24avr 15

La mer entre les ponts

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Ceci est encore un post de période de congés scolaires. Pour ma part je vais et je viens dans le pays à la faveur des jours libres. Je maintiens un niveau calculé de présence médiatique. Cela m’est facilité par la présence dorénavant plus active de mes proches sur ces médias. Je me prépare à davantage de présence avec la sortie de mon pamphlet sur la politique allemande en Europe. Ce sera le 7 mai. De cela, je parlerai bientôt ici même. En attendant, la sortie grossière et vulgaire de l’odieux ministre des finances de madame Merkel, monsieur Schäuble, a valeur d’ultime avertissement sur la nouvelle arrogance allemande. Les esprits semblent s’ouvrir au sentiment de la menace que cela fait peser sur notre pays. Même Cambadélis a fustigé la « francophobie » du ministre concerné. 

Dans ces lignes je reviens sur le carnage de migrants qui s’accentue en Méditerranée. Puissent mes mots vous aider à tenir bon contre la cruelle indifférence, la veule résignation et bien sûr l’idée abominable « qu’ils l’ont bien cherché ». Et enfin contre la pire de toutes les sottises : l’idée qu’on n’y peut rien et que tel est le destin des pauvres.

Puis je dis quelques mots sur le congrès du PS qui a commencé. Ce n’est ni de même nature, ni de même importance. Mais que peut-on en attendre raisonnablement ?

Le cimetière de l'illusion européenne

La Méditerranée est devenue un cimetière à ciel ouvert. Les naufrages se suivent et se ressemblent. Les migrants se noient par centaines. Face à cela, le premier devoir de toute conscience humaine est de sauver ces gens de la noyade.  Je veux dire de nouveau mon raisonnement, quand bien même ne satisfait-il pas la question stupide habituelle : « que proposez-vous de concret pour arrêter ça tout de suite ? », qui revient en fait à s’amnistier de toute pensée et responsabilité, car chacun sait bien qu’une fois monté dans un bateau, le migrant ne peut faire l’objet d’aucune mesure « concrète » pour être convaincu de faire demi-tour « tout de suite ».

Qui sont ces migrants ? Pourquoi ont-ils quitté leur pays ? Voila la première question que tout le monde devrait se poser. Il faut se poser la question des départs avant de s’interroger sur les arrivées qu’elle implique ! Par ses guerres et sa politique commerciale agressive, l’Union européenne est la principale cause de ces migrations. Bien sûr, on passe vite à autre chose. C’est que l’Europe est absolument responsable de ce désastre. Au lieu de pourchasser ces malheureux immigrés, mieux vaudrait stopper le système fou qui les pousse à partir de chez eux. Pourquoi partent-ils ? Pour fuir la guerre, la misère et bientôt le dérèglement climatique. Voyez en Libye. Qui a déclenché cette guerre en Libye ? Les Européens et les États-Unis sous le drapeau de l’OTAN. A l’époque, ils ont détourné la demande de protection des populations menacées par l’aviation de Kadhafi pour lancer une opération militaire de grande ampleur. Ce faisant, ils ont accentué la transformation de la Révolution en guerre civile en Libye, rendu impossible le dialogue politique national. Et ouvert un champ de bataille dans lequel les bandits et les mercenaires des religieux de tous poils s’en donnent à cœur joie.

L’autre raison est encore plus profondément liée à l’Union européenne. C’est la politique commerciale. Depuis des années, l’Union européenne exige des États africains qu’ils se convertissent au libre-échange total : fin des barrières douanières, quotas, droits de douane etc. La libéralisation de l’agriculture et de l’industrie dans ces pays a empêché un développement économique local et même déstructuré des pans entiers des sociétés locales. Elle a poussé des milliers de braves gens sur les routes pour chercher du travail et survivre. Ceux-ci sont d’abord allés des campagnes vers les villes dans leur pays. Puis vers les grandes villes des pays voisins. Ceux qui tentent de franchir la Méditerranée sont souvent les plus courageux. Et ceux qui ont pu rassembler assez d’argent pour payer les mafias des passeurs qui organisent ce trafic d’êtres humains.

