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12juil 13

Première carte postale

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Ce post fonctionne comme une carte postale politique. Je suis sur les routes, en quelque sorte, et je passe un instant sur mon clavier. Je propose un petit coup d’œil sur quelques évènements récents. Depuis l’Egypte en passant par l’Amérique du sud, avec une pause pour dire son fait à la pitoyable équipe des solfériniens. Elle s’est, en effet, encore distinguée par son atlantisme compulsif dans le dernier épisode de l’affaire Snowden. En fait, il s’agit de bien assimiler à quel point le monde est globalisé et de faire des efforts concrets pour assumer les responsabilités de notre temps.

Merci à «Arrêt sur Images» qui rend accessible à tous la vidéo du débat que le site a organisé entre Jacques Sapir et moi à propos de l'Euro. L'émission est longue, autant vous en prévenir, puisqu'elle dure deux heures. Elle est aussi assez technique nous dit-on. Mais ce fut un bonheur pour moi d'y participer. Je souhaite qu'il en soit de même pour ceux qui auront la patience de s'y intéresser.

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15mar 13

Ça va mieux en le disant

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manif_medef_25J’ai dit à chaud ce que j’avais à dire à propos du nouveau pape. J’ai d’abord été un peu seul avec Edwy Plénel qui tweeta dans le même sens que moi. Mais depuis lors, mon bref tableau a été complété par des centaines d’articles et reportages allant dans ce sens dans la presse hispanophone. Une personne un tant soit peu informée sait, de façon absolue et certaine, que personne ne peut dire « je ne savais pas » à propos des massacres de masse, les tortures et les viols qui ont abouti au meurtre de 30 000 personnes en Argentine. Puis ensuite, après la fin de la dictature, des années de polémiques publiques n’ont pas permis à qui que ce soit d’être « neutre » ou « à côté ». Pour ou contre, un point c’est tout. Encore une fois, parmi les nôtres qui furent martyrisés et assassinés, il y avait beaucoup de catholiques et de nombreuses gens d’église, comme nos compatriotes les deux religieuses enlevées à la sortie d’une réunion de résistance dans une église. La camarade qui est restée en arrière ce jour-là pour ranger les chaises à la fin de la réunion et qui a donc échappé par hasard à la rafle m’a raconté la scène. Je sais de quoi je parle. Ce n’est donc pas une affaire de religion. C’est une question politique. Ce pape a couvert, et même collaboré selon certains, avec nos ennemis les plus féroces. Nous ne l’oublierons pas un jour, pas une minute, pour la raison que nous n’oublions aucun des nôtres mort dans la lutte où il n’était pas du bon côté.

manif_medef_18Dans cette note je viens sur un sujet que je veux signaler d’entrée : la question allemande en Europe. Elle prend une signification singulière la semaine où le budget européen est rejeté avec les voix des socialistes et des Verts qui soutiennent le gouvernement qui a pourtant approuvé le dit budget. Elle prend aussi un relief singulier la semaine où le parlement européen a décidé la mise sous contrôle de tous les budgets nationaux dans le cadre du Two pack et que les socialistes et EELV l’ont voté à l’exception d’une abstention socialiste. Tout ceci représente une masse de travail d’explication que j’ai réparti entre mes deux blogs. J’invite donc mes lecteurs à faire un saut sur mon blog Europe. Beaucoup le découvriront quoi qu’il soit joignable depuis toujours depuis celui-ci. Mais surtout beaucoup vont pouvoir vérifier l’effort de vulgarisation que nous faisons au moment où l’Union européenne est devenue plus absconse et impénétrable que jamais.

La question allemande et l’impasse de l’Europe.

