Le scandale des dépassements d’honoraires
Un accord au rabais vient d'être signé entre les syndicats de médecins libéraux, le gouvernement et l'assurance maladie concernant les dépassements d'honoraires. Or cette pratique mercantile est une cause importante des renoncements aux soins qui concernent désormais un tiers des Français.
Une situation inacceptable
30 000 médecins pratiquent des dépassements, essentiellement des spécialistes. Dans certaines spécialités, il est difficile de trouver un médecin respectant le tarif de la sécurité sociale (28 euros) : gynécologues, ORL et ophtalmologues etc.
Dans les grandes villes, c'est encore plus vrai et cela concerne aussi les généralistes.
En matière de chirurgie, les patients sont complètement captifs puisque 90 % des chirurgiens pratiquent des dépassements. Ces derniers donnent lieu à des marchandages indignes où les patients en sont réduits à arbitrer entre leur santé et leur portefeuille.
Car, par principe, les dépassements d'honoraires ne sont pas remboursés par le Sécu. Ils sont à la charge du patient, éventuellement remboursés par sa mutuelle s'il en a une et si elle est efficace. Or le montant total des dépassements a atteint le record de 2,5 milliards d'euros en 2010. Depuis plusieurs années, ces dépassements permettent aux revenus des spécialistes d'augmenter beaucoup plus vite (+ de 5 % par an) que les revenus des autres médecins et encore plus vite que les revenus de l'ensemble des salariés.
Ces dépassements contribuent fortement aux renoncements aux soins ou au report de soins. Les renoncements à se soigner touchent 27 % de la population et grimpent à prés de 40 % chez les ménages pauvres et les étudiants. Quant aux reports, ils ont des conséquences souvent catastrophiques sur l'évolution des pathologies, avec des surcoûts à la clef pour l'assurance maladie.
Jusqu'à présent, la loi disait seulement qu'ils devaient être pratiqués avec "tact et mesure" mais sans plafonner leur montant.
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Que dit l'accord sur les dépassements d'honoraires ?
Le gouvernement avait exigé une négociation entre l'Assurance maladie et les syndicats de médecins pour encadrer les dépassements, menaçant de légiférer
Après plusieurs jours de négociations, un accord a été trouvé lundi 22 octobre avec les syndicats de médecins. Il prévoit "la réduction des dépassements excessifs".
- L'accord fixe le montant à partir duquel un dépassement est "excessif" à 2,5 fois le tarif de la sécu (soit 70 euros pour une consultation de spécialiste) mais ce taux ne sera qu'un "repère" parmi d'autres et "pourra faire l'objet d'adaptations dans certaines zones géographiques".
- L'accord propose un contrat individuel aux médecins sur la base du volontariat. La sécurité sociale remboursera mieux les tarifs avec dépassements si les médecins s'engagent à ne pas dépasser 100% du tarif sécu (56 euros pour un spécialiste) et à prendre au tarif sécu les patients urgents et 9 millions de patients modestes (au-delà de la CMU). En échange, les médecins bénéficieront aussi d'une prise en charge de cotisations par la Sécu.
Pour arriver à un accord, le gouvernement a prévu 320 millions d'euros de plus pour rémunérer les médecins.
Un accord au détriment des patients et de la santé publique
- C'est du bricolage : on ne fait pas une politique de santé publique uniquement avec les syndicats de médecins. Etaient absents : les patients et l'hôpital public.
- Sous couvert "d'encadrement", l'accord continue d'accepter les dépassements d'honoraires. Le Front de Gauche propose de les interdire. L'accord ne propose même pas d'aller vers une extinction progressive.
- Il y a un risque majeur d'effet pervers : en fixant un seuil maximal, l'accord encourage les médecins à pratiquer des dépassements jusqu'à ce seuil.
- La question de la prise en charge des besoins de santé à 100% par la sécurité sociale, comme le propose le Front de Gauche, reste entière :
- - les dépassements d'honoraires continueront
- - les franchises médicales mises en place par la droite ne seront pas supprimées
- - le projet de budget de la sécu ne prévoit pas d'augmenter la prise en charge solidaire.
>> Communiqué du Parti de Gauche contre les dépassements d'honoraires