J’ajoute qu’il faut se préparer à de prochaines arrivées. D’abord parce qu’aucune leçon n’est tirée de cette situation si j’en crois les appels multiples lancés ici où là pour une nouvelle guerre en Libye. Mais aussi parce que le changement climatique va accentuer les migrations de populations. Là encore, personne n’en parle. Je cite ce que j’en ai dit dans mon livre L’Ere du peuple à l’automne dernier : « Les exilés du changement climatique commencent seulement à faire parler d’eux. Le GIEC écrit que le changement climatique “peut indirectement augmenter les risques de conflits violents comme les guerres civiles ou les affrontements intergroupes, en amplifiant des déterminants de ces conflits comme la pauvreté”. Des calculs ont été faits pour mieux cerner ce phénomène. 40 % des terres seraient menacées de désertification. Deux milliards d’habitants seraient touchés. Les rendements de toutes les cultures reculeraient de 2 % par décennie, en dépit des progrès techniques qui interviendront. Pourtant il faudrait les augmenter de 14 % tous les dix ans pour faire face à la demande alimentaire mondiale. Voilà qui contient une série de conséquences géopolitiques qui surplombent toute la réalité politique. Elles lui donnent déjà un peu de son rythme quand se déroulent les premières migrations massives des réfugiés du changement climatique, qu’ils viennent de terres englouties ou de zones où sévissent de grands épisodes de sécheresse. 80 % de ces migrations se font entre pays du Sud. Elles ignorent les frontières et les alliances interétatiques régionales, et déséquilibrent socialement et politiquement toutes les sociétés qu’elles touchent. ». Ainsi, en 2013, 22 millions de personnes ont du quitter leur domicile à cause des dérèglements du climat. C’est trois fois plus que le nombre de déplacés à cause des conflits.

Doit-on alors se résigner à voir la Méditerranée devenir une fosse commune ? 22 000 migrants sont morts en tentant de rejoindre l’Europe depuis 2000, essentiellement en Méditerranée. Depuis le début de cette année 2015, ce serait déjà 1 600. Plus que la moyenne annuelle des quinze dernières années. Déjà plus de la moitié de l’année dernière. Car le phénomène s’accélère. 1 600 morts depuis janvier, cela correspond à un mort toutes les deux heures en moyenne. Et il y a aussi, heureusement, ceux qui survivent à la traversée. 21 000 arrivés en Italie depuis le 1er janvier. Là c’est un peu moins que l’an dernier. La mort a fait baisser le chiffre. Je mentionne cette comptabilité macabre pour répondre à ceux qui veulent des barbelés toujours plus hauts et même « des navires de combat pour stopper les migrants » comme l’a écrit une raciste anglaise dans le journal The Sun. Une société qui s’habitue à la mort de masse n’a pas d’avenir.

Le but est bien d’abord de stopper les flux migratoires en direction de l'Europe, pas d’en éteindre les causes. Par exemple, la Commission cherche ainsi à bloquer les flux migratoire en Afrique, en proposant notamment de renforcer les frontières du Niger pour éviter les flots de réfugiés fuyant les guerres déclenchées par l'Europe. En matière d'immigration comme dans bien d'autres domaines, l'UE n'a rien compris. Les principaux dirigeants européens ont fait le choix de construire une Europe forteresse. Ils ont fixé pour mission principale la surveillance des côtes et la chasse aux migrants alors que l’humanité exige, une fois rendu à ce point du désastre, qu’on se préoccupe d’abord du sauvetage en mer.