Marginalisée pendant des décennies du fait de sa défaite et de sa division, autant que du poids de la honte des crimes nazis, l’Allemagne fédérale s’est, du coup, reconstruite et réunifiée en pesant chaque pas comme une étape vers son rétablissement en puissance. Pendant ce temps, hors de la parenthèse gaulliste et des vigilances de François Mitterrand, les Français ont été endormis. Ils l’ont été par les sociaux-démocrates et les démocrates-chrétiens, alliés dans le projet européen à la sauce Jean Monnet. Ils se sont laissés porter par une situation de force qui semblait aller de soi pour toujours. D’un côté des calculateurs forcés, de l’autre des dilettantes frivoles. L’Allemagne a donc marqué ses points en s’occupant d’elle comme du sujet de l’histoire. Sa domination actuelle met en danger l’économie de chaque nation et la construction européenne elle-même. En plongeant l’Union entière dans la récession, l’Allemagne de Merkel menace l’économie générale du monde.

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Je me suis déjà exprimé à de nombreuses occasions sur la question que pose la nouvelle Allemagne aux Français. Ce point n’a jamais retenu l’attention de mes commentateurs. C’est pourtant pour moi une question cruciale qui donne son sens à de nombreux aspects de ce que je crois utile de faire dans notre pays. La cécité volontaire de bon nombre de commentateurs a une racine dans la pensée dominante médiatiquement acceptée. Car, malheureusement, l’influence des déclinistes et la démission des élites politico-médiatiques a amplement désarmé la conscience des risques inadmissibles qui résultent mécaniquement d’une domination allemande sur l’Europe. Quel risque ? Celui que fait peser la subordination de tous aux besoins étroits de quelques-uns surtout quand ces intérêts sont peu représentatifs de la condition générale des autres nations. Aujourd’hui, la politique européenne est exclusivement calculée pour répondre aux intérêts de la population vieillissante de l’Allemagne. Cette population qui dépend des fonds de pensions pour ses retraites est donc fascinée par les cours de bourse soutenus et l’existence d’un euro très fort. Le système qui y correspond est dorénavant construit. Il place l’Allemagne au centre d’un ensemble productif où les pays voisins du nord, qui étaient autrefois dans la mouvance du Mark, le sont tout autant autour de l’euro fort à la sauce berlinoise. Cet ensemble reçoit dorénavant le renfort stupide d’une tradition bien française de Salariés de Peugeotfascination et de capitulation des élites devant l’outre-Rhin. Celle-ci se nourrit à présent des recommandations du modèle libéral. La parole officielle est donc captive des figures imposée de l’adulation pour le « modèle » allemand. Ses faiblesses semblent invisibles vue du balcon de nos grands commentateurs.

Mais les allemands, eux, sont plus lucides. Ils savent que leur transition démographique en cours peut les conduire au chaos. Leur chance actuelle sur ce plan : leur besoin vital d’immigration les voit se nourrir de la déconfiture des pays européens qui contraignent leur jeunesse à s’expatrier pour fuir le désastre que la politique allemande impose à tous ses partenaires. Mais cela ne règle rien, sur le fond : la décroissance de la population allemande déforme aux deux extrêmes d’âge la solidité du système productif, pour ne parler que de cela. D’un côté, moins de jeunes égale moins de main d’œuvre formée aux nouvelles qualifications alors que le système d’enseignement allemand, centré sur l’apprentissage, ralentit déjà l’intégration des nouveaux savoirs de pointe. D’un autre côté, davantage de personnes âgées alourdit les dépenses sociales, par exemple pour la santé, et fragilise le système de financement de retraite. Oui de retraite. Car la retraite par capitalisation est, elle aussi, sensible à la démographie, cela va de soi. C’est d’ailleurs pourquoi s’élèvent déjà des voix en Allemagne pour réclamer un passage de la retraite à soixante-dix ans ! Vous avez bien lu : à soixante-dix ans ! Le soi-disant modèle allemand sera à terre bien avant qu’on ne le croit. Car il n’est pas loin du tout le moment où se croiseront les effets d’âge avec la manif_medef_17récession en Europe et la concurrence des pays émergents sur les segments actuellement exportateurs de l’Allemagne. « Cinq ans » dit une huile allemande (Le Figaro 12 mars) !

