Mais reste-t-il encore des zones avec des réserves probables de gaz ou huiles de schiste où des permis n'ont pas été attribués ? Quoiqu’il en soit, les permis existants ne sont pas remis en cause. En effet, il suffira que leurs bénéficiaires déclarent utiliser une autre technique que celle refusée aujourd’hui pour que leur permis soit validé.  En réalité l'exploration peut commencer. Notamment pour les gisements d'huiles de schistes correspondant à des zones d'exploitation de pétrole traditionnel comme en Ile de France. On croit comprendre qu'en Alsace la situation serait identique. En fait les permis vont être déposés pour des hydrocarbures classiques et cela permettra de tout préparer pour l'exploitation après 2012. Devant ce texte Martine Billard a déposé trois amendements. Le troisième propose la tenue de référendums locaux dans les zones où des permis seraient envisagés. Elle n’a pas pu disposer de temps de parole. C’est André Chassaigne qui sera l’orateur de notre gauche. On doit donc s’attendre  à une critique construite et argumentée face aux hypocrisies des signataires de ce texte.

Premier "post scriptum", comme dirait Michel Denisot qui parle le latin souvenons nous en. Il y avait un réferendum en Équateur. Personne ne vous en a parlé? Etrange. Ce samedi 7 mai, plus de 11 millions d'équatoriens étaient appelés à se prononcer sur un référendum, ou « consultation populaire » selon la terminologie équatorienne. Celle-ci était composée de 10 questions qui on été au cœur du débat politique équatorien ces derniers mois. Le peuple équatorien s'est  prononcé pour le « oui ". Il a soutenu chacune des 10 propositions du  gouvernement de Rafael Correa. Dans l'ensemble, le « oui » se situe entre 46% et 53% selon les questions alors que le « non » oscille entre 39% et 44%. Il s'agit là de la huitième victoire consécutive dans les urnes du gouvernement de la « Révolution Citoyenne ».

Parmi les dix questions posées, quatre concernaient une réforme du système judiciaire. C'était un des enjeux centraux de ce référendum. En effet, les dysfonctionnements réels du système judiciaire ont récupéré à des fins de propagande pendant des mois par l'opposition qui accusait le gouvernement équatorien d'être à l'origine de l' « insécurité croissante » du pays. Face à ces attaques, le gouvernement a toujours répondu en dénonçant une main mise de l'ancienne partidocratie sur le système judiciaire. Il était donc urgent d'y mettre fin et de réformer ce système pour qu'il devienne réellement indépendant de la sphère politique.

En répondant « oui » à ces quatre questions, les équatoriens ont décidé  ce qui suit : reconnaître la responsabilité des juges lorsque des délinquants sont libérés, en raison d'un délai trop long de jugement ; réguler des mesures substitutives à la prison préventive, jusqu'à ce jour applicables à tous les délits, et ne concernant désormais plus que les délits les moins graves ;  créer un Conseil de la Magistrature de transition qui aura 18 mois pour mettre en place un nouveau Conseil de la Magistrature.

Deux autres questions concernaient les médias. Du point de vue de leur financement d'abord. Il sera dorénavant interdit qu’une institution du système financier privé puisse être propriétaire de moyens de communication et vice-versa, et les directeurs des moyens de communications ne pourront plus être actionnaires de ce type d'institutions. Ensuite, les citoyens équatoriens ont également soutenu la création d'un Conseil de Régulation. Celui-ci sera chargé de normer la diffusion des contenus qui contiennent de la violence sexuelle ou discriminatoire (équivalent du CSA en France). Ce Conseil de Régulation a aussi pour vocation de déterminer les critères de responsabilité ultérieurs des communicateurs et des moyens de communication.

Au total les équatoriens ont majoritairement soutenu par leur « oui », une loi anti-corruption qui condamne l'enrichissement privé non justifié, l'interdiction des jeux de hasard et casinos, l'interdiction des spectacles entrainant la mort d'animaux, et l'obligation pour les entreprises privées d'affilier les travailleurs en situation de dépendance à l'Institut Équatorien de Sécurité Sociale. Saluons la détermination du gouvernement équatorien qui aurait pu décider de faire passer ces réformes par le biais de sa  majorité parlementaire, mais qui a choisi de remettre au cœur de la « révolution citoyenne » la souveraineté populaire, et ce, quelques mois après la tentative de coup d'État qui a failli coûter la vie à son président, Rafael Correa et à la démocratie.Par cette démarche de consultation populaire, le gouvernement équatorien nous montre  une fois de plus que le modèle néolibéral capitaliste a besoin de la répression et de la confiscation du pouvoir politique aux mains d'une oligarchie pour exister mais qu'il est possible de rompre cette domination si le pouvoir est rendu à son souverain:  le peuple.

Deuxième Post Scriptum, comme dirait Michel Denisot. Un coup de projecteur sur l’action de mes amis à Paris en défense des tunisiens réfugiés expulsé de leur squatt. Sur place, Danielle Simonet, élue de Paris, s'est interposée. Son récit, à vif, décrit ce qui se vit en sarkozie ordinaire. Notre solidarité sans faille rend d’autant plus étrange et insoutenable l’exclusive lancée contre la présence des élus et militants politiques décrétées par ceux qui assurent aujourd’hui l’accompagnement de ces tunisiens. Bonne occasion de constater que l’épouvantail de la récupération est souvent agité pour couvrir une instrumentalisation parfois féroce. Au bout du compte, dans ce cas, le résultat est un risque d’isolement parfaitement contre productif. Les tunisiens aimeraient sans doute que leur problème soit réglé. 


152 commentaires à “Le meilleur et le pire”
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  1. Michel Matain dit :

    @ 149 Gerard Blanchet
    Donc ceux qui s'agitent beaucoup sur le Net doivent être à mon avis ultra minoritaires dans le PCF.

    C'est vrai que les cantonales réussies ont bien renforcé le courant Front de Gauche au sein du PCF, elles ont concrètement fait la démonstration que quand le Front de Gauche se renforce le PCF ne disparait pas pour autant, bien au contraire.

  2. Lucien Jay dit :

    Je viens de passer un bon moment à vous parcourir tous, d'abord Jean-Luc. Et je me félicite du grand nombre d'opinions qui s'y expriment. Si nous voulons vraiment changer la société, il faut un grand élan. A chacun de faire un pas vers l'autre.
    - certains parlent de corrida, pour et contre. Personnellement, je suis contre. Je ne puis imaginer une humanité qui se complaise à faire souffrir les animaux, quels qu'ils soient. J'ai vu quelques reportages sur les élevages industriels et les abattoirs et si j'en avais le courage, je serais devenu végétarien. Sachant aussi qu'un jour, pour nourrir les gens, il faudra bien en passer par là...
    - j'ai beaucoup apprécié la façon dont Jean-Luc montre le cinéma américain fait autour de Ben Laden.
    - et enfin comme adhérent du PG, j'ai reçu la Revue "L'oligarchie - comment elle a pris le pouvoir - comment le lui reprendre". Des textes enrichissants. Merci aux camarades qui y ont participé. A mettre entre toutes les mains.


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