07mar 13
Vous avez toujours pris parti en faveur du processus révolutionnaire au Venezuela, pourquoi ?
Jean-Luc Mélenchon. Il faut replacer la révolution bolivarienne dans son contexte continental et historique. L’effondrement du communisme d’Etat a été présenté à la terre entière comme la fin dans l’histoire de l’intuition communiste et socialiste. Mais la flamme s’est rallumée en Amérique du Sud parce que le nouvel âge du capitalisme en avait fait son cahier de brouillon. Le néolibéralisme y a été expérimenté d’un côté par des dictatures militaires, de l’autre par l’opération Condor et les violences de la CIA. Les politiques qui ont ensuite pris le relais ont été partout les mêmes : concurrence libre et non faussée, monétarisme et dérégulation. Tout le continent a ainsi été conduit au désastre. C’est dans ce contexte que la flamme révolutionnaire s’est rallumée. Le Venezuela bolivarien a occupé une place singulière : non seulement il s’est construit sur des bases démocratiques, mais il a déjoué les plans criminels de l’adversaire par l’action pacifique et populaire.
Est-ce que ce qui se passe là-bas a des conséquences ici ?
Jean-Luc Mélenchon. Evidemment. D’abord, cette expérience nous a permis de régénérer à notre manière le corpus idéologique et pratique de notre courant révolutionnaire. Le mot même de ‘’révolution citoyenne’’ nous vient de là-bas. Surtout, ce n’est qu’une préfiguration de ce qui se passera ici. Quand les mêmes politiques absurdes, cruelles, violentes sont appliquées, le résultat est le même. En Grèce, en Espagne, au Portugal, en Italie : on ne sait pas où, mais la chaine du libéralisme craquera. Peut-être en France, c’est mon souhait.
Est-ce un modèle ?
Jean-Luc Mélenchon. Non, le mot est à proscrire. Mais c’est une source d’inspiration avec de grandes figures : la refondation républicaine de la Nation – non pas à partir d’une définition identitaire à la Sarkozy, mais sur une règle du jeu définie en commun, la Constitution ; la souveraineté nationale sur les secteurs qui permettent d’organiser la vie économique, comme l’énergie ou la finance. Et, la priorité des priorités, la personne humaine. Le but de l’action politique ne réside pas dans les beaux graphiques et toutes ces salades avec lesquelles on abrutit les peuples d’Europe en leur donnant pour objectif d’inonder la terre de marchandises dont on essaie de créer le besoin par la publicité. C’est le modèle inepte du néolibéralisme confronté à la flamme rayonnante de la révolution citoyenne : l’humain d’abord.
Pensez-vous que le processus révolutionnaire va se poursuivre au Venezuela ?
Jean-Luc Mélenchon. La lutte va continuer. Chavez aura aussi réussi à former dans la génération suivante des dirigeants de haut niveau. Nicolas Maduro est un ancien syndicaliste de culture communiste qui a une vue très ample sur les relations internationales. Les Vénézuéliens ont déjà la bonne personne au bon endroit. Ils devront continuer à se politiser en profondeur car les Nord-américains et l’oligarchie vénézuélienne vont se battre.