J’ai dénoncé et montré tant de fois ici le rôle désastreux de l’euro fort ! A présent maintes voix s’élèvent pour dire de même que les analystes du Front de Gauche ! Le dernier pic de croissance connu en Europe eu lieu en l’an 2000. Il a correspondu à un euro valant 0,90 dollars. L’euro vaut aujourd’hui 1,35 ! Il est même monté jusqu’à 1,60 ! Un désastre économique ! Plus l’euro est cher, plus les marchandises se vendent difficilement sur le marché mondial où elles rencontrent d’autres marchandises libellées dans des monnaies plus faibles mais adossées à des économies puissantes comme celle des Etats-Unis ou du Japon et même des Anglais ! Tous les efforts les plus intenses de productivité, effectués au prix des larmes, sont annulés par le niveau de la monnaie. Les Allemands s’en moquent, en partie, car leurs produits sont destinés à des niches où ils ont peu de concurrents et où se positionne une clientèle riche. Ainsi suis-je stupéfait de voir reprocher aux constructeurs automobiles français de ne pas avoir « fait comme les allemands » ? Qu’ont-ils fait ? En tous cas pas mieux que les ouvriers français qui travaillent mieux et produisent davantage. Non, les Allemands sont forts pour produire des voitures qu’achètent les riches, lesquels ne sont pas influencés dans leur décision d’abord par le prix d’achat, comme c’est le cas dans le segment des classes moyennes et populaires. En résumé, on comprend sans difficulté que dans des économies où l’on pratique de l’austérité, la vente à l’étranger est le cœur du modèle d’enrichissement. Ce n’est pas seulement anti-écologique ! C’est une prime donnée aux producteurs pour riches. Ça non plus ce n’est pas écologique ! Car cela pousse aux consommationsmanif_medef_20 ostentatoires et gaspilleuses. Et surtout cela détourne les objectifs de la production de la population à laquelle elle devrait d’abord s’intéresser : le grand nombre. Et c’est une incitation à faire baisser le cours des monnaies pour donner un avantage comparatif sans gain de productivité. Le contraire de ce que veulent nos chers Allemands qui nous infligent donc un absurde euro fort. 

L’examen de la position allemande est souvent présenté d’une façon totalement biaisée. Tout se passe comme si l’Allemagne vertueuse exportait d’abord sur le marché mondial. En ce sens elle serait plus « agile » et « compétitive » sur le « marché monde » que nous pauvres lambins de Français. Cette analyse est fausse. L’Allemagne n’exporte sur le marché mondial qu’une petite partie de sa production. Et cela, comme tout le monde peut le vérifier, dans des segments étroits de la production ou pour mieux dire dans des « niches », telles que les machines-outils ou les engins de transport. Mais le gros de l’export se fait en direction du marché intérieur de l’Union européenne. C’est bien pourquoi l’Allemagne va payer elle-même cher le ralentissement de l’activité que provoque sa politique rigide de bureaucrate libérale sur le mode dogmatique est-allemand qui est le style et l’histoire personnelle de madame Merkel. Puisque les clients ont été étranglés, le fournisseur le sera en même temps. Et par Salariés de Sanoficontagion le monde entier, car il faut rappeler que l’Union européenne représente le quart du PIB mondial.

Donc l’Allemagne réalise l’essentiel de ses performances dans le marché commun européen. On ne saurait mieux dire qu’en réalité elle y parvient sur le dos des autres et de nous Français en particulier grâce à un avantage compétitif indu qui est le dumping social. Le dumping social c’est payer son monde moins cher que le voisin. Que cette différence s’évalue en temps de travail réel ou en salaires rapportés à la productivité. C’est ce que font les allemands. C’est l’équivalent invisible d’une dévaluation compétitive. Voilà ce que l’Allemagne inflige à ses voisins. Le système est très bien organisé grâce à l’Union européenne. D’abord est maintenu un niveau de salaire très bas dans l’est de l’Europe pour payer une main d’œuvre très qualifiée. Ceci est obtenu grâce à l’interdiction d’harmonisation fiscale ou sociale que contient le Traité de Lisbonne. Ces pays fournissent des pièces détachées à très bon marché qui sont ensuite assemblées en Allemagne. Là sévit, depuis Schroeder, une discipline salariale maintenue par un système de contrainte des chômeurs particulièrement cruel. De même le coût des retraites est en bonne partie basculé sur le système par capitalisation qui, par définition, ne se finance pas à la source du travail et donc ne « pèse » pas sur lui, en apparence. De plus il n’apparaît dans aucun compte de l’Etat. L’ensemble permet des productions à bas prix, et un affichage de faible chômage du fait du vieillissement de la population et du travail forcé sous-payé des demandeurs d’emploi. Tel est le miracle allemand. Le problème qu’il pose c’est que, pour fonctionner, tout le reste de l’Europe doit se contenir et se soumettre à des diktats de plus en plus violents. Avec le nouveau mécanisme de surveillance européen, dont relèvent dorénavant la totalité des états européens sauf l’Allemagne, celle-ci a réussi à imposer ses normes de gestion de la dépense publique à toute l’Europe et le droit d’intervenir directement dans la confection des budgets nationaux. L’Europe se présente ainsi comme un système colonial. Il contraint tous ses membres au financement de la renteSalariés de Sanofi financière par le biais d’une police politique et budgétaire qui maintien un ordre favorable au développement d’un pays et même d’un seul.

