29mar 12
Après avoir rencontré des lecteurs du journal Sud-Ouest, Jean-Luc Mélenchon a participé à un chat avec les internautes du journal.
Mika : Comptez vous faire quelque chose concernant le prix des carburants ou des nouvelles technologies automobile qui sont encore trop chères ?
Jean-Luc Mélenchon. Sur la hausse des prix des carburants, seuls ceux qui croient que le marché est libre sont assez naïfs pour trouver naturels la hausse. On a des moyens de l'endiguer. On peut l'endiguer par la modulation des taxes et l'utilisation des réserves stratégiques. Ou par le blocage des prix. Il existe des solutions techniques immédiates. Maintenant, les réserves de pétrole vont s"épuiser et il faut commencer la sortie des énergies carbonées. C'est pourquoi j'ai proposé une planification écologique de l'économie. Il est parfaitement exact de dire que le moteur à explosion est le plus gaspilleur puisqu'à peine 30% de l'énergie se transforme en énergie mécanique. Pas le moteur électrique qui est une des solutions. Mais il ne faut pas alimenter ces véhicules avec des centrales nucléaires. Il faut produire d'autres énergies, énergie géothermique et mécanique de la mer
Konig Jolan : Comment faire nationaliser Total ? En a-t-on les moyens?
Jean-Luc Mélenchon. Le rachat de Total c'est rien du tout. Le vrai scandale, c'est qui ait été privatisé au point ou il est. Les actionnaires privés n'ont aucun mérite dans les performances de Total. Sans vouloir aller trop avant dans les stratégies de combat, je voudrais rappeler que le prix de marché d'une action peut changer à la baisse très fort pour peu qu'on s'en donne les moyens…
Vanhert : N'y a-t-il pas un risque, en affaiblissant monsieur Hollande, que vous soyez le meilleur "allié" de Monsieur Sarkozy ?
Jean-Luc Mélenchon. Je pense que si Hollande est affaibli il ne l'est par personne d'autre que lui même, car nous faisons progresser le total gauche comme chacun peut le voir. A l'inverse, je pense que l'attitude fermée et les propos méprisants des dirigeants socialistes diminuent la capacité de rassemblement au deuxième tour. Je suis le mieux placé pour rassembler la gauche. J'ouvrirai la discussion avec tous ceux qui à gauche le veulent. Si on veut libérer la gauche républicaine et radicale de l'hégémonie du Parti Socialiste, il faut me placer en tête au premier tour.
Mélane : Pouvez-vous jurer que vous ne briguerez et n'occuperez aucun poste au gouvernement sous la présidence de M. Sarkozy ou M. Hollande?
Jean-Luc Mélenchon. Plutôt que des serments somme toute assez dérisoires, je vous demande d'être attentif au raisonnement politique qui m'a amené à dire pourquoi je ne participerai à aucun gouvernement que celui que je dirige. Je crois que ce gouvernement du front de gauche, dans un délai que je ne peux prévoir est inéluctable. Je crois que l'insurrection citoyenne est commencée, que la révolution citoyenne aura lieu. Et je n'échange rien de tout cela contre un plat de lentille et un strapontin.
David : Je voudrai juste savoir quelle est votre politique sur l'immigration ?
Jean-Luc Mélenchon. L'immigration est un fait. L'écrasante majorité des mouvements migratoires s'opère entre pays du sud. Leur origine est dans l'appauvrissement provoquée, notamment par l'Union européenne, qui ruine les agricultures vivrières des pays du sud et détruisent les capacités industrielles qui s'y trouvent. Le premier élément d'une politique des migrations est de cesser cette politique stupide qui détruit tout au sud et déforme le nord puisqu'elle suppose une agriculture intensive écologiquement insoutenable et un déménagement permanent du monde pour l'industrie. Pour le reste, il faut donner des papiers à tous les travailleurs sans papier pour que cesse dans les entreprises le dumping social.
Vanhert : A propos de l'augmentation du SMIC de près de 50% sur une mandature. Ne pensez-vous pas que cela va se répercuter sur les prix à l'achat. L'augmentation du salaire serait "mangée" par l'augmentation des prix tout en augmentant grandement les rentrées de l'Etat avec les différentes charges.
Jean-Luc Mélenchon. Bien sur que l'augmentation du Smic va se répercuter sur les prix à l'achat, mais bien moins que ce que l'on croit. Car les payes au Smic c'est 3,5 millions de smicards, sur une population de 23 millions de personnes. Mais comme l'augmentation du Smic se répercute en 2,5 ans sur l'ensemble des salaires, l'effet relance de l'activité et compense le resserrement des quantités individuelles consommées
Sud Ouest : De nombreux internautes souhaitent vous interroger sur la hausse des loyers et les difficultés rencontrées par les familles pour se loger. Que proposez-vous pour améliorer cette situation?
Jean-Luc Mélenchon. Deux propositions : 1 briser le mécanisme pervers de la rareté du logement. Il faut construire 200 000 logements par an. 2 Il faut faire baisser les loyers, pas seulement bloquer. Comment faire?
Il existe une méthode simple à appliquer. Pour une zone donnée, on calcule le loyer moyen et on rabat tout ce qui se trouve en dessous de cette valeur.
Philippe : Après une décennie de non rattrapage de l'inflation, le salaire des fonctionnaires est maintenant carrément gelé. Pendant ce temps les loyers continuent de monter ainsi que les salaires des gens du privé, pour les chanceux qui en ont un. Comptez vous poursuivre ce gel des salaires qui dévalue nos métiers?