Le 1er novembre 2014, l’Union européenne a lancé l’opération « Triton », confiée à Frontex (l’agence européenne de surveillance des frontières) et supervisée par les autorités italiennes. L'opération est présentée comme la continuité de l'opération « Mare Nostrum » mise en place par Rome après la catastrophe de Lampedusa qui avait fait 366 morts en octobre 2013. En fait, avec cynisme, sous le prétexte de l’action d’urgence et de l’émotion c’est une toute autre politique qui a commencé . Car les deux opérations n’ont pas le même but.

Gérée par Frontex, « Triton » n’a pas pour priorité de sauver les migrants mais de surveiller les frontières de l'UE. Aussi, alors que la Marine italienne allait parfois secourir des bateaux jusqu’aux abords des côtes libyennes, l’agence de surveillance des frontières de l’UE ne peut sortir des eaux territoriales européennes. Les deux opération n'ont également pas le même budget. Alors que « Mare Nostrum » coûtait 9 millions d'euros mensuels pris en charge par l'Italie, Triton ne dispose que d'un budget de 3 millions d'euros et d'un équipement bien plus modeste.

La catastrophe était donc prévisible. À l'annonce de la mort de plus 800 migrants ce dimanche, la Commission s'est déclarée, via un tweet de Juncker, « chagrinée » et a promis des actions « audacieuses » en la matière. Une fois de plus il s’agissait de donner le change dans les médias au moment du pic d’émotion. En effet dès lundi la Commission proposait un plan d'action en 10 points. Mais, vite, le cynisme ne s’est plus caché. Donald Tusk, pathétique président du Conseil européen nous a averti : il ne s'agit pas « d'attendre des solutions rapides aux causes profondes des migrations, parce qu'il n'y en a pas ». C’est a peine croyable mais c’est bien ce qu’il a dit. Mais la capacité d’indignation des bonnes âmes de « l’Europe qui protège » était déjà passée à autre chose. Tusk ne s’est donc pas trop embarrassé de précautions. Il s’est donc senti autorisé a préciser sa profonde pensée. Il n’y a pas de solution et d'ailleurs « S'il y en avait, nous les aurions mises en œuvre depuis longtemps ». Fermez le ban !

Le plan d'action se concentre donc sur le contrôle des frontières avec « un renforcement des opérations de contrôle et de sauvetage » sous l'égide de Frontex, dont on augmente les moyens financiers et matériels. Son champ d'action, actuellement limité aux eaux territoriales des pays de l'UE, pourra éventuellement être élargi aux eaux territoriales des pays de transit, comme la Libye. Néanmoins cela ne change pas la mission première de Frontex : le contrôle des frontières et pas le sauvetage.

Et en effet le but est bien d'augmenter la surveillance et le contrôle des migrants. Et ce ne sera pas dans la légèreté. Il s’agit de s’assurer de  « la prise des empreintes digitales de tous les migrants à leur arrivée sur le territoirdes États membres ». Et cela pour faciliter la mise en place d’un programme pour « les renvois rapides des candidats à l'immigration non autorisés à rester dans l'UE ». Le programme prévoit certes une « répartition plus équitable des réfugiés entre les États membres de l'UE ». Et même un « programme de réinstallation dans les pays de l'UE » de personnes ayant obtenu le statut de réfugié auprès du Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR). Les États sont invités à y participer activement. Mais sur la seule base du volontariat. On devine quel succès s’annonce là ! Ces vœux pieux oublient que c'est le règlement européen de Dublin qui considère l'État d'entrée responsable de la demande d'asile du migrant, faisant peser la charge migratoire majoritairement sur les pays du sud de l'Europe. Pourtant n’est-ce pas l’Allemagne qui a besoin d’immigration ? Pourquoi ne pas diriger prioritairement vers ce pays les nouveaux arrivants ? En effet le vieillissement de la population active outre Rhin exige selon ses propres dirigeants un nombre croissant d’immigrés pour faire tourner la machine à assembler les pièces fabriquées tout autour de l’Allemagne.