L’Europe est allemande. Et ceux qui s’y soumettent ne peuvent y survivre qu’en le devenant eux-mêmes à leur tour, sans trop y croire. Les moulins à prières habituels s’abstiendront de m’infliger les dénonciations si grossièrement convenues sur mon « mépris » pour les autres peuples ou je ne sais quelle accusation de nationalisme qui ne font jamais que m’informer sur le niveau de mauvaise foi qui nous entoure. De toute façon je n’écris pas pour mes adversaire, ni pour les petites cervelles pavloviennes, mais pour ceux d’entre-vous qui font l’effort, comme moi, d’entrer dans la difficulté des problèmes que nous affrontons, non pour y réciter des mantras, mais pour essayer de trouver des issues jouables. Pour moi, le vote du Two Pack et du « six pack » sont des seuils franchis dans la soumission de notre pays et du peuple qui le constitue. La perspective du Grand marché transatlantique est dorénavant officielle, ce qui est encore un franchissement de seuil. Le tout fait système. Une nouvelle page se tourne dans mon esprit à propos de ce qu’est en réalité cette Union. J’y reviendrai au congrès du Parti de Gauche.

Des nouvelles bonnes et des moins bonnes

Ici je dis comment mercredi, dans un aller et retour depuis Strasbourg, je suis allé à la rencontre d’Evo Moralès le président bolivien. Il m’avait invité à le rencontrer à l’occasion de son très bref séjour en France, juste avant son rendez-vous avec François Hollande. Puis je commente un hyperlien avec François Delapierre qui, au nom du Parti de Gauche s’implique au niveau national dans la bataille du référendum alsacien. Il s’agit là de la formation d’une soi-disant « collectivité locale unique », grossier pastiche ethniciste d’une province d’ancien régime. Evidemment, sur place nos amis sont ardemment mobilisés pour faire échec à ce mauvais coup de la droite allié à un secteur du PS. Puis je commente encore un lien très instructif avec mon ami Alexis Corbière qui a publié une réponse aux comparaisons historiques de Julien Dray à propos de notre orientation politique. Le point d’histoire qu’éclaircit Alexis est un très utile éclairage sur le moment que nous vivons. Enfin je reviens sur le nouvel épisode de l’offensive publique contre moi de dirigeants communistes favorables à la conciliation avec le gouvernement socialiste dans la perspective des municipales.

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Evo Moralès soupçonne les gringos.

