03déc 13
Dès la fin de la marche l’habituelle machine médiatico-gouvernementale s’est mise en route sous la forme de la traditionnelle bataille de chiffres. L’absurdité du compte officiel et l’étrange situation renouvelée où la préfecture annonce qu’elle ne donne pas de chiffres avant que le ministre en donne quand même n’a pas retenu l’attention des « commentateurs ». Pas davantage que le retour des barrages filtrant de l’ère Sarkozy où les CRS obligent, en fin de manif, les manifestants à jeter leurs drapeaux et à arracher leurs autocollants. Pas de photos, pas de « révélation » dans ce cas, pas de Petit Journal. Juste une bienveillante cécité entre gens du bon monde ! Non, ce fut d’abord une risible polémique à propos de la première photo du cortège qui a circulé. Celle-ci, prise du bas du boulevard de l’hôpital montre à l’évidence la foule immense. Ça ne colle donc pas avec l’échec annoncé deux jours à l’avance par le royaume des petits malins. Il faut donc transformer la réalité pour qu’elle colle au récit journalistique. C’est donc la photo qui est accusée d’être un faux. Des Rouletabille de circonstance repèrent que les feuilles aux arbres sont vertes : « truquage » ! D’autres « révèlent » qu’il y a vraiment beaucoup trop de feux rouges et certains à l’envers de la circulation ! « Trucage ». La twittosphère est chauffée à blanc. Merci la presse de nous tenir informés de façon si vigilante ! Merci les journalistes de nous protéger des manœuvres de cet affreux Mélenchon et de sa bande de rouges.
Patatras ! En quelques quarts d’heure, le coup s’écroule : la photo vient de l’AFP, elle n’est pas truquée évidemment ! Les feuilles sont bien celles des arbres du 1er décembre ! Et les feux sont bien aussi nombreux boulevard de l’Hôpital, et certains à contresens du fait des couloirs de bus. Quant au comptage de « notre confrère » du journal « le Monde », qui souligne le caractère exagéré de notre évaluation mais ne souffle mot à propos de celui de leur ami Valls, il apparait vite qu’il souffre d’un défaut majeur : la journaliste est arrivée trop tard pour suivre la manifestation, ce qu’elle se garde bien de dire. En effet, elle revenait comme ses autres collègues qui suivent le Front de Gauche, du congrès des Verts, ce qui ne permettait pas de faire mieux que d’être à l’arrivée sur la place des discours, où en effet tout le monde est loin d’être entré et où beaucoup se dispersent du fait du froid… Voilà ce que c’est de surcharger les journalistes pour faire des économies de personnel. Car celle-ci, et les autres de même, dans le meilleur des cas, sont rentrés chez eux poser leur bagages, prendre une douche et repartir au travail. Comment je le sais ? C’est tout bête ! C’est eux-mêmes qui l’ont raconté à mes proches en arrivant pour se faire bien voir, genre : « vous voyez quels efforts je fais pour vous ! ». En atteste la photo qu’elle envoie sur Twitter. Trop drôle les accusateurs de photo truquées trahis par leurs photos. Celle-ci est en effet prise sur la place, en fin de manif, ce qu’elle se garde bien de préciser. Tout cela s’étant écroulé, il restait donc le coup de « l’affaire TF1 ».