Jean-Luc Mélenchon. Il faut donc débloquer les salaires des fonctionnaires. Augmenter les recettes de l'Etat, c'est pourquoi je propose 14 tranches d'impôt dont la dernière à 100%. Je me permets de vous signaler que M. Sarkozy avait promis une augmentation des fonctionnaires en échange des suppressions. Les suppressions ont eu lieu, pas les augmentations. Observez le ridicule de ce qui a été fait. La réduction de la TVA dans la restauration a coûté 3 milliards d'euros de pertes de recettes. La suppressions de 150 000 postes de fonctionnaires, le plus grand plan social de notre pays, permet à l'Etat d'économiser 500 millions d'euros par an. Pourtant, votre note de restaurant si vous y allez est toujours aussi salée, mais il n'y a plus d'instituteurs dans la classe de votre enfant. Cherchez l'erreur.
AlexisB : Pour ce qui est des frais médicaux, comptait vous faire un changement ? plus de 70 euros une mutuelle pour trois ça reviens très cher quand on a un petit revenu !
Jean-Luc Mélenchon. Si vous trouvez ça cher, aidez-moi à généraliser la sécurité sociale, ce qui était le projet de 1945. Meilleurs seront les remboursements de la Sécu, moins vous aurez besoin de mutuelle. Ne l'oubliez jamais.
N'oubliez pas que c'est à la surtaxation des mutuelles par M. Sarkozy que vous devez l'augmentation de votre tarif. Souvenez vous en le jour du vote
Romuald : Est ce que vous allez vraiment revenir sur la retraite a 60ans ?
Jean-Luc Mélenchon. Evidemment. Le financement de la retraite à 60 ans ne pose pas de problème, sauf si on considère que taxer le capital est un problème. Le régime de retraite a été le plus souvent excédentaire, entre 1981 et 2010 que l'inverse. 1 million d'emplois supplémentaires et il n'y a plus de déficit du régime des retraites. Réfléchissez à l'inverse. Ceux qui vous ont dit que plus on vit longtemps plus on travaille longtemps sont des faussaires, car plus on travaille longtemps moins longtemps on vit. La preuve, l'espérance dans tous les pays où l'âge de la retraite a été repoussée. Si vous voulez sauver le régime des retraites, évitez de naître.
Sud Ouest: Concernant le vote utile ou efficace pour lequel militent les socialistes, vous avez écrit sur votre blog à propos de François Hollande: "Il est le premier à avoir déclaré qu'il n'y avait rien à négocier après le premier tour." A la lueur de votre percée dans les sondages, est-ce que pour avoir votre soutien, le PS devra négocier avec vous?
Jean-Luc Mélenchon. Notre objectif est la révolution citoyenne. Son préalable est que M. Sarkozy soit battu. Nous n'avons pas besoin d'aller signer des parchemins avec M. Hollande qui ne le veut pas, pour savoir ce que nous avons à faire. Il y a longtemps que les électeurs n'écoutent plus les consignes des chefs. Celui qui arrive en tête doit se donner la peine de convaincre sans espérer le confort de pouvoir contraindre
Cécile : Bonjour, je suis auto-entrepreneur. Pensez-vous modifier/supprimer/remplacer ce statut lorsque vous serez élu ?
Jean-Luc Mélenchon. Il s'agit d'une escroquerie. L'auto-entrepreneur est un auto-esclave. Les abus de toutes sortes font foison, à tous les niveaux de qualification. je connais un ingénieur licencié par consentement mutuel, et réutilisé séance tenante comme auto-entrepreneur et ainsi de suite. On a baptisé avec un nom pédant ce que l'on appelait travailleur à la tâche.
Jordan : Que pensez-vous des affaires politico-financières qui secouent l'UMP en ce moment? Notamment les révélations sur l'affaire Bettencourt/De Maistre?
Jean-Luc Mélenchon. Si c'est vrai, comme tout le monde je suis écoeuré. Mais je ne suis ni juge ni policier. La lutte contre le capitalisme ne dépend pas de telle ou telle personne, quand bien même qu'ils seraient tous vertueux, leur système ne l'est pas.
Ramuntxo : Comptez vous cesser la privatisation de la SNCF et l'ouverture à la concurrence dés 2014?
Jean-Luc Mélenchon. La privatisation de la SNCF a été décidée avec l'accord des autorités françaises au niveau européen. Le dernier paquet rail accélérant cette privatisation. Le vote des députés de droit et du parti socialiste, souvenez-vous en. Ceci nous conduit à un désastre. Partout ou le rail a été privatisé, les trains roulent moins vite les accidents sont plus nombreux. Un gouvernement de Front de Gauche rétablira la monopole car nous avons besoin d'un effort sans précédent pour organiser le ferroutage intégral de tout l'actuel transport par camion, entre les frontières nord et sud de la France.
Sud Ouest: Ce tchat touche à sa fin. Un dernier mot pour conclure?
Jean-Luc Mélenchon. Désolé de devoir vous quitter si vite. J'y suis contraint par mon emploi du temps dont vous devinez qu'il est vraiment très contraignant. Mon mot de la fin : j'ai confiance en nous tous, tous les problèmes auxquels nous sommes confrontés ont une solution. si compliqués qu'ils soient. Quoi qu'il en soit, le mot clé reste : partager! partager les richesses. Personne ne pourra jamais vivre heureux dans un océan de malheur.