Rencontre avec Evo MoralesEvo Moralès, le président bolivien n’était pas en forme. Pas seulement un peu enrhumé ! Il avait l’estomac très perturbé par son dîner en Autriche, la veille. Quelque chose du repas servi n’était pas bien passé et il ne s’en cachait pas. Cela n’a pas de rapport, mais disons que dans le cadre de notre conversation, cela fit ambiance. J’étais là avec Eliane Assassi, la présidente du groupe communiste du Sénat. Je crois pouvoir dire que nous fûmes assez surpris du ton très direct avec lequel le président bolivien résuma le caractère criminel des états-uniens. Il dit que les USA essaient d’abord d’avoir des gouvernements démocratiques qui fassent leur politique. S’ils ne les ont pas, ils essaient de diviser les peuples entre eux pour justifier des interventions extérieures. S’ils n’y parviennent pas non plus ils essaient de diviser les forces de la révolution pour trouver une faille qui déstabilise le processus et permette la revanche de leurs partisans par des coups d’état. Enfin, s’ils n’arrivent à rien, ils essaient l’assassinat du dirigeant du processus. Détruire les leaders est une tactique constante des Etats-Unis et de leurs agents locaux. Ce point a son importance. Car si évidemment un processus politique, surtout de nature révolutionnaire, est d’abord un phénomène de masse, le point d’appui que donne une personnalité correspondant au moment politique et le cristallisant est aussi un paramètre fondamental. Eliane Assassi confirma l’analyse générale en rappelant les innombrables tentatives de meurtres contre Fidel. Elles sont aujourd’hui avérées depuis l’ouverture des archives de la CIA. Elle informa Moralès en montrant comment Sarkozy avait joué à fond la carte de la division du peuple et l’opposition permanente entre catégories populaires.

Evo Moralès dit qu’il croit à l’empoisonnement d’Hugo Chavez. Il rappelle que Chavez était sur ses gardes, qu’il se déplaçait partout avec une ambulance et qu’il était toujours accompagné de son propre cuisinier. Il raconte comment d’ailleurs l’un des cuisiniers de Fidel fut intercepté au moment même où il s’apprêtait à l’empoisonner. Il nous dit aussi que Fidel et Chavez, les deux, l’avaient mis en garde contre l’empoisonnement et les méthodes des gringos pour assassiner les leaders dangereux à leurs yeux. Evidemment nous n’avons pas parlé que de cela, mais ce moment de la discussion m’a marqué. A côté de lui, Chokehuanca, son ministre des affaires étrangères, que je connais de longtemps, nous regardait fixement comme pour souligner l’importance de ce que disait Evo et faire comprendre leur méfiance en toutes circonstances.

Avec Eliane Assassi, sénatrice PCFEnsuite Evo Moralès nous a expliqué pourquoi son pays avait besoin de desserrer l’étau de la domination technologique des Etats-Unis en misant sur l’Europe. Il dit : « Nous ne demandons pas qu’on nous offre quoique ce soit. Nous achetons ! Mais nous voulons des transferts de technologie pour apprendre à savoir-faire ». Il a donné l’exemple des avions Airbus et Boeing. J’ai évoqué l’extraction du lithium. On me répondit que l’offre française dont je parlais ne comportait aucune activité de transformation sur place et que dans ces conditions elle était mal placée. Hum, ce n’est pas seulement ce que je voulais dire… On a deviné que c’était là sans doute les thèmes dont il voulait parler avec Hollande. Son idée est que les européens et les Français en particulier peuvent les aider à être indépendants face aux nord-américains. J’ai donc été obligé de dire les limites de ce raisonnement. Surtout avec un homme aussi lié aux nord-américains que François Hollande. Ce que je n’ai pas eu la cruauté de rappeler, c’est de quelle façon indigne, lui Evo Moralès, n’avait pas été reçu par le PS de Hollande à son premier voyage de président en France (« impossible tout le monde est au ski ! ») et dans quelles conditions désinvolte il le fut enfin à son deuxième voyage. Moralès a certes la patience qui est le fort de la culture des indiens des Andes. Mais il ne mesure pas l’arrogance des solfériniens et leur superbe indifférence pour l’Amérique latine. Bien sûr je ne demande qu’à être agréablement surpris. Mais j’ai passé l’âge du pépère noël. Hollande s’est toujours fichu comme de sa première chemise de la Bolivie, des indiens et de tout leur fourbi.

L’Alsace est française à part entière.

