17mai 14

Interview parue dans Direct Matin le 16 mai 2014

L’Austérité ne mène nulle part

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Vous souhaitez refonder l’Europe. Qu’est-ce que cela signifie ?

L’Europe est passée d’une coopération économique a une absurdité erigée en règle absoliue: pas plus de 3% de déficit ou la mort. Le résultat ? Il n’y a jamais eu autant de chômeurs, de pays ruinés et aussi peu de croissance. Prétendre « réorienter l’Europe » dans le cadre des traités actuels est une mystification. Les traités bloquent tout ! Il faut donc refonder l’Europe en partant sur d’autres bases.


Le traité transatlantique a été au cœur de cette campagne. Pourquoi y êtes-vous opposé ?

Ce grand marché Etat-Unis-Europe va unifier les normes, à propos des marchandises, de leur contenu, de la manière de les conditionner et de les vendre. L’alignement par le bas est garanti d’avance. Nous avons pris l’exemple du poulet américain lavé à la javel. Cela donne un contenu très concret à cette question. L’électeur pourra dire oui ou non à ce traité en élisant les députés qui vont se prononcer à son sujet.


Comment lutter contre l’austérité?

L’austérité ne mène nulle part. On le voit, les Grecs en sont à leur cinquième année de récession. Or, on ne peut rompre avec cette politique que si les etats peuvent se financer auprés de la Banque centrale publique et pas sur le marché financier privé, qui nous fait dépendre d’agences de notation et de fonds de placement. Bien sûr, c’est très difficile. C’est pourquoi il est important qu’il y ait un parti anti-austérité comme le Front de gauche. Sinon on finirait pas croire qu’il n’y a qu’une politique possible.


Le risque d’abstention est majeur pour ce scrutin…

Il y a une forme d’insurrection froide. Les gens se demandent à quoi ça sert, surtout quand ils ont voté non au traité européen de 2005 et que Sarkozy et le PS ont fait comme si c’était « oui ». Ce searit dommage si cette colère ne se traduise pas par un vote en notre faveur, qui nous aide à construire une nouvelle alliance avec les verts et avec les dissidents PS. L’abstention est un cadeau aux sortants.


Le FN est donné en tête. Croyez-vous à sa victoire ?

Aux yeux du monde, une victoire de l’extrême droite en France serait un signal terrifiant. Mais quels que soient les résultats, je persiste et signe en face de Marine Le Pen : non, le problème, ce n’est pas l’immigré, c’est le financier. Et la meilleure manière de défendre la France, ce n’est pas d’abandonner l’euro à Angela Merkel.


Il y a plusieurs mois, vous espériez devancer le PS. Aujourd’hui vous visez un score à 10%…

J’ai dit un score à deux chiffres. Mon but reste le même. Non, il n’y a pas qu’un choix possible dans ce pays, le PS ou la droite et l’extrême droite. Oui, autre chose est possible. Un bon score nous permettra d’imposer cette idée au centre de la scène a gauche.


Le geste fiscal annoncé vendredi par Manuel Valls est-il suffisant ?

C’est purement électoraliste. Il retire des impôts à des gens qui n’en payaient pas avant que le gouvernement socialiste leur en fasse payer. On finit par s’y perdre. Manuel Valls défait les mesures fiscales décidées par Jean-Marc Ayrault et présente cela comme un progrès.Hollande réforme sa réforme territoriale ! Cela donne le sentiment d’une politique de gribouille.

Pour la première fois, les élections européennes vont influer sur le choix du président de la Commission. Pour vous, Martin Schulz, soutenu après le PS, est un mauvais candidat ?

Martin Schulz est l’incarnation de la cohabitation entre les socialistes et la droite européenne. Actuellement président du Parlement européen par tourniquet avec la droite, son parti est membre du gouvernement de Angela Merkel. Je ne comprends pas quelle aberration a conduit les socialistes à présenter ce personnage comme emblème du combat qu’ils prétendent mener contre l’austérité et pour un changement de l’Europe. Martin Schulz incarne cette continuité de l’Europe qui étrangle les peuples.


Vous prenez la défense de Jérôme Kerviel. Vous croyez à un geste de François Hollande en sa faveur ?

Non, parce que François Hollande n’a jamais eu de sensibilité à la dimension humaine de la justice. Jérôme Kerviel, est innocent. C’est une thèse qu’on peut discuter mais chacun peut se faire une conviction personnelle. En annulant son amende record, la Cour de cassation a confirmé qu’il y avait des doutes sur la perte enregistrée par la Société générale donc sur le 1,7 milliard qu’elle a empoché pour compenser . Je ne vois pas l’urgence qu’il y aujourd’hui à aller embastiller Jérôme Kerviel si ce n’est parce que le système veut donner le dernier mot aux banquiers.


Le Front de gauche est apparu divisé ces derniers mois. Pour André Chassaigne (PC), c’est votre personnalité qui pose problème. Il a tort ?

C’est vrai que nous avons été divisés sur la stratégie générale de notre mouvement aux municipales. Devions-nous ou non affirmer notre autonomie en toutes circonstances ? Cela a été un facteur d’illisibilité très dommageable. Mais aujourd'hui, nous sommes repartis dans cette campagne de façon totalement homogène. La machine est relancée. Et comme je ne demande rien pour moi, je ne crois pas que ma personnalité soit un obstacle à quoi que ce soit. Je m'efforce de faire du mieux que je peux. J’ai des défauts. Qui n’en a pas ? Mais je crois que je fais assez bien mon travail, j’arrive à entrainer, à soulever de l’enthousiasme. Après, on peut toujours faire mieux… Que personne n’hésite a essayer !

Propos recueillis par Chloé Demoulin



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