Le congrès du PS nous intéresse

Le congrès du PS est en marche. Je veux en dire un mot. Non que j’en espère quelque chose. Mais j’ai été interrogé dimanche dernier sur France 3. J’ai dit l’essentiel. Je souhaite le succès de la motion menée par Christian Paul et les frondeurs. Cela ne veut pas dire que je la crois possible. J’ai quitté ce parti il y plus de 6 ans en faisant le bilan qu’on ne pouvait plus le changer de l’intérieur. Il n’empêche que dans les faits, le vote pour la motion de Christian Paul, c'est en quelque sorte la motion de censure à disposition des militants socialistes contre le gouvernement Valls. Le PS nous rebat les oreilles et nous appelle sans cesse à « l’union ». Si les militants du PS veulent sincèrement « l’union » avec notre gauche, il faut qu’ils s’en donnent les moyens. Et donc qu’ils votent pour ceux avec qui nous pourrions débattre, plutôt que pour les diviseurs de la gauche qui insultent les communistes, méprisent les écologistes et s’obsèdent a vouloir isoler le parti de gauche tout en volant et détournant au profit de leurs basses besognes tout le vocabulaire de la gauche.

Je vois bien comment le ton est monté dans le débat entre les factions du PS. On touche a présent aux fondamentaux. La critique de la gauche du PS se fait avec les mots du Front de Gauche quand bien même les chefs se sentent-ils continuellement tenus de marquer leurs distances avec moi pour satisfaire aux rites exigés d’eux et qui contribuent surtout à les isoler de tous dedans et dehors. Ainsi quand l’un des leaders de cette motion dénonce « la transgression permanente » du gouvernement à l’égard des principes de gauche. Je parle de Benoît Hamon et de son interview dans Paris Match il y a quelques jours. Je suis d’accord avec lui quand il dit « on n’attend pas de la gauche qu’elle favorise les licenciements, qu’elle favorise la rémunération des actionnaires et qu’elle persévère dans une politique économique qui manifestement ne marche pas au regard des chiffres de la pauvreté et du chômage. Cela désarçonne nos électeurs qui constatent amèrement le fossé entre nos promesses de campagnes et la politique que l’on mène ». Et encore quand il ajoute « quand on invite les jeunes à devenir milliardaires, quand on dit qu’il faut mieux contrôler les chômeurs parce qu’ils profitent – alors même que les vrais profiteurs continuent à se gaver par l’évasion fiscale ou les réductions d’impôts ! – et que c’est un ministre de gauche qui le dit, c’est que les choses ne sont plus à leur place. Certaines mesures tournent ouvertement le dos à nos valeurs et à notre histoire ». Enfin, je l’approuve quand il explique que « si la politique économique du gouvernement échoue, sur certains aspects, ce ne sera pas l’échec de la gauche. Cela n’invalide en rien les solutions de la gauche puisqu’elles n’auront pas été tentées dans un certain nombre de domaines ». En fait elles n’ont pas été tentées du tout et c’est même l’inverse. Mais sans doute était-ce la limite de ce qu’un ancien ministre de Valls peut dire sans risquer de se faire renvoyer a ses propres turpitudes. Mais c’est l’intention qui compte. Ici, c’est clairement une dénonciation de la politique du gouvernement.

Je suis heureux d’observer les passerelles mises en place dans notre direction dans les éléments du texte des frondeurs. Ainsi avec l’exigence de la 6e République dans la motion des frondeurs. Cette idée figure aussi dans une autre des quatre motions, intitulée « Osons un nouveau pacte citoyen et républicain ». Mais évidemment elle n’y est pas dans celle de Jean-Christophe Cambadélis, Martine Aubry et Manuel Valls. Ni dans celle de Karine Berger. À la différence de la motion Cambadélis-Valls-Aubry, les frondeurs réclament aussi « l’augmentation du SMIC ». Ils appellent aussi « au combat politique contre la droite allemande et la Commission européenne » pour « rouvrir des marges de manœuvres vis-à-vis des exigences budgétaires européennes ». Ce sont là trois points importants pour l’avenir. Même dans les limites de la motion de Christian Paul. En effet, ces points sont au cœur du programme du Front de Gauche et de notre stratégie. Et ils marquent une rupture avec le modèle de François Hollande et Manuel Valls. Ce serait une remise en cause de fait de la « politique de l’offre », de « compétitivité » et d’austérité. Ce serait un changement radical avec l’autoritarisme de la 5e République et la soumission à l’Europe allemande, deux verrous puissants pour empêcher le changement en France dont François Hollande a bien usé et abusé pour imposer ses reniements. La présence de ces trois éléments indiquent la direction dans laquelle aller pour nouer des convergences avec nous : à rebours de la politique de Hollande et Valls. C’est ce que commencent à faire les frondeurs.