Le maquis institutionnel des lois dites de décentralisation offre bien des opportunités contraires à l’idéal républicain de la Nation. D’ailleurs le soi-disant acte III de la décentralisation de François Hollande va en être une nouvelle démonstration. Le président de droite de la région Alsace a imaginé profiter d’une possibilité offerte par la loi pour faire un référendum en vue de fusionner en une seule collectivité locale toute l’Alsace. Pour ce mauvais coup, il a d’abord disposé de l’appui des élus d’extrême-droite et d’une des deux fédérations départementales du PS. Les prétextes d’économie sont un rideau de fumée. En réalité il s’agit de construire une seigneurie locale sur un fond de pulsions ethnicistes inavouées. En attendant pire, cela va de soi. Il est lamentable que ce soit en Alsace, pour laquelle tous les Français ont tant donné au cours de deux guerres, que les particularistes fassent leur sale besogne ! François Delapierre a décortiqué ce dossier. Je vous invite à le lire. En particulier il montre comment, une nouvelle fois, se met en place une opération bourrage de crâne. Un « journaliste » de France Inter été chargé de faire campagne pour le « oui ». Celui-là est pressé et faire des tambouilles à la commande ne devait guère le motiver. Il y alla donc à la grosse louche pour bovins, avec les bonnes vieilles méthodes de l’amalgame. Comme d’habitude, plutôt que d’aider chacun à réfléchir pour faire son choix de vote, il s’agit d’imposer « le bon choix » en assénant une propagande brutale et simpliste. Encore un « journaliste » qu’on retrouvera bientôt dans un cabinet ministériel ou au service com d’une grande collectivité locale. Comme tous les professionnels n’ont pas traité le sujet de cette façon propagandiste, Delapierre dispose d’un bon tour d’horizon pour analyser. La lecture de ses deux notes sur le sujet permet de disposer d’un bon argumentaire face à la multiplication des bricolages institutionnels auxquels vont se livrer les barons locaux dès que l’acte III de la décentralisation le leur permettra.

Les années 30 sont-elles commencées ?

Julien Dray s’est livré à une très dure critique de François Hollande sur Radio J. Il a annoncé l’échec programmé de la politique de François Hollande. Par une facétie très journalistique, pour finir, ce n’est pas ce qui est retenu par la presse. C’est sa phrase contre notre orientation politique. Pourtant ce n’était pas du tout le centre de ce que Dray a dit dans cette émission. En effet l’argument sans originalité produit à ce moment ressemblait plus à une cotisation formelle à la cause solférinienne. Elle devenait d’autant plus indispensable que la charge contre la politique de Hollande voyait Dray reprendre notre argumentation. Quoiqu’il en soit, la garde médiatique meurt mais ne se rend pas. Pas question de pointer le divorce entre Dray et Hollande. On nous a donc resservi la rengaine d’une séparation Dray-Mélenchon qui a pourtant eu lieu il y a maintenant onze ans ! Dray et moi nous sommes séparés en 2002 précisément sur la question de savoir s’il fallait où non faire confiance à Hollande pour pouvoir ramener le PS vers une ligne de gauche. Dray et Lienemann proposaient de rejoindre Hollande. Celui-ci leur avait promis monts et merveilles, jubilant de parvenir à faire éclater le seul courant idéologiquement construit qui avait tenu tête aussi bien à François Mitterrand contre la guerre du Golfe qu’à Lionel Jospin contre le traité d’Amsterdam. Je m’y opposais fermement. Une majorité se forma avec moi autour de ceux qui sont devenus depuis des fondateurs du Parti de Gauche comme Delapierre, Le Néouannic, Corbière, Martin, Amard et combien d’autres. La gauche socialiste éclata dans ce vote des militants où Dray et Lienemann ne purent recueillir que 20% des suffrages. De mon côté je me rapprochais aussitôt d’Henri Emmanuelli pour constituer un nouveau courant de gauche : « Nouveau Monde ». Depuis cette date Julien Dray a fait équipe sans discontinuer, à tour de rôle, avec l’un ou l’autre du tandem Hollande-Royal. Il ne revient à la gauche du parti qu’au dernier congrès où il fait courageusement le choix du retour à la case départ. Il y prit le risque de présenter un texte d’opposition et de se compter avec Lienemann, et Maurel. Au même moment « la gauche » version Emmanuelli et Hamon décidait de cesser le combat et de se fondre dans la majorité hollandaise du parti. Un chassé-croisé en une décennie qui en dit long sur la vanité de tout groupement idéologique dans le PS de l’ère Hollande où la lutte des places a tôt fait de dissoudre les convictions. Je ne fais ce rappel que pour signaler le véritable sens de l’intervention de Julien Dray sur radio J.