Là, les complotistes du dimanche ont fabriqués une nouvelle fable. A l’occasion de mon interview à 13 heures, TF1 aurait monté avec moi un reportage bidon pour faire croire à une foule là où il n’y en avait pas. A charge une photo prise depuis sa fenêtre par un « journaliste de France 24 » qui, en toute déontologie, la diffuse sans contextualisation, sans recouper ses sources et sans être venu demander quelque information que ce soit, alors même que nous étions sous son balcon. Un glandeur, un vrai ! Inutile de dire qu’un tel journaliste est une valeur sure de l’information officielle. Il a reçu un prix professionnel : celui de « l’Union Européenne », une référence en matière d’honnêteté intellectuelle. Bref, le journalisme du bon monde : au chaud dans son salon avec vue sur les grands boulevards ! Quelques 25 maigres retweets saluent cette « révélation ». Mais un site d’extrême droite le reprend avec un joli cercle jaune autour du personnage pour mieux souligner l’effet « caméra caché », secret révélé ! Les socialistes repiquent directement l’information ainsi retraitée. Leurs amis dans les rédactions qui n’avaient pas bougé se lèvent en masse. Le vrai journalisme d’investigation : regarder sa liste de tweets et retweeter toutes les vannes caca-boudins qui font du retweet. Vous connaissez la suite. A vingt heures le président socialiste du CSA que rien ne trouble d’habitude se réveille. Il va enquêter ! Le sommet du ridicule ! Ce personnage que le honteux déséquilibre des temps d’antenne ne gêne d’aucune façon décide d’une enquête en moins de trois heures sur la base d’une photo prise d’un balcon et retweetée par un site d’extrême droite. La classe, les solfériniens ! Cher Olivier Schramek, tu ne devrais pas t’aventurer dans le champ de la politique si tu ne veux pas en subir la dure loi des polémiques personnelles qui y règne. Bienvenue au club. Enfin, je dis ça, mais si ça se trouve, l’information d’Europe 1 est aussi une manipulation et aucune enquête n’aura lieu.
Bon. Voyons « l’affaire ». Là encore un coup monté bidon. Premièrement le « journaliste » n’a rien « révélé » du tout. La première photo de la scène a été tweetée par… devinez qui ? Moi ! Oui ! C’est le twittos du PG qui m’accompagnait et qui envoie la photo (avec mon accord cela va de soi). La révélation n’en est pas une. Le choix de la rue n’est pas celui de TF1 mais le mien car je voulais enchaîner le repas et l’interview avant la marche. Je ne mange jamais sur le bord du parcours (sinon je ne mange pas). Nous sommes donc à deux cent mètres de la tête du cortège, dans une rue parallèle. Révélation : j’ai mangé une omelette au jambon. TF1 n’a donc pas du tout reconstruit une scène ! L’interview a lieu une demi-heure avant l’heure officielle de la marche, une heure avant son départ. Ou est mon intérêt de parler devant une rue vide ? Vous croyez que nous ne regardons pas la télé ? Notre méfiance est donc totale à propos des images qui vont être diffusée. Le service d’ordre qui sécurise la rue ou je me trouve repère les militants du bas Rhin qui sont parti à cinq heures du matin et qui viennent d’arriver en haut de la rue. « Jean-Luc va parler là devant à TF1». Ah oui, on vient faire nombre ! Ni plus ni moins que du très banal : les militants se groupent derrière leur porte-parole quand la télé est là. Les supporters de foot en font autant et les militants syndicalistes autant. Je félicite mes camarades. Et je répète le conseil : quand vous voyez la télé, faites groupe et sortez vos drapeaux. Ne les laissez jamais montrer des images défavorables. Dans la circonstance, il n’y a donc aucun montage ni de ma part (je découvre les camarades en arrivant) ni de TF1, qui s’est installé avant que qui que soit ait décidé quoi que ce soit. Là encore « la révélation » n’en est pas une. Il ne s’est tout simplement rien passé ! A la fin, nouvelle stupéfiante : le cadrage serré montrait une foule derrière moi. Quelle découverte ! Toutes les interviews se font en plan serré. Il était donc matériellement impossible de me filmer autrement. C’est d’ailleurs bien ce que voulaient les copains. Où est le problème ? Voici où est le problème.