Je ne recommande pourtant pas d’avoir des illusions sur les conséquences de ce texte. Le caractère convenu de l’exercice rituel des congrès socialistes ne le permet pas. « Le Canard enchainé » a montré avec quel cynisme un seul auteur, désormais rallié à Valls, a écrit dans les trois textes des oppositions au texte de Cambadélis. Nous savons bien aussi que les frondeurs sont rarement allés au bout de leurs certitudes. Du coup, leur ambition paraît étrangement décalée par rapport au moment que nous vivons. Les auteurs pensent faire 30% à 40% des suffrages. C’est évidemment un beau score compte tenu de la distance qui sépare les deux orientations proposées au vote. Il confirmerait que la majorité composite qui se déduirait de là est faible. En effet, sa seule opposition serait plus forte que chacune des fractions qui constituent la majorité rassemblée par Cambadélis, qui ne sont pas séparées entre elles par de simples nuances, elles non plus. Quoi qu’il en soit, il est très pauvre d’avoir pour ambition un score dans le PS sans conséquence sur son orientation pour faire face à la catastrophe sociale et politique que les auteurs du texte analysent. A qui, à quels secteur de la société ses auteurs pourront-ils dire au lendemain du vote : « les choses vont aller du bon côté dorénavant parce que nous avons fait 40% et Valls seulement 60% ! » ? D’une façon générale, quel impact sur le futur qu’un score dans un congrès du PS ? De toutes façons le gouvernement n’en fait et n’en fera qu’a sa tête et tout cela n’est qu’une formalité pour lui. En attestait le fait qu’aucun ministre du gouvernement n’était présent pendant le conseil national qui ouvrait le congrès alors même que la question de la pratique gouvernementale était au centre du débat.

Pour finir, il faut voir aussi qui anime le regroupement de la « gauche » du PS. Certes, Benoît Hamon a voulu préempter l’autorité du groupe par des surenchères dans son interview de « Paris Match ». Mais c’est Christian Paul qui est désigné pour diriger le tout. Comme homme, il est aimable et prévenant. Comme responsable politique, il n’est pas du tout la marionnette de circonstances que certains ont prétendu. Sa seule présence à la tête d’un tel groupe où s’additionnent et se contrarient tant d’ambitions prouve son habileté. Mais le choix ne peut être sans signification. Il s’est fait au détriment d’Emmanuel Maurel réputé « trop marqué a gauche dans le PS » selon les mots du journal « le Monde ». Christian Paul a voté pour le traité budgétaire. Il a aussi voté pour l’ANI et l’allongement de l’âge de la retraite. Autrement dit il n’a pris en charge aucun des marqueurs traditionnels de la gauche du parti. Ce choix a valeur de recentrage, dans la même pente que le choix final d’Aubry de ne pas aller au combat d’idées. D’ailleurs, Paul a donné immédiatement des gages. Ici, il a dit préférer le terme « éclaireur » à celui de « frondeur ». Là, il rappelle « je ne suis pas frondeur par tempérament. Je ne suis pas parti avec Mélenchon ! J’ai voté toutes les lois depuis deux ans ». Encore ailleurs, il explique qu’il « soutiendra Hollande, s’il a réussi ». Benoit Hamon aussi indique déjà qu’en 2017, il votera « évidemment » pour François Hollande « face à Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen ». Façon de dire avant l’heure que les primaires sont déjà enjambées elles aussi.