C’est d’abord le franchissement d’un seuil de rupture supplémentaire avec François Hollande. Ne pas le voir ni le relever ne peut résulter que de l’ignorance de l’histoire interne du PS. Ou bien ce peut être de l’intention somme-toute fort peu professionnelle de dévier le coup. Ou bien encore un effet de la stupidité mercantile : « Ha ! Si ces deux-là pouvaient se battre, quel buzz !… ». Une combinaison des trois ne doit pas être exclue. Mais tout cela étant dit, la sortie de Julien Dray sur le parallèle entre notre ligne d’action et celle des staliniens des années trente en Allemagne mérite qu’on s’y arrête. D’abord parce que c’est un fait des plus rares qu’un dirigeant socialiste se réfère à l’Histoire. Cela mérite donc considération. Ensuite parce qu’il n’y a rien de tel qu’une polémique sur fond d’Histoire pour élargir la formation et la culture de ceux qui veulent y prendre part. La connaissance du passé, bien utilisée éclaire la pensée du présent. Ce travail a été bien mené par Alexis Corbière sur son blog.

Il y est revenu puisque Dray a répondu à la première réplique d’Alexis. Je vous invite à lire ces deux notes. Elles sont très instructives. Corbière montre que Dray utilise l’argumentation de Léon Trotski sans se rendre compte que ce dernier menait un débat interne au mouvement communiste de l’époque. Si Trotski ne traite pas de la responsabilité considérable des socialistes dans le désastre qui conduisit au nazisme, c’est parce qu’elle va de soi aux yeux d’un communiste de cet époque. En effet toute la social-démocratie s’était écroulée partout devant l’extrême-droite. En Allemagne les socialistes voulurent « faire barrage à Hitler » en soutenant la candidature présidentielle de cette vieille ganache réactionnaire d’Hindenburg. Ils préférèrent en effet ce vote plutôt que de soutenir la candidature du communiste Ernst Thaelmann. C’était déjà la théorie du « front uni contre le pire » donnant le pouvoir au centre pour éviter la droite extrême. Cette sottise, que chacun est capable de retrouver dans les politiques d’aujourd’hui, s’acheva dans le fiasco le plus total : c’est Hindenburg, le candidat des socialistes, qui appellera Hitler à la chancellerie. Dray ne pouvait donc trouver pire exemple de sa thèse ni meilleure illustration de la nôtre. Lisez tout cela si vous vous sentez en appétit de belles argumentations.

Dartigolles et Chassaigne remettent une pièce dans la machine à diviser.

Evidemment il s’agit d’une offensive. Cette semaine de nouveau, comme la précédente, le porte-parole du PCF et le président du groupe communiste à l’Assemblée s’en prennent à moi. Mes mises en garde contre la dangerosité de ce genre de polémique publique et personnalisée sont donc restées lettre morte. Ils font de nouveau l’apologie de leur raisonnable réalisme opposé à mes « postures tribuniciennes ». Je vois bien que ces propos ont pour but de me faire entrer dans une escalade verbale. Ainsi serait ouverte une brèche dans le Front de Gauche, celle à laquelle travaillent depuis des mois les socialistes, sans aucun succès. Elle est la condition de base pour la grande reconstitution d’un gouvernement de la gauche plurielle que rêvent et trament dans les couloirs tous les bons amis. Je suis trop conscient des devoirs du moment pour m’y laisser prendre. Quoiqu’il en soit, plus l’échec du PS devient patent, plus les appareils s’arcboutent pour essayer de marginaliser la voix d’une alternative à gauche. Pour cela tous les moyens sont bons. Et tous les relais sont bienvenus. Depuis des mois Olivier Dartigolles et le clan « accommodant » du PCF n’auront pas ménagé les noms d’oiseaux à mon égard. Le paroxysme ce fut la tirade contre la campagne du PG sur l’amnistie confiée au journal « Libération ». Là, c’était un met de choix : pour la première fois un dirigeant s’octroyait le droit de critiquer le style, le contenu de la campagne d’un autre parti du Front et cela sur le mode de l’attaque personnelle. Dans une récente tribune confiée à « L’Humanité », persistant dans l’agression, le porte-parole oppose fallacieusement ceux qui seraient pour obtenir des « résultats tout de suite » et ceux qui camperaient sur une « posture » d’opposant systématique. On connait la musique de cette opposition de convenance entre les « réalistes » et les révolutionnaires : une banale logorrhée pour habiller les politiques d’accompagnement des socialistes. Bref la reprise de la pose de Robert Hue. Faut-il rappeler sur quels bancs celui-ci achève sa trajectoire politique ?  

