Interviews
21mai 14
« S’abstenir, c’est signer un chèque en blanc »
Vous parlez de « refonder l’Europe », de mettre un terme à « l’Europe de la finance ». Comment rompre avec la logique libérale et austéritaire ?
Cette élection prend sa place au cœur d’une crise de civilisation en Europe, d’une nouvelle guerre en Ukraine, d’une transition climatique qui s’accélère, et d’une guerre sociale encore aggravée avec la directive « travailleurs détachés ». Tout cela tourne mal et rien dans le cadre institutionnel de l’Europe ne permet de redresser la situation. Au contraire. La politique des 3 % de PIB de déficit maximum s’applique avec férocité avec des plans d’austérité qui n’ont même plus pour prétexte leur justification initiale, à savoir les taux d’intérêt auxquels les Etats empruntent sur les marchés financiers puisque ceux-ci sont aujourd’hui les plus bas de notre histoire. La conduite de l’Europe est idéologique, aveuglée et à maints égards hallucinée. Nous représentons, nous, la possibilité d’une sortie par le haut. Nous n’avons jamais prétendu que ce serait simple ni que nous détenions seuls la possibilité de renverser le cours des choses. Mais l’objectif du Front de gauche est de constituer d’élection en élection un rapport de forces et surtout de constituer un peuple politique. Le changement écologique et social n’est pas un supplément d’âme, c’est le cœur de ce qui peut permettre cette sortie de crise par le haut.
17mai 14
L’Austérité ne mène nulle part
Vous souhaitez refonder l’Europe. Qu’est-ce que cela signifie ?
L’Europe est passée d’une coopération économique a une absurdité erigée en règle absoliue: pas plus de 3% de déficit ou la mort. Le résultat ? Il n’y a jamais eu autant de chômeurs, de pays ruinés et aussi peu de croissance. Prétendre « réorienter l’Europe » dans le cadre des traités actuels est une mystification. Les traités bloquent tout ! Il faut donc refonder l’Europe en partant sur d’autres bases.
Le traité transatlantique a été au cœur de cette campagne. Pourquoi y êtes-vous opposé ?
Ce grand marché Etat-Unis-Europe va unifier les normes, à propos des marchandises, de leur contenu, de la manière de les conditionner et de les vendre. L’alignement par le bas est garanti d’avance. Nous avons pris l’exemple du poulet américain lavé à la javel. Cela donne un contenu très concret à cette question. L’électeur pourra dire oui ou non à ce traité en élisant les députés qui vont se prononcer à son sujet.
15mai 14
« Hollande mérite le vote sanction »
Le Front de gauche a été créé il y a six ans pour changer l’Europe à l’occasion des élections européennes. L’objectif est-il le même ?
Six ans après, tant de choses ont changé ! Il y a notamment eu le nouveau traité budgétaire qui oblige le gouvernement français à présenter son budget avant même que les députés ne le votent. La France doit désormais se soumettre au plan de marche de la commission européenne. Il y a eu aussi la crise grecque.
Nous voulions « changer » l’Europe. Ce n’est plus possible. Si l’on veut rester européen, il faut rompre avec cette Europe pour la refonder !
14mai 14
« Nous voulons refonder l’Europe »
Pour le Front de gauche, l’UMP et le PS c’est bonnet blanc et blanc bonnet au niveau de l’Europe ?
Oui. Leurs deux candidats à la présidence de la Commission disent eux-mêmes qu’il n’y a pas de différences entre eux. C’est ce qu’ont affirmé formellement Martin Schulz et Mr Juncker chacun de leur côté. Il ne faut pas s’en étonner. Le parti socialiste européen et les libéraux et conservateurs gouvernent ensemble dans 16 pays sur 28 en Europe. Martin Schulz est symbolique de cette alliance puisque son parti participe au gouvernement d’Angela Merkel et qu’il a écrit le volet européen du programme commun du SPD et des conservateurs allemands. Enfin, le PS et l’UMP votent toujours ensemble toutes les mesures qui sont dans le fil du traité budgétaire empreint d’une logique libérale. Idéologiquement, ils ont la même conception et le même programme politique sur le plan européen.
25avr 14
Mélenchon : « Notre heure viendra »
Le leader du Front de Gauche croit plus que jamais en l'émergence du "mouvement politico-social" dont il rêve. Et il voit dans les élections européennes l'occasion de "mettre en panne le régime".
Marianne. – Après le succès de la manifestation du 12 avril, avez-vous le sentiment d’être sinon écouté, au moins entendu ?
JLM : Par définition, Hollande n’entendra rien et Valls est payé pour ne pas comprendre. Mais est-ce l’essentiel ? Qu’est ce qui change la donne ? C’est le mental des marcheurs : ils sentent qu’ils sont une force grandissante. En fait cette marche constitue un objet très neuf. Les commentateurs le voient-ils ? Elle est portée par des forces dont nul n’imaginait qu’elles se rassembleraient. Le Front de Gauche, déjà, est un petit miracle. Mais en plus, vous trouvez désormais des écolos – c’est extraordinaire qu’ils aient été là en nombre! –, et des socialistes dissidents notoires. Et aussi des associations qui n’avaient jamais défilé dans une manifestation politique, comme Réseau Education Sans Frontières, le DAL. Enfin, il y a des cortèges syndicaux sous leurs propres bannières ! Ce mouvement politico-social dont on a rêvé si longtemps est donc, en train de se constituer. Ici et maintenant. C’est la politique qui le rassemble. C’est inédit en France. Cette force naissante va à la rencontre d’un défi certain : sous le coup de la crise écologique et de la crise financière, toute l’humanité se trouvera au pied du mur, contrainte de trouver une solution différente de tout ce qui est en train d’échouer. Que messieurs Hollande et Valls pensent ce qu’ils veulent : notre heure viendra. Pour des raisons qui tiennent à la force des circonstances. Eux se sont mis dans un étau. Ils ont signé à la vie à la mort avec la Commission européenne et Mme Merkel. Ils seront donc punis par où ils ont péché.