Dès lors, le congrès sans issue est aussi un congrès sans objet quant aux rapports de forces qui s’y noueront puisque la pièce est déjà entièrement écrite. La ligne du parti et du gouvernement ne changera pas. « Il ne s’agit pas de renverser le gouvernement ni de renoncer au redressement » a rappelé Jean-Christophe Cambadélis. La primaire n’aura pas lieu puisque les chefs de la gauche du parti annoncent déjà leur ralliement a la candidature du président sortant, s’il est candidat. Et cela, même s’il semble perdant d’avance, comme le souligne Benoît Hamon quand, dans sa réponse sur 2017, il déclare ceci : François Hollande « peut-il être au second tour si ce quinquennat ne laisse pas une empreinte sociale forte ? Dans l’état actuel de désespérance de nos électeurs, je ne le crois pas » !

Faut-il pour autant désespérer du congrès socialiste ? Je crois qu’une prise de conscience y est possible. En dehors des prébendiers de toutes sortes et des nomenclaturistes de toutes les variétés qui s’y trouvent, de nombreux adhérents vont faire un sérieux examen de conscience quand ils vont prendre la mesure de l’imposture qui est en train de se jouer. Pourquoi voudraient-ils s’y impliquer davantage ? Je pense que certains voudront mettre leurs convictions en accord avec leur actes. Peut-être se décideront-ils à venir mener avec nous le combat clair et net sans lequel il n’y a pas d’avenir pour la gauche dans notre pays après l’épisode suicidaire de Hollande et Valls. Mais à chaque jour suffit sa peine. Car il faut impérativement ouvrir un autre chemin. Nous avons commencé à le faire. Toute opportunité est bonne a prendre qui abrège les souffrances du chemin… Un vote sanction de Manuel Valls et de sa politique dans le congrès du PS nous donnerait un renfort idéologique de poids. Il faciliterait la suite de notre action si nous voulons faire de 2017 le point de départ d’un renouveau et non un enterrement sans lendemain.


62 commentaires à “La mer entre les ponts”
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  1. MEDIALUNA dit :

    Il faut que nous arrivions à nous écouter entre PG, PC, Ensemble, les socialistes écoeurés. Il me semble que l'outil Front de gauche est "cassé" ou qu'il n'est plus utilisé. Ou pas assez ! Pourtant si nous voulons avancer il faut que nous soyons unis, car dispersés, méfiants les uns envers les autres, nous perdrons. Jean-Luc Mélenchon avait bien dit tous ensemble sous le même logo. Il nous faut recréer cette dynamique. Je n'entends pas beaucoup parler des "Chantiers d'espoir" !

  2. carlo dit :

    Ils appellent aussi « au combat politique contre la droite allemande et la Commission européenne »

    Et c'est très insuffisant. La politique de la commission européenne est également soutenue par la gauche allemande qui gouverne avec A. Merkel. Et cette politique était déjà inscrite dans le traité de Maastricht négocié avec la droite allemande de l'époque par FM lui-même. Ce n'est pas l'Europe allemande qu'il faut combattre mais l'Europe des traités. Seule le PC l'a vraiment combattue en son temps. Il y a ensuite renoncé afin de participer au gouvernement de Lionel Jospin qui s'est empressé de ratifier le traité d'Amsterdam, après avoir promis de le négocier, comme feront après lui NS (traité de Lisbonne) et FH (traité budgétaire).