Cette interview c’est six millions de téléspectateurs ! Cette marche est un énorme succès. Les solfériniens mettent le paquet depuis deux jours pour parvenir à frapper notre travail. Rien n’est plus normal quand même ! Nous les attaquons, ils se défendent. Ils ont perdu la rue mais ils tiennent tous les rouages de l’Etat et des médias qu’ils contrôlent. Ils s’en servent. Où est la surprise ? L’UMP faisait pareil en son temps. C’est la Vème république voilà tout ! Quant au déchainement médiatique c’est une toute petite poignée de gens qui est en cause. Qui peut être surpris que Barbier, qui n’était pas dans la rue, ni au début ni à la fin, et qui n’a pas vu les images des journaux du soir, dise que « la manif de Mélenchon a fait pschitt » ? Vous attendiez quoi d’autre de la droite extrême médiatique ? Que TF1 soit devenue une cible dans cette circonstance vous étonne ? Vous croyez que le pouvoir PS va les féliciter de m’interviewer devant six millions de téléspectateurs, une heure avant le départ de la marche, et de n’avoir pas pourri les images ? Autre chose à quoi vous n’avez pas pensé. Le contexte médiatique. Il est question du passage de LCI, succursale de TF1, en chaîne gratuite l’an prochain. Vous croyez que les « chers confrères » applaudissent ? Tous ceux qui ont un rond de serviette dans telle ou telle émission d'info en continu font donc du zèle. Rien de tel qu’un petit scandale déontologique pour créer une ambiance, non ? Cher lecteur naïfs, ne vous enragez pas, ne vous indignez pas. L’information n’existe pas. C’est juste un spectacle ! Juste une arène. Vous me lisez depuis assez longtemps, vous pouvez donc comparer et juger de chaque circonstance. Tout ne se passe-t-il pas comme je vous l’avais annoncé ? D’abord dénigrement personnel. C’est le sondage à plusieurs milliers d’euros la veille de la marche, sur mon style, avec résultats mis en scène : au lieu des 36 % qui me donnent raison, les 60% qui pensent le contraire, droite et gauche confondues. Quand c’est le FN, ils donnent les chiffres dans l’autre sens ! Imaginez : « 36 % des français donnent raison à Mélenchon de parler cru et dru ! » Ensuite il y a les manifestations utilisées comme diversions organisées à la va-vite, de façon irresponsable.
On enchaine avec la bataille des chiffres. Des naïfs, ici même, viennent dire « vous avez trop exagéré, moi je pense que …. ». Je me demande à quel chiffre vous croyez que vos ennemis salueront votre honnêteté intellectuelle. Assez de naïveté, mes amis ! Ce n’est pas une affaire d’évaluation au doigt mouillé. Nos compteurs calculent la surface entre le premier et le dernier rang et multiplient par la densité de manifestants au mètre carré. Personne n’évoque notre méthode. Les perroquets médiatiques, par contre avalent tout rond la méthode de la police qui, paraît-il, compte par rangées qui passent. Quelles rangées ? Ou y a-t-il des rangées dans une manifestation ? Une marche ne se fait pas en rang ! Après ces exploits sur les chiffres vient le temps du coup monté pour brouiller le message de l’évènement. Quoi de neuf depuis la dernière marche dans ce registre ? Rien. Toujours les mêmes à la manœuvre, les mêmes agences d’influence, les mêmes dirigeants politiques, les mêmes médias, les mêmes méthodes. Il ne faut pas se faire de soucis. Ça ne compte pas. Et comme ils ne voient pas l’essentiel, qui est pourtant sous leurs yeux, notre plan de marche peut continuer tranquillement. Le seul enjeu, pour moi, est que vous vous endurcissiez sous l’outrage et l’épreuve. N’achetez pas leurs journaux et dégoûtez-les autres de le faire, ne les croyez jamais, ne leur donnez aucune prise, n’attendez rien, absolument rien d’eux. Pratiquez à leur sujet un mépris total, construit, conscient, et… bien informé ! Et en les observant essayez de deviner la consigne de l’ennemi et ses objectifs. Ici, la violence du chiffre de Valls explique la brutalité de l’attaque sur les « révélations ». Il n’a pourtant atteint aucun objectif. La sympathie populaire reste du côté de notre bataille contre la hausse de la TVA. Bref, ne lâchez rien.