De son côté André Chassaigne n’a pas chômé non plus. Il est déjà l’inventeur de la double indépendance des parlementaires. Indépendance du groupe à l’égard du Front et de chaque parlementaire à l’égard du groupe. A présent il en déduit qu’il peut donc se sentir totalement émancipé de toute démarche collective avec les militants du Front de Gauche et des textes qu’ils adoptent. Il prétend de façon très personnalisante que « Mélenchon et les députés n’ont pas la même approche sur la loi d’orientation scolaire ». Il oublie que ce désaccord n’est pas seulement entre lui et moi ! En effet, une fois de plus il fait l’impasse sur l’ensemble des militants du Front de Gauche de l’éducation comme l’a confirmé la tribune parue dans l’Humanité sur le sujet. Ainsi le « collectif », qui fut le refrain du député du Puy-de-Dôme, est désormais réservé au cénacle des dix élus qui l’entourent. Et ce n’est pas d’aujourd’hui. Non seulement les amendements au budget ne correspondaient à aucune des propositions du programme partagé « L’Humain d’abord », mais c’est à lui qu’on doit le vote d’abstention face au budget d’austérité. Un compromis sans consistance ni autorité politique entre ceux qui voulaient voter pour et ceux qui voulaient voter contre. Bien entendu, celui-ci aussi m’accuse de « posture », le mot à la mode parmi l’aile des accommodants. Ce qui est inquiétant à mes yeux ce n’est pas que nous ayons des avis différents. Il y a sur tous les sujets des avis différents au Front de Gauche. Cette diversité est consubstantielle au Front de Gauche. Ni même qu’il ne soit tenu compte de l’avis de personne au moment où le groupe à l’Assemblée prend ses décisions, puisque nous n’y pouvons rien.

Ce qui m’inquiète c’est que tout en reconnaissant la nature conciliatrice de leurs prises de position, en opposition à la mienne, les intéressés ressentent le besoin de rendre ce fait public. L’énormité du procédé m’a motivé pour écrire ces lignes. Faut-il rappeler que, dans cet enchaînement, tous les coups qui me sont portés le sont en réponse à des attaques que j’ai portées contre… le PS. N’y a-t-il pas déjà assez de ses chiens de garde comme Luc Carvounas pour défendre la rue de Solferino ? Et quel besoin d’assortir l’énoncé des désaccords de propos de dénigrement personnel à mon égard ? Et pourquoi avec les mots de la propagande du PS ? C’est même la marque de fabrique. La manœuvre est cousue de fil blanc. Il s’agit d’un signal de connivence avec les solfériniens. Pourtant, diviser le Front de Gauche ne mènera nulle part ceux qui en ont fait leur fonds de commerce. Il leur reste à apprendre que sa majesté PS ne permet pas à ses commensaux mieux que de manger à la table des domestiques. Un très grand nombre des communistes, sur le terrain, ont pris goût à l’autonomie vis-à-vis du PS. Ils  adoptent un esprit conquérant localement. Ils s’inquiètent de cette dérive Huiste. Surtout après un congrès qui a confirmé à la fois la ligne d’union et celle de l’autonomie. Ils ont raison. Mais ils peuvent être assurés que je ne me laisserai pas intimider.





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