  3. Georges ROULLIER dit :

    Ce que je crois coïncide avec nos certitudes à tous. Il faut créer les conditions d'un changement d'attitude de gauche, les unions, alliances, cartels, le peuple à beaucoup donné et dans le fond des choses il est déçu devant les partis sclérosés, PS, PC, je parle là des directions. Le peuple s'abstient de voter, est-ce là une réserve de voix pour l'action et le changement ? Je le crois. Certains attendent un Karl Marx, un Jean Jaurès, je suis de ceux-là, je pense aussi que les temps ont changé, que le petit écran, les médias mobilisent trop nos réflexions, voir les réunions ou l'on se forme, ou on trouve et on cerne nos futurs représentants qu'on désigne à la base. Jean Luc Mélenchon est de loin le meilleur tribun de sa génération, je comprends sa recherche des unions possibles, mais là je dis ça ne marche pas, ça n'a véritablement jamais marché, de 81, 3 ans, notre CNR avant, 2 ans, après 45, le capital essayait de reprendre. Je crois avec certitude que l'adhésion doit être individuelle autour d'un programme simple extrait du notre. Emploi, salaire, logement, santé, éducation, République, la 6eme, solidarité et ces trois mots marqués sur le fronton de nos...

  4. HYBRIS dit :

    Sous l’impulsion de Hollande et Valls, avec l’aval de M. Aubry, le PS opère en pleine lumière le dernier acte de sa conversion au libéralisme. Avec en prime, une politique étrangère d’inspiration néoconservatrice. Le congrès est joué d’avance. Mieux vaut s’intéresser à la suite. Le dessein des hollandistes est d’emporter le peuple de gauche à la semelle de leurs souliers. Peuvent-ils y arriver ? Oui, si nous leur facilitons la tâche. Notre crédibilité stagne depuis 2012, les municipales 2014 l’ont même érodée. A présent rien n’est plus urgent que d’approfondir la cohésion du FdG et de poser la primauté de ses objectifs stratégiques sur tout le reste. Le discours sur l’utilité des élus dans les élections intermédiaires peut s’entendre. Sauf quand il contredit l’objectif stratégique de façon frontale. Hors cette logique, autant aller à la pêche. Sur la question des alliances, la patience est de règle. Toutefois les offres faites aux « frondeurs » comportent un risque si elles devaient s’éterniser. Celui de crédibiliser des gens qui à la fin des fins ne quitteront pas la boutique, et partant de renforcer la boutique elle-même.

  5. Papita31 dit :

    Bonjour à tous,
    J'écris, parce que je suis, comme Jean-Luc Mélenchon sensible au sens des mots. Or, il me semble que le terme de migrants, relayé sans cesse par tous les médias ou presque pour justifier le génocide méditerranéen n'est pas acceptable. En fait, ce sont des réfugiés qui fuient pour sauver leurs familles au péril de leur vie. Les migrants quittent leur pays de leur plein gré, les réfugiés en sont chassés. Tout être se proclamant humaniste se doit de leur porter secours. Je pense donc que Jean-Luc Mélenchon n'aurait pas du tomber dans ce piège sémantique.
    Dans le même registre, parlons du productivisme, c'est à dire du chômage. En effet, le productivisme crée des chômeurs. Cela continuera, tant que les robots ne seront pas taxés à hauteur des emplois qu'ils suppriment. Je rappelle que les investissements productiviste sont en grande partie financés par les fonds publics.

  6. Francis dit :

    Le congrès du PS a déjà fait pschitt avec la cosignature par Martine Aubry du texte pro-gouvernemental de Cambadélis. Vous comprenez, il avait un petit risque que la motion des "frondeurs" puisse venir chatouiller les narines de Valls et Hollande. Risque que n'a pas voulu prendre Mme Aubry. Le congrès est terminé et comme d'habitude ce sera du 70/30.

  7. Jean-François91 dit :

    @52 MEDIALUNA
    L'outil Front de Gauche a été créé, en principe, pour rassembler un front antilibéral, à vocation hégémonique (dirait Gramsci), pour en finir avec la trahison social-libérale et proposer une alternative viable. Le Front de Gauche s'est donné un manifeste, un programme, "L'Humain d'abord". Nous devrions en permanence affiner ce programme, le rectifier ou l'améliorer là où nécessaire, et le proposer, l'expliquer à nos concitoyens, leur montrer que c'est une voie crédible pour sortir du désastre dans lequel s'enfonce notre pays. Or ce n'est pas vraiment le cas. Les composantes du FdG fonctionnent comme des électrons libres vaguement apparentés, avec un vague logo commun. Si on ajoute les stratégies électorales "chacun pour soi" qui nous compromettent avec les responsables/complices de la politique que nous dénonçons, nous sommes à peu près illisibles. Notre programme étant de moins en moins prononcé (avec toute l'énergie qu'il déploie, Jean-Luc ne peut, à lui seul en décliner tous les chapitres !) il est d'autant plus facile à piller par les bleu-brun. "L'Humain d'abord", n'est pas de l'histoire ancienne, c'est notre identité en principe. M6R.

  8. educpop dit :

    Assurer le contrôle des migrants, surveiller tous les autres, confisquer les acquis, manipuler l'opinion, c'est un programme néo fasciste. S'il y a un cimetière de l'illusion Européenne c'est dans la prétention de faire passer cela pour un programme démocratique
    Cette énorme machine a procédé à un détournement du fond de l'histoire, elle se dirige pesamment vers une terrible catastrophe et continue de nous dire avec condescendance qu'on ne peut pas faire autrement. Si, on peut mourir.

  9. OPTIMIST dit :

    Je suis absolument d'accord avec @Jean-François91, notre excellent programme "l'Humain d'abord", qui en parle vraiment ? L'augmentation du SMIC, la réforme de la Sécurité Sociale, la relance de l'emploi, l'égalité devant l'impôt, la fuite des capitaux qui règle à elle seule le problème de la fausse crise. Ne serait-il pas utile que nous relancions une campagne nationale d'information maintenant, que nous engagions des débats sur ce programme au travers d'assemblées générales de citoyens, de le faire vivre ensemble, se l'approprier, le critiquer, l'actualiser si nécessaire, le relier avec la Constitution de la 6ième République, utile pour joindre le présent avec notre futur proche. Pour gagner en crédibilité, il est nécessaire de ne pas avoir raison avec une trop grande longueur d'avance. C'est la conviction du peuple, d'où sa volonté de changement qui est déterminante dans notre combat politique, pas notre vérité. Courage à tous et merci encore Jean-Luc.

  10. Christine dit :

    Très pertinent. Merci.

  11. Bruno dit :

    Je rejoins @OPTIMIST 60. Je me suis déjà manifesté dans un commentaire sur l'Humain d'abord. Maintenant, il est grand temps de mettre au point et faire connaitre notre programme de gouvernement. Les grands discours, le peuple ne sait qu'en faire. Il faut insister toujours et toujours, insister avec un langage clair sur ce que nous ferons une fois aux responsabilités. Aux camarades responsables du PG je demande de bien réfléchir.

  12. Michel dit :

    Jean Luc, vous semblez faire porter l'entière responsabilité du désastre migratoire en Méditerranée à L'Europe. C'est minimiser beaucoup l'influence de la France. Pour ma part, la stature de puissance militaire nucléaire de la France et son passé colonial qui inspirent la France-Afrique lui autorisant d'installer des bases militaires à y déployer 15 000 soldats sont les principale sources du mal. Combien de ces migrants voués à la mort parlent français ? Combien de pays riches par leurs ressources naturelles et pauvre en PIB sont-ils francophones ? Ces tragiques disparitions en mer doivent remettre en cause notre statut de puissance militaire nucléaire. Pourquoi ne pas prendre position pour un désarmement nucléaire qui nous rendrait certainement moins arrogant, pourquoi ne pas exiger la fermeture de nos bases à l'étranger, pourquoi ne pas abandonner le commerce des armes et la vente de Rafales à des pays qui condamne des opposants à mort par paquet de cinquante ? Il est temps pour nous de mettre en oeuvre le programme de la culture de paix de l'ONU et prendre exemple sur la Celac qui en fait un vrai